Les Néandertaliens, nos anciens cousins les plus proches, avaient développé la capacité de percevoir et de produire des sons de la parole humaine, selon une étude publiée dans Nature Ecology & Evolution.
L'idée que les Néandertaliens étaient beaucoup plus primitifs que les humains modernes est aujourd'hui dépassée. Il y a trois ans, les analyses de plusieurs dizaines squelettes avaient en effet suggéré que ces derniers soignaient aussi leurs malades et venaient en aide aux femmes enceintes.
Nous savons également que notre ancien cousin, souvent dépeint comme un être sanguinaire, n'était finalement pas plus violent que l'Homme moderne. Plus récemment, nous avons aussi appris que les nouveau-nés néandertaliens avaient un poids similaire à celui des nouveau-nés humains, indiquant une histoire gestationnelle probablement similaire.
De nouveaux travaux dépeignent aujourd'hui de nouveaux points communs entre nos deux espèces.
Une audition plus complexe qu'on ne le pensait
L'évolution du langage est une question débattue depuis très longtemps en anthropologie. Beaucoup se sont notamment demandé si la forme humaine de communication - le langage parlé - était ou non également présente chez d'autres espèces d'hominidés. Pour les Néandertaliens, il semblerait que oui.
Dans le cadre de ces travaux, une équipe de l'Université d'Alcalá (Espagne) a effectué des tomodensitogrammes haute résolution des crânes de cinq Néandertaliens pour créer des modèles 3D virtuels des structures de leur oreille. Ils ont également modélisé ces mêmes structures chez Homo sapiens et sur le crâne d'un Protonéandertalien vieux d'environ 430 000 ans, retrouvé sur le site préhistorique de la sierra d'Atapuerca.
Les données collectées ont été saisies dans un modèle logiciel centré sur la bio-ingénierie auditive. Ce faisant, les chercheurs ont pu estimer les capacités auditives des sujets étudiés jusqu'à 5 kHz, qui englobe la plupart de la gamme de fréquences des sons de la parole humaine moderne. Par rapport au fossile d'Atapuerca, les Néandertaliens ont montré une audition ressemblant plus étroitement à celle des humains modernes (entre 4-5 kHz).
Capable de produire des consonnes
Mais ce n'est pas tout. Dans le cadre de ces travaux, les chercheurs ont également pu calculer la gamme de fréquences de sensibilité maximale - connue sous le nom de bande passante occupée - pour chaque espèce analysée.
Concrètement, une largeur de bande plus large permet d'utiliser un plus grand nombre de signaux acoustiques facilement distinguables dans la communication orale d'une espèce. Là encore, les Néandertaliens ont affiché une bande passante plus large par rapport à leurs ancêtres d'Atapuerca, ressemblant plus étroitement aux humains modernes dans cette fonctionnalité.
Enfin dernier point intéressant : il est également ressorti de ces travaux que le discours de Néandertal incluait probablement une utilisation accrue des consonnes. Autrement dit, il n'était pas capable de produire uniquement des voyelles, comme on le pensait auparavant.
Il s'agit d'une différence très importante, dans la mesure où l'utilisation de consonnes est un moyen d'inclure plus d'informations dans le signal vocal. En outre, notre capacité à produire des consonnes est également ce qui distingue le langage humain des modes de communication développés par quasiment tous les autres primates.
Une coévolution de comportements de plus en plus complexe
Autrement dit, cette étude nous démontre que nos anciens cousins possédaient un système de communication aussi complexe et efficace que nous.
« C'est l'une des études les plus importantes auxquelles j'ai participé au cours de ma carrière », explique l'anthropologiste Rolf Quam, de l'Université de Binghamton. « Les résultats sont solides et montrent clairement que les Néandertaliens avaient la capacité de percevoir et de produire un discours semblable à celui des humains ».Cela ne signifie pas nécessairement que les Néandertaliens avaient la capacité cognitive de le faire, avertissent les chercheurs. En revanche, ils en étaient capables physiquement. Ainsi, l'étude fournit des preuves solides en faveur de la coévolution de comportements de plus en plus complexes et d'une efficacité croissante de la communication vocale tout au long de l'évolution humaine.
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