Tout d’abord, une clarification. Quand je parle de «Biden», je ne parle pas du champignon – pour reprendre l’expression appropriée de Tom Luongo – qui a été récemment planté à la Maison Blanche, je fais référence au «collectif Biden» que j’ai défini ici. Avec cette mise en garde, voyons maintenant pourquoi la Russie pourrait devoir changer de braquet en 2021.
Tout d’abord, commençons par les fondamentaux.
Les Russes disent souvent que les politiciens américains changent, mais pas les politiques américaines. Il y a beaucoup de vérité en cela, nous l’avons vu très clairement avec Obama et Trump, tous deux ont promis des changements radicaux et tous deux ont pratiquement poursuivi la politique de leurs prédécesseurs, du moins sur le front de la politique étrangère. D’une certaine manière, vous pourriez soutenir que c’est normal et même souhaitable. Un soutien du régime dirait quelque chose du genre : «Eh bien, c’est normal, les priorités de sécurité nationale des États-Unis ne changent pas avec chaque administration, donc tout cela prouve, c’est que peu importe ce qu’un candidat promet pendant sa campagne, une fois au pouvoir il/elle prend conscience des dures réalités de ces mots et agit ensuite comme l’ont fait ses prédécesseurs».
Mais cet argument est cependant profondément vicié, car il ignore complètement la volonté du peuple américain qui, n’oublions pas cela, a voté pour le changement à chaque fois qu’il en a eu l’occasion, que ce soit avec Obama ou avec Trump, et cet argument présuppose que seuls ceux qui «savent» comprennent ce qu’il faut faire. Ce type de «logique» est typique de l’élitisme des classes dirigeantes américaines.
Il ignore également le fait que les présidents américains sont vraiment des marionnettes, des figures de proue, même si pendant leur campagne ils prétendent le contraire. Quant aux élections, tous les quatre ans aux USA, elles ne sont qu’un grand spectacle de lavage de cerveau dont le seul but est de donner au peuple l’illusion du pouvoir. Il pourrait y avoir des élections présidentielles tous les deux ans, voire tous les ans, rien de tout cela ne changerait le fait que les États-Unis sont une dictature ploutocratique avec beaucoup moins de pouvoir populaire que tout autre État de l’Occident collectif.
En fait, l’argument ci-dessus n’est qu’une minuscule feuille de vigne essayant de cacher le fait indéniable que les États-Unis ne sont pas gouvernés par une personne, mais sont gouvernés par une classe, au sens marxiste de ce mot.
Personnellement, j’appelle cette classe dirigeante la «Nomenklatura américaine». Et alors qu’Obama et Trump prétendaient tous deux vouloir un vrai changement, ils ont tous deux perdu cette opportunité – en supposant qu’ils aient jamais voulu de changement, pour commencer, ce dont je doute – lorsqu’ils n’ont pas fait ce que Poutine a fait quand il est arrivé au pouvoir : écraser les oligarques russes en tant que classe, certains ont fui à l’étranger, certains sont morts, certains ont tout perdu et certains ont accepté de respecter les nouvelles règles de Poutine.
Obama, étant un vendeur de voitures insipide et sans colonne vertébrale, n’a probablement même jamais envisagé une action réelle contre la Nomenklatura américaine. Quant à Trump, le narcissique pompeux, il a peut-être songé, même un moment, à montrer «qui était le patron», mais cela n’a duré qu’un mois, jusqu’à ce que la Nomenklatura américaine l’oblige à renvoyer Flynn – après cela, tout est parti en chute libre …
Quoi qu’il en soit, le fait est que nous ne devrions pas nous attendre à d’immenses changements radicaux de la part de n’importe quelle administration. Puisque le meilleur prédicteur du comportement futur est le comportement passé, nous devons supposer que la plupart du temps nous obtiendrons «plus de la même chose, peut-être même en pire». De quoi est-ce que je parle ici ? Voici une liste, partielle, de ces «plus du même» :
- Une nouvelle diabolisation de la Russie, des Russes et de tout ce qui est russe par l’ensemble des médias occidentaux, ce qui est encore moins diversifié et plus uniformément menteur que tout ce que Goebbels ou Souslov auraient pu imaginer ! Vous pouvez considérer cela comme une «russophobie tous azimuts».
