06 septembre 2023

Un rapport officiel montre comment l’État a tiers-mondisé le médicament français


Il y a quinze ans, l’industrie pharmaceutique française était une championne européenne. Désormais, elle végète et apparaît de plus en plus comme une industrie bas de gamme. Elle se contente de gérer des médicaments matures et limite au strict minimum ses efforts de recherche. L’innovation est partie ailleurs. Cette désindustrialisation et cette paupérisation de notre industrie pharmaceutique comptent pour beaucoup dans les pénuries de médicaments que nous subissons, et dans nos difficultés d’accès aux molécules les plus innovantes. Un rapport du ministère de la Santé vient d’analyser les causes de ce désastre…. et, sans surprise, propose de ne surtout pas les combattre.



Le rapport sur la Régulation des produits de santé mérite d’être lu, autant pour le diagnostic accablant qu’il dresse sur le rôle de l’État dans la destruction de notre industrie pharmaceutique que son incapacité à sortir de la logique bureaucratique pour y faire face. On notera au passage que ce rapport propose un “New Deal”, avec un “bougé” (c’est un néologisme de la caste), très en-deçà des exigences beaucoup plus radicales requises pour inverser notre déclin.
L’effondrement de l’industrie pharmaceutique en France

“Big Pharma” a mauvaise presse en France, mais la France a mauvaise presse auprès de Big Pharma. Ce désamour réciproque ne compte pas pour rien dans la fuite de la production pharmaceutique que nous subissons. Pour mesurer les dégâts, on reprendra quelques formules du rapport lui-même :


Nous voilà donc passés de la 1ère à la 4è place européenne en seulement 15 ans ! Surtout, notre production perd énormément en qualité, puisque nous n’avons pratiquement plus de recherche et de développement dans ce secteur. Un autre graphique produit par le rapport est, sur ce point, consternant : 



Comme on le voit, la France (carré orange sur chaque bâton) ne sur-performe l’OCDE en recherche et développement que dans le domaine aéronautique. Dans la domaine pharmaceutique, alors que les USA et le Japon consacrent environ 50% de la valeur ajoutée brute des entreprises pharmaceutiques à la recherche, et que l’OCDE y consacre en moyenne 13%, la France n’y consacre plus que 6% environ. Soit près de dix fois moins que les grands pays de recherche. Soit près de 5 fois moins que la Belgique…

Là encore, le constat du rapport est accablant :


Sur le fond, en matière pharmaceutique, la France est tiers-mondisée. Elle ne se comporte plus comme un pays leader, mais comme un simple exécutant…
La bureaucratie a tué la recherche pharmaceutique

Le rapport du ministère de la Santé évite bien entendu de mettre des mots gênants sur une réalité dont il est lui-même la cause. Mais il évoque en filigrane la situation de façon éclairante :


Mais on notera aussi :


Le rapport dessine astucieusement le paysage d’un secteur sur-administré que les industriels préfèrent quitter pour des cieux moins étouffants et moins bureaucratisés. En particulier, l’Allemagne offre de meilleures perspectives, notamment pour les médicaments les plus innovants, parce que les procédures de mise sur le marché y sont plus rapides, et permettent donc une meilleure rentabilité.

Encore faut-il, sur ce point, une administration prête au “bougé”. Mais de cet effort de libération des énergies, le ministère de la Santé n’est évidemment pas capable et propose consciencieusement de continuer à forer droit : 



Il y a trop de bureaucratie, qui fait fuir les industriels ? Pas de problème, on va la renforcer, on va gérer, on va réguler encore plus… Ou comment tuer ce pays à petits feux. 
 
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/09/05/un-rapport-officiel-montre-comment-letat-a-tiers-mondise-le-medicament-francais/

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