À
notre époque de crise et de chaos, il est naturel pour les grandes
puissances de s’appuyer sur l’idéologie et l’idéalisme plutôt que sur le
réalisme pratique. Les conflits internationaux d’aujourd’hui sont de
plus en plus imprégnés d’idéologie, de visions universalistes et
messianiques. Bien que l’Occident se soit d’abord engagé sur cette voie
dans l’ère de l’après-guerre froide et que la Russie ait semblé renoncer
aux projets universalistes et aux rêves messianiques dans le sillage de
l’effondrement de l’Union soviétique, le transcendantalisme,
l’universalisme et le messianisme russes traditionnels
prérévolutionnaires sont devenus le pilier par défaut sur lequel l’aile
conservatrice de l’élite et de l’intelligentsia russes s’appuie de plus
en plus. Cela soulève le spectre d’une guerre ou d’une nouvelle guerre
froide des messianismes, qui pourrait persister même si la guerre
ukrainienne entre l’OTAN et la Russie se termine par un modus vivendi
minimal.