- Encore plus de «sanctions» contre tous les intérêts russes (économiques, politiques, etc.) dans le monde. Les États-Unis voient cela comme un pur jeu à somme nulle, toute perte de la Russie, aussi marginale et minable soit-elle, est une victoire de l’Empire anglo-sioniste.
- Un retour aux missiles et aux frappes aériennes de style Obama. Probablement pas sur des cibles russes – oui, Hillary a préconisé cela, mais maintenant ce serait beaucoup plus dangereux qu’il y a cinq ans – mais certainement sur des alliés russes comme la Syrie, et des attaques contre des navires iraniens et vénézuéliens en haute mer.
- Un retour au petit harcèlement mesquin des diplomates et des citoyens russes de l’époque d’Obama. Le but ici n’est pas de réaliser quoi que ce soit de significatif, mais plutôt de montrer que «la Russie est faible et ne peut pas nous empêcher de la traiter comme une puissance de 3ème rang». Les États-Unis ne peuvent rien faire qui nuirait vraiment à la Russie, alors l’oncle Shmuel tournera sa rage contre ces quelques diplomates et même des civils qu’il peut kidnapper, emprisonner, expulser, sanctionner, extorquer, menacer, etc.
- Encore plus de moulinets de sabre tout au long des frontières russes. Je m’attends assurément à ce que les forces américaines soient déployées dans les états baltes de façon permanente – et non par rotation. Les avions de l’USAF et les navires de l’US Navy continueront de harceler les défenses russes sous prétexte de «passage innocent», de «liberté de navigation» etc.
- Étant donné que l’administration de Biden est un «who’s who» d’extrémistes juifs et ukrainiens – quel attelage ! – et que Biden est personnellement impliqué en Ukraine, avec son fils Hunter, dans des affaires de corruption, nous pouvons également nous attendre à une dégradation rapide de la situation politique en Ukraine, et à encore plus de provocations que sous Trump. Comme on dit, ces gens vont «combattre la Russie jusqu’au dernier Ukrainien».
Rien de tout cela n’aura d’impact direct sur la Russie, pour une discussion détaillée, voir ici. Cependant, cela ne veut pas dire que la Russie doit continuer à prétendre que c’est «business as usual» et prendre coup après coup après coup. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons :
- Il y a beaucoup de preuves que le peuple russe en a assez de voir une attitude plutôt faible, voire boiteuse, des responsables russes, en particulier contre le flux constant de mesures de harcèlement mesquines contre les intérêts russes. On ne le dit jamais aux Occidentaux – après tout, informer n’est pas la mission des médias système – mais l’opposition «patriotique» au Kremlin est beaucoup plus dangereuse que celle «libérale» pro-occidentale désespérément discréditée – plus à ce sujet ci-dessous. Les appels à une «réaction» beaucoup plus énergique sont désormais régulièrement entendus, y compris de la part de politiciens plutôt traditionnels.
- Il existe également de nombreuses preuves que le «gang Biden» voudra non seulement reprendre pleinement les politiques de l’ère Obama envers l’Ukraine – déclencher des incidents plus violents et soutenir les nazis ukrainiens, mais que ces politiques seront désormais également étendues à la Biélorussie. Le fait que ces politiques aient peu de chances de réussir ne signifie pas que la meilleure réponse de la Russie à leur égard est de maintenir une position d’attentisme. Il va de soi que toute forme de restriction de la part de la Russie est immédiatement exploitée comme une «faiblesse» par la machine de propagande occidentale. Une telle «retenue» ne fera que rendre les choses plus dangereuses et plus difficiles pour la Russie et Poutine personnellement. En d’autres termes, à ce stade, la «retenue» ne fait qu’inviter à plus d’agressivité.
- En outre, 2021 est une année électorale parlementaire en Russie. Maintenant, indépendamment de tout ce que fait la Russie, aussi transparentes ou infalsifiables que soient les élections russes, l’Occident utilisera cette opportunité pour tenter de provoquer de violentes émeutes dans les rues du pays avant les élections et, après les élections, l’Occident déclarera que les élections russes étaient «antidémocratiques» et continueront de «soutenir les justes aspirations démocratiques du peuple russe» – en particulier les homosexuels russes, bien sûr ! et d’autres.
