« La vision qui nous rassemble s'exprime dans notre ambition pour l'Homme, pour sa place dans notre société. L'enjeu aujourd'hui et demain est de permettre l'émergence d'un véritable partage de la reconnaissance et de la réussite. Évolution et performance ne font alors sens qu'au bénéfice de tous, entreprise, équipe, individu. »
L’homme qui parle est un professionnel reconnu dans le milieu du coaching. Le site internet de sa société témoigne de sa « philosophie » du management, et met en avant des valeurs humanistes et positives. Règle éthique numéro 1 : « le respect des droits de la personne ». L’homme qui parle est pourtant aujourd’hui en garde à vue, sous le coup d’une enquête pour tentative d’assassinat.
Au terme d’une enquête de six mois de la brigade criminelle, les meilleurs limiers de la police, J-L A-B a été arrêté vendredi, comme l’ont révélé ce week-end RTL et France Info. Selon nos sources, J-L A-B, 64 ans, serait le « commanditaire » du projet de meurtre de Marie-Hélène Dini en juillet dernier. Le mobile ? Une rivalité dans l’univers du coaching. « Marie-Hélène mène depuis plusieurs années un combat pour labelliser les entreprises de ce secteur, et faire un peu le ménage dans cet univers où l'on trouve un peu de tout », confie à Marianne un des proches de la cheffe d’entreprise. J-L A-B, dont la société est basée à Vélizy, aurait pris ombrage de ces démarches avant de recruter et financer, pour un total de l’ordre de 50.000 euros, une équipe de tueurs à gages…
L’affaire sent le soufre, puisqu’elle mêle d’anciens des services secrets français, la DGSE, la DGSI, et se serait nouée au sein d’une loge maçonnique de Puteaux (Hauts-de-Seine). C’est au sein de cette loge, comme l’aurait reconnu un des participants, que le « commanditaire » aurait orchestré l’opération. Selon nos informations, deux autres « maçons » de la loge en question ont été placés en garde à vue la semaine dernière.
Une agression en octobre 2019
L’affaire éclate par hasard le 24 juillet dernier devant la résidence de Créteil (Val-de-Marne) où habite Marie-Hélène Dini. Ce matin-là, cette cheffe d’entreprise, à la tête d’une école de formation de coach et d’un syndicat professionnel, est en retard. Ce retard, comme elle l’a confié à Marianne le 19 août dernier va la sauver. « Je suis sortie de chez moi vers 8 h 20, très en retard sur mon horaire habituel. Il y avait dans ma rue une voiture de police avec beaucoup de policiers autour, entre 6 et 8. Ils étaient affairés autour d’une Clio noire dont une portière était ouverte. À l’intérieur de la voiture de police, j’ai aperçu deux hommes. » Encore une Clio noire, se dit-elle. Le 24 octobre 2019, deux inconnus, au même endroit, et encore à bord d’une Clio noire, l’avaient agressée et lui avaient volé son sac et son ordinateur. Ce 24 juillet, Marie-Hélène Dini pense alors que les deux mêmes sont revenus et ont été interpellés. En réalité, c’est un voisin, intrigué par la présence de ces deux individus depuis plusieurs heures dans la Clio, qui a appelé police secours. Personne ne se doute encore de l’affaire qui se trame.
Première surprise des policiers du commissariat de Créteil, les deux individus suspects sont armés. Une arme de poing, balle enclenchée dans le chargeur, est saisie dans la voiture ainsi que des poignards. Et puis en garde à vue, un des deux hommes a une « révélation » surprenante à faire. Lui et son « collègue » seraient en réalité des agents de la DGSE en mission pour le service d’espionnage français. Ils auraient eu pour ordre d’éliminer Marie-Hélène Dini, supposée agent du Mossad, le puissant service secret d’Israël. Le dossier change alors de registre et la brigade criminelle est saisie. Un scénario digne du Bureau des Légendes.
Des « pieds nickelés »
Sauf que les premières vérifications effectuées auprès de la DGSE sont formelles. Si les deux hommes arrêtés dans la voiture à Créteil sont bien des militaires affectés à la base de Cercottes, dans le Loiret, un des trois camps d’entraînement du service action, ils ne font pas partie du service opérationnel, mais sont affectés à de simples missions de surveillance de la base. « En clair, ni l’un ni l’autre ne sont des espions », s’époumone cet été un porte-parole de la DGSE, évoquant des « pieds nickelés ». Aucun des deux n’est formé à des opérations « homos », le terme utilisé dans le jargon de l’espionnage pour désigner les assassinats « d’ennemis de la France » approuvés par le chef de l’État en personne.
Placés en détention, les deux hommes maintiennent leur version malgré le démenti de l’armée. Aujourd’hui, encore, selon nos sources, ils assurent avoir « été manipulés » et avoir pensé qu’ils agissaient en commande de la DGSE. Quoi qu’il en soit, il ne fait aucun doute que leur projet était bien de supprimer la « cible » puisque différents plans ont été envisagés, notamment celui de l’accident de voiture « arrangé ». Une « balise » espion est découverte sous la voiture de Marie-Hélène Dini, permettant de suivre ses déplacements.
