Grâce à l'émission d'un bon d'Etat au rendement de 3,3%, l'Etat belge voulait pousser les banques à mieux rémunérer l'épargne des particuliers. Et l'engouement du public a été tel que sur les marchés, le royaume peut désormais se financer à moindre coût.
C’est un succès historique, décrit par le quotidien flamand De Tijd comme "la plus grosse fuite de livrets d’épargne jamais enregistrée en Belgique". Le 22 août dernier, le gouvernement belge annonçait l’émission d'un bon d’Etat à destination des particuliers. L'opération, trimestrielle, n'a rien d'exceptionnelle chez nos voisins d'outre-Quiévrain. Mais le dernier bon proposé aux citoyens pour une durée d’un an avec un taux brut de 3,3% (2,81% nets) et une fiscalité avantageuse s'est révélé particulièrement attractif.
Deux semaines plus tard, les chiffres parlent d'eux-mêmes: l'opération a permis de lever 21,9 milliards d'euros, bien plus que le précédent record des bons Leterme de 2011 grâce auxquels l'Etat n'avait récolté "que" 5,7 milliards d'euros.
Cette fois, le "bon Van Peteghem", du nom du ministre belge des Finances qui l'a mis en place, a attiré bien plus de monde: 600.000 épargnants au total, soit plus de 5% de la population belge. "C'est un succès énorme", s'est réjouit le ministre sur RTL info.
Une dette moins coûteuse
Le gouvernement belge a d'autant plus raison de s'en féliciter que l'argent récolté auprès des citoyens va lui permettre de revoir à la baisse ses besoins de financement sur les marchés. Ainsi, les émissions de titres de dette de court terme "prévues dans les semaines à venir seront annulées" et leur encours "sera réduit de 10,4 milliards d'euros au cours de l'année 2023", a détaillé Unicredit, cité par Les Echos. Le groupe bancaire ajoute que les émissions d'obligations d'Etat de moyen et long terme seront quant à elles réduites de 2,25 milliards d'euros, "soit environ 5% du programme annoncé par l'Etat fédéral en début d'année", relève le quotidien.
La capacité de l'Etat belge à emprunter massivement de l'argent à ses citoyens a clairement rassuré les marchés et fait baisser le coût de la dette belge. L'écart entre le taux auquel emprunte la Belgique sur les marchés et ceux auxquels empruntent l'Allemagne ou la France a baissé de 0,03 à 0,04% la semaine dernière. "C’est indéniablement dû au succès du bon d’Etat. Cela fait une bonne impression sur les marchés financiers" souligne auprès de la RTBF Jean Deboutte, directeur de l’Agence de la Dette.
Dans un communiqué, l'Agence de la Dette estime que "pour les émissions 2023 restantes, les économies" d'intérêts "sont estimées à 2,1 millions d'euros par an, soit 21 millions d'euros sur les 10 prochaines années". "Si cette réduction du spread se confirmait en 2024, 15,2 millions d'euros supplémentaires par an seraient économisés, soit 152 millions d'euros sur les 10 prochaines années", ajoute-t-elle.
Mettre la pression sur les banques
Si le bon d'Etat belge a permis d'améliorer ses conditions de financement sur les marchés, l'objectif premier était ailleurs: inciter les banques à augmenter la rémunération des livrets et comptes à terme des épargnants, le rendement de ces derniers demeurant généralement peu élevé outre-Quiévrain -inférieur au taux du Livret A en France- malgré l'inflation et la politique monétaire restrictive de la BCE.
Le succès du "bon Van Peteghem" est "surtout un signal des petits épargnants (...) pour dire aux banques qu'ils veulent un rendement plus haut qu'aujourd'hui sur les carnets d'épargne. Ce signal est très clair et j'espère que les banques ont écouté", a déclaré le ministre belge des Finances.
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A ce stade, le pari n'est qu'en partie réussi puisque seules les petites banques ont ouvert "des comptes à terme de crainte de perdre définitivement l’épargne de leurs clients. Mais pour le petit épargnant, qui laisse son argent sur un livret d’épargne afin qu’il reste disponible, l’opération ne changera hélas pas grand-chose", relève De Tijd.
Le gouvernement n'exclut pas pour autant de renouveler l'opération: "J'ai la possibilité de lancer un autre bon d'état en décembre. Mais on doit regarder le contexte. Si les taux d'intérêt bougent dans les semaines qui viennent. Et ça c'est le plus important pour les citoyens ", a indiqué Vincent Van Peteghem sur RTL info.
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