- Enfin, il est assez clair que le Cabinet Biden rassemble la crème de la crème [en français dans le texte, NdT] des russophobes sionistes de l’État profond
américain. Ces personnes sont caractérisées par les traits suivants et
très dangereux : un amour de soi raciste, narcissique et messianique,
une haine «ordonnée par Dieu» de toute l’humanité, une histoire
personnelle ou familiale de haine envers la Russie, une implication
profonde dans de nombreux projets de corruption ukrainiens, un échec
presque total à comprendre que les conséquences et la nature de la
guerre se combinent avec une croyance illusoire en l’invulnérabilité et
l’impunité, alors que la première est fausse, la seconde a été vraie, du
moins jusqu’à présent, etc. C’est une combinaison très dangereuse, pour
dire le moins !
La vérité est que les pseudo-libéraux sont parmi les créatures les plus dangereuses. Oui, leur «boîte à outils géopolitique» actuelle, les États-Unis et l’Empire anglo-sioniste, est faible, mais cela ne signifie pas que la Russie, ou le reste du monde, peut simplement ignorer ces dangereux psychopathes.
La bonne – voire excellente ! – nouvelle est que Trump a donné à la Russie quatre ans de plus pour se préparer à ce qui va suivre, et que le tandem Russie + Chine est en bien meilleure forme aujourd’hui qu’il ne l’était il y a quatre ans. Par exemple, la situation en matière de sécurité intérieure en Russie est désormais la meilleure de tous les temps, comme en témoigne le fait que la liste fédérale russe « des personnes recherchées » ne comprend pas un seul ressortissant tchétchène ; le soi-disant «dernier émir du Caucase», Aslan Byutukayev, a été tué le 20 janvier, ce qui a permis à Ramzan Kadyrov de déclarer « une victoire totale sur le terrorisme » en Russie. En clair, cela signifie que chaque Tchétchène qui a commis un acte de terrorisme en Russie a été identifié et est maintenant soit mort – la plupart d’entre eux – soit emprisonné – seulement quelques-uns. Malgré ces réalisations, je ne suis pas sûr de la «victoire totale sur le terrorisme» car il existe encore des groupes violents dans plusieurs régions de la Russie. En outre, si les services spéciaux de «l’Axe du Bien», États-Unis / Israël / Arabie saoudite, parfois rejoints par le pays que de nombreux Russes considèrent comme «la Grande-Bretagne chétive» décident de relancer une insurrection en Russie, ils pourraient à minima avoir un certain succès, en particulier initialement. Le FSB / FSO ferait mieux de ne pas baisser la garde, notamment au Daghestan, en Extrême-Orient, en Crimée et dans la région de Moscou !
En termes purement militaires, la Russie est complètement «hors d’atteinte» pour les forces armées des États-Unis, même si l’UE / l’OTAN y sont impliqués. J’ai beaucoup écrit à ce sujet, et je ne répéterai rien de tout cela ici. Il suffit de dire que la Russie a maintenant les meilleures forces armées qu’elle ait eues depuis des décennies, tandis que les États-Unis ont une armée immense, vraiment grotesquement obèse, mais qui ne peut rien faire d’autre que tuer – et, en plus, des civils. Même si nous ne regardons que les forces stratégiques nucléaires de la Russie, elles ont au moins une décennie, sinon plus, d’avance sur l’Occident. C’est la première fois depuis la Seconde Guerre mondiale que la Russie est aussi puissante, et maintenant elle peut récolter les nombreux avantages de sa sécurité militaire.
Tout cela étant dit, j’ai personnellement toujours défendu ce que j’ai appelé la «retenue» du Kremlin pour la simple raison que quand je regarde la puissance globale, et pas seulement militaire, de la Russie et de l’Empire anglo-sioniste, je vois toujours ce dernier comme beaucoup plus fort. Cependant, je dois admettre que la tendance de cette comparaison est positive, c’est-à-dire qu’au cours de la dernière décennie, la Russie est devenue beaucoup, beaucoup, plus forte tandis que les États-Unis et l’Empire sont devenus beaucoup, beaucoup, plus faibles. Sous Biden, cette tendance ne fera que s’accélérer.