Un mystérieux donneur d'ordre
L’enquête ne tarde pas à remonter vers d’autres comparses. Le premier, Yannick P. est un ancien de la DGSI, la direction de la sécurité intérieure, le service secret français en charge du contre-espionnage et de l’antiterrorisme. Ex des renseignements généraux, Yannick P. est à la tête d’une société de sécurité et gravite autour de la DGSE pour des opérations de formation, d’où ses liens avec les deux militaires arrêtés dans la voiture. À son tour, il cite un autre personnage, Sébastien L.
Ce dernier, contrairement aux autres, n’est pas un ancien des services secrets, mais traîne depuis toujours dans l’univers de la sécurité. Un profil de barbouze. Devant les enquêteurs, il admet avoir recruté les deux militaires de Cercottes, évoque un projet d’assassinat mais reste mystérieux sur le commanditaire. Mis en examen et placé en détention, Sébastien L. se refuse à dire qui aurait ordonné l’élimination de Marie-Hélène Dini. Il évoque un donneur d’ordre qui lui aurait « fait peur »… Dans le dossier, il est question « du vieux ». Mais qui se cache derrière ce code ?
Plusieurs "frères" maçons en garde à vue
Les policiers de la brigade criminelle sont dans le brouillard pendant des mois. Pas de flux financier suspect, pas de lien téléphonique. D’évidence, le « vieux » a été prudent et Sébastien L. le couvre. Face aux enquêteurs de la brigade criminelle, les « barbouzes » du dossier sont des durs à cuire qui n’ont pas laissé beaucoup de traces. C’est une femme qui va permettre de relancer l’enquête. Une femme et un téléphone.
Le 21 janvier dernier, la compagne de Sébastien L. est convoquée à la brigade criminelle pour une nouvelle audition. Dans son portable, les policiers sont intrigués par un nom, qu’ils ont déjà vu, celui d‘un ancien commandant de la DGSI, le commandant B. Le fonctionnaire a quitté le service de contre-espionnage voilà une dizaine d’années et un lien apparaît avec Sébastien L. Les enquêteurs décident de foncer. Le 26, le commandant B. est en garde à vue. Ce serait lui le « vieux », du dossier, celui qui ferait le lien entre l’étage des opérationnels et l’étage du commanditaire. Selon nos sources, sa déposition et les vérifications entreprises vont permettre à l’enquête de changer de braquet.
Le commandant B, membre d’une loge maçonnique des Hauts-de-Seine, met les enquêteurs sur la piste de deux autres « frères » maçons, W et P. Ces deux derniers sont placés en garde à vue à leur tour la semaine dernière. Puis un 4e « maçon » de la même loge est mis en cause : J-L A-B, désigné carrément comme le commanditaire de l’assassinat. Fait troublant, plusieurs membres de son entourage ont été la cible ces derniers mois d’évènements suspects: un incendie pour l’un, des pneus de voiture crevés pour l’autre… Mais surtout son profil « colle » puisqu’il est lui aussi, comme la « cible », à la tête d’une école de formation au coaching. D’ailleurs, devant les enquêteurs de la brigade criminelle Marie-Hélène Dini avait cité dès l'été dernier le nom de J-L A-B comme un de ses rivaux professionnels possibles. Placé en garde à vue vendredi, J-L A-B, comme W. et P. devraient être présentés aux juges d’instruction en charge de l‘enquête d’ici ce mardi 2 février.
Un corps "enterré en forêt"
« Je tombe quand même des nues », confie à Marianne ce 1er février Marie-Hélène Dini. « J’avais travaillé avec lui au printemps dernier et nous nous étions accrochés sur des questions de certification mais j’étais à des années-lumière de penser à ces conséquences dramatiques…» Arrivé voilà une dizaine d’années dans l’univers du coaching J-L. A-B. y a la réputation d’être « une grande gueule » ayant « raflé de nombreux marchés » en peu de temps. « Tout le monde se connaît, on ne sait pas trop ce qu’il faisait avant. Mais c’est vrai qu’il avait un comportement professionnel un peu agressif par rapport aux critères de notre secteur. Sans, bien sûr, permettre d’imaginer qu’il puisse planifier une chose pareille », ajoute un collègue de Marie-Hélène Dini.
Selon nos informations, l’enquête pourrait aussi s’étendre à d’autres faits nouveaux. La police est convaincue qu’un des membres de cette équipe de barbouzes aurait dans le passé procédé à une « élimination physique ». Un corps aurait été « enterré en forêt » il y a deux ou trois ans a confié un des membres de l'équipe… Autre conviction des enquêteurs, en octobre 2019, c’est bien un des membres de cette même équipe de barbouzes qui a agressé une première fois Marie-Hélène Dini. C’est dire si ce 24 juillet 2020, la coach l’a échappé belle.
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