Le moment est venu pour la Russie d’adapter sa politique à cette nouvelle réalité.
Et la toute première chose que le Kremlin devrait changer est son langage, sa rhétorique. Oui, la «retenue» est une bonne chose, surtout lorsque l’escalade vers une guerre à grande échelle fait partie des résultats possibles de toute crise, mais la «retenue» ne peut pas être un objectif en soi. Par exemple, alors que les USA + l’OTAN représentent objectivement une menace anti-russe majeure, ne serait-ce que parce que ceux-là sont faibles et ne peuvent compter que sur leurs armes nucléaires pour se protéger ! De même, la bonne vieille Ukraine, que les Ukronazis ont transformé en vilain «Banderastan» ne constitue en rien une menace pour la Russie. Alors pourquoi ne pas sérieusement refuser de serrer quelques boulons économiques pour faire sentir aux Ukronazis que leur flot incessant d’insultes et de menaces vides peut avoir des conséquences ?
Ensuite, le Kremlin doit associer des mots forts avec des actions fortes !
Juste ce dimanche 24 janvier, l’ambassade américaine à Moscou a été impliquée ouvertement dans la coordination d’émeutes – petites, mais violentes et illégales ! à Moscou, tout comme la chaîne NEXTA Telegram l’avait fait en Biélorussie. Alors, qu’a fait le Kremlin en réponse ? Le ministère russe des Affaires étrangères a ordonné aux diplomates américains de se rendre dans le complexe résidentiel MID et … leur a donné une note de protestation ferme.
Et c’est tout ?!
Je ne pense pas que quiconque à l’ambassade des États-Unis à Moscou porte un intérêt aux manifestations russes dans la rue. S’il y a quoi que se soit, c’est une bonne rigolade des «diplomates» américains chaque fois qu’ils reçoivent de telles protestations. Et tout le monde le sait, y compris les diplomates russes. Alors pourquoi s’en tiennent-ils à une telle «ligne de communication» boiteuse ?
La marine russe a récemment donné un très bon exemple de la façon dont un mot bien placé peut avoir beaucoup plus d’effet lorsqu’il est soutenu par une bonne action : vous vous souvenez quand l’USS John McCain – quel nom ! – a récemment franchi la frontière maritime russe ? La marine russe a dit au McCain de se retirer, mais elle a ajouté que le grand navire russe anti-sous-marin, un «destroyer» dans la terminologie occidentale, l’amiral Vinogradov «éperonnerait» le McCain si ses avertissements n’étaient pas entendus. Inutile de dire que le McCain s’est très vite carapaté. L’US Navy a déjà connu ce genre de situation dans le passé, voir ici. Le problème avec l’éperonnage, du moins pour l’US Navy, est que vous pouvez difficilement répondre en ouvrant le feu, ce qui serait vraiment suicidaire dans les eaux russes et près du littoral russe très fortifié. Quant aux Russes, ils sont assez «fous» pour faire ça, même quand leur navire est plus petit, demandez à n’importe quel marin américain ayant servi dans la force sous-marine, ils le savent ! La simple vérité est que les marins russes «parlent vraiment business», celui de défendre leur patrie, alors que les marins américains, eh bien, comment dire ? Ils veulent vraiment «montrer le drapeau» et «défendre les principes», mais pas s’ils risquent d’être gravement blessés. C’est juste un fait. Du point de vue russe, rejoindre l’armée signifie accepter que la douleur et la mort viennent avec la défense du territoire. Mille ans de guerre ont vraiment imprimé cela dans la psyché collective russe.
Aparté
Au fait, beaucoup d'Américains aiment répéter ces fameuses paroles du général Patton : «Aucun bâtard n'a jamais gagné une guerre en mourant pour son pays. Il l'a gagné en faisant mourir l'autre pauvre salaud idiot qui se bat pour son pays». C'est un aphorisme net, et il répond parfaitement à une vision typiquement américaine de la guerre. C'est aussi presque totalement faux, comme tout combattant russe, iranien ou du Hezbollah pourrait vous le dire - ce n'est pas ainsi que vous gagnez des guerres. En fait, c'est ainsi que vous les perdez. Et c'est pourquoi des soi-disant «bâtards stupides» ont rossé les forces américaines encore et encore…
À tout le moins, il est grand temps de réduire le nombre de fonctionnaires américains en Russie : je parle des diplomates, bien sûr, mais aussi de toute la ménagerie des «volontaires», des «ONG» et, très certainement, de «journalistes» américains accrédité en Russie. Réduire leur nombre permettra également au FSB / OFS de garder un œil sur les autres.
Ensuite, je montrerais également la porte un grand nombre d ‘«invités» de l’UE : après tout, pourquoi les garder avec ce Mordor cauchemardesque de Poutine ? Renvoyons-les à la «liberté» dont ils se soucient apparemment bien en Russie qu’à Paris, Berlin ou Rotterdam.
Aparté
Franchement, les dirigeants de l'UE sont devenus complètement fous. Maintenant, l'UE envisage sérieusement d'annuler le North Stream 2 presque terminé au prétexte de l'absurdité Navalnyi ! Sacrifier un projet de plusieurs milliards de dollars crucial pour l'économie de l'UE sur la base du sort d'un pseudo-dissident particulièrement sans intérêt et faux dont le soutien en Russie est inférieur à un pour cent - comme le montrent les foules minuscules qui se sont violemment insurgés en son nom. Ce que les dirigeants de l’UE n’apprécient pas, c’est que la Russie a beaucoup moins besoin du pipeline que l’UE, car les principaux plans gaziers de la Russie sont entièrement axés sur la Chine. Il y a une bonne expression russe sur le genre de menaces que fait l'UE: «Essayez de faire peur à un hérisson avec un cul nu !». L'UE doit vraiment être placée sous surveillance du suicide, à mon humble avis.
Franchement, toute cette «faune» occidentale s’est habituée à vivre en Russie tout en vivant sa haine contre elle. Ils s’en sont dans l’ensemble bien tirés dans les années 80, ils s’en sont aussi totalement sortis dans les années 90, et au cours des vingt dernières années, le Kremlin a fait très peu pour changer cela. Je pense que le «message» – les Occidentaux aiment les «messages» – du Kremlin doit être simple : vivre et travailler en Russie n’est pas un droit, c’est un privilège. Si vous ne pouvez pas vous comporter civilement, c’est que vous avez dépassé la durée de votre accueil. Dans le contexte actuel, l’Occident a beaucoup plus à perdre de ce type de politique que la Russie, d’autant plus que les diplomates russes ont déjà été expulsés et que les bâtiments consulaires russes ont été illégalement fermés aux États-Unis.
Ensuite, la Russie doit répondre au jeu à somme nulle des États-Unis, mais pas en acceptant une telle logique pour elle-même. Le principal problème avec l’état d’esprit du jeu à somme nulle est qu’il est extrêmement gaspilleur : l’équipe qui s’y engage doit consacrer beaucoup de temps et d’efforts à essayer de refuser toute victoire, ou même un développement légèrement positif, à l’autre camp. Ce que la Russie devrait faire à la place, c’est définir une liste d’objectifs vulnérables et importants de l’Empire, puis concentrer ses ressources et son énergie à les refuser aux États-Unis. Un tel effort pleinement ciblé est beaucoup plus efficace que le genre de «harcèlement tous azimuts» auquel les États-Unis s’engagent généralement. La bonne nouvelle, du moins pour la Russie, est que les États-Unis sont à la fois vulnérables et faibles, économiquement, militairement, culturellement et socialement – à vous d’allonger la liste. Quant à l’Empire, il est mort depuis un certain temps déjà : il a tout simplement cessé de fonctionner comme un empire il y a quelque temps déjà. Encore une fois, cette réalité est soigneusement cachée dans ce que j’appelle la «zone A», mais dans la zone B tout le monde la sait, même s’ils prétendent le contraire.
Aparté
L'endroit idéal pour que la Russie fasse vraiment une différence serait l'Iran. Bien que les Iraniens soient des joueurs extrêmement sophistiqués, tant leurs diplomates que leurs militaires, ils ont cruellement besoin de l'aide de la Russie, en particulier dans des domaines tels que les systèmes d'alerte précoce, le ciblage, les radars au delà de l'horizon, les défenses aériennes (terrestres et aériennes), la guerre anti-sous-marine, les défenses côtières, etc. L'Iran est, de loin, le pays le plus important du Moyen-Orient, il est donc constamment menacé par «l'Axe du Bien». La Russie n'a pas, jusqu'à présent, pris la décision stratégique de donner à l'Iran les moyens de sa sécurité, du moins pas totalement, pour pouvoir faire pression sur Téhéran en cas de besoin - les objectifs de la Russie et de l'Iran en Syrie sont similaires à certains égards, mais aussi distincts ailleurs.
Enfin, le Kremlin doit devenir beaucoup plus sensible aux arguments de «l’opposition patriotique». D’une part, de nombreux arguments de cette opposition patriotique sont corrects, donc les écouter relève simplement du bon sens. Deuxièmement, certains de ces arguments sont erronés, mais ils ne peuvent être ignorés : ces arguments ont besoin d’être contrés. Supposer simplement que le peuple russe soutiendra toujours le Kremlin quoi qu’il arrive est délirant et dangereux. Enfin, certains de ces arguments reposent sur des erreurs et ne servent que les intérêts du bloc USA / UE / OTAN. Le fait que certains Russes les répètent sincèrement est un signe dangereux de la sensibilité de certains segments de la société russe aux opérations psychologiques américaines. Pour toutes ces raisons, le Kremlin doit changer sa politique de relations publiques qui, franchement, devient obsolète et parfois même toxique.
Aparté
Actuellement, il y a trois types d'opposition de base en Russie : la fausse opposition à la Douma, le parlement, qui parle beaucoup, mais soutient fondamentalement le Kremlin, l'opposition non systémique pro-US / UE qui parle probablement à un pour cent du peuple russe, et l'opposition «patriotique» non systémique, qui est également assez petite, mais qui a vraiment besoin d'être représentée à la Douma et de devenir «une partie du système des institutions» - par opposition à l'actuel "one man show" - en Russie.
Je ne suggère nullement que la Russie devienne conflictuelle ou provocatrice. Il suffit que la Russie soit moins «diplomate» et beaucoup plus énergique dans la défense de ses intérêts. Cela signifie à son tour deux choses : les responsables russes doivent changer leur ton plutôt modeste lorsqu’ils traitent avec les impérialistes occidentaux et, deuxièmement, les responsables russes doivent étayer leurs propos par des actions réelles et mesurables.
Conclusion : apprenez de vos erreurs
L’histoire russe est remplie de cas où les diplomates ont tout simplement gaspillé les efforts et les succès obtenus par l’armée russe. C’est pourquoi l’armée russe a un dicton «le sang des uns est versé à cause de l’incompétence des autres» – ou une autre version : «certains ont dû devenir des héros pour défaire ce que les lâches ont fait». Enfin, s’il y a une chose que l’histoire russe a montrée sans aucun doute, c’est que l’ennemi intérieur est beaucoup, beaucoup plus dangereux que l’ennemi extérieur.
J’ai toujours soutenu que l’Empire occidental et la Russie sont en guerre depuis au moins 2014. Il ne s’agit pas de la troisième guerre mondiale purement militaire, bien sûr, mais d’une guerre à 80% économique, 15% de communication et seulement 5% cinétique. Il s’agit néanmoins d’une guerre totale / existentielle qui se terminera avec un seul camp debout, l’autre disparaîtra. Pour la Russie, c’est une guerre pour la survie de la civilisation russe, ce n’est pas une question mineure. De plus, cette guerre à 80/15/5% pourrait rapidement se transformer en une guerre réelle à 100%. La Russie devrait donc être très prudente. Maintenant, environ sept ou huit ans plus tard, nous pouvons voir que la Russie a gagné, ce qui est très bien. Mais cette guerre est loin d’être terminée, de tels processus sont très lents, et la Russie ne peut tout simplement pas supposer que «plus de la même chose» de sa part suffira pour être victorieuse. Dans l’ensemble, la politique russe envers l’Occident collectif a été à la fois saine et très efficace, mais le moment est venu pour un changement significatif. Si le Kremlin ignore ces changements, la Russie pourrait, une fois de plus, être forcée de défendre, avec ses militaires, ce que les diplomates n’ont pas réussi à protéger et à préserver. Si Dieu le veut, Poutine tiendra compte des leçons de l’histoire de la Russie.
The Saker
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