11 mai 2018

Les gnostiques sur les archontes et l’emprisonnement de l’âme


Des extraits remarquables de la Bibliothèque de Nag Hammadi : sur la création de l’homme de chair par les archontes, sur leur culte antique et sur l’esclavage de l’âme au profit de ces puissances ténébreuses.

Alors l’Homme devint visible à cause de l’ombre de la lumière qui est en lui. Et sa pensée fut supérieure à (celle de) tous ses créateurs. Lorsqu’ils regardèrent, ils virent que sa pensée était supérieure.
Et ils tinrent conseil avec toute l’armée archontique et angélique. Ils prirent du feu, de la terre et de l’eau, les mélangèrent ensemble avec les quatre vents de feu, les associèrent ensemble et provoquèrent une grande confusion. Et ils entraînèrent Adam à l’ombre de la mort afin de remodeler à partir de la terre, de l’eau, du feu et du souffle, celui qui provient de la la matière, c’est-à-dire de l’ignorance ténébreuse, du désir et de leur esprit contrefait.
« Voilà ce qu’est le tombeau du remodelage du corps ! Ce que les voleurs ont imposé à l’homme, c’est le lien de l’oubli; et celui-ci est devenu un homme mortel. Telle est la descente primordiale et la séparation primordiale ! Mais Epinoia de la lumière qui est en lui, c’est elle qui éveillera sa pensée !

[Livre des secrets de Jean]

Ils avaient pris beaucoup de peine à façonner le corps de cette âme, voulant y faire déchoir l’âme invisible. Or, ils ont retiré honte à présent de leur ouvrage. Ils ont subi la perte de ce pour quoi ils avaient peiné. Ils ne se sont pas avisés qu’elle a un corps spirituel invisible; ils pensaient « Nous sommes le pasteur qui la paît ». Mais ils ne se sont pas avisés qu’elle connaît un autre chemin qui leur est caché, celui que son pasteur véritable lui a enseigné par la connaissance.

[Enseignement d’autorité]

Revenons aux archontes dont nous avons parlé afin d’en fournir la démonstration : c’est qu’ayant été expulsés hors de leurs cieux en bas sur la terre, les sept archontes se créèrent des anges, nombreux démons, pour qu’ils les assistent. Et ceux-ci apprirent aux hommes force erreurs, magies et sortilèges, cultes d’idoles et effusions de sang, autels et temples, sacrifices et libations pour tous les démons de la terre, ayant comme collaboratrice la Fatalité, qui advint conformément à l’accord intervenu entre les dieux de l’Injustice et de la Justice. Et dès lors que le monde fut ainsi distrait, il erra pendant toute la durée du temps. Tous les hommes de la terre, en effet, ont servi les démons depuis le commencement jusqu’à la fin, les anges, la Justice, et les hommes, l’Injustice. Ainsi le monde fut dans la distraction, dans l’ignorance et l’oubli, et tous ont erré jusqu’à l’avènement de l’Homme véritable. […]

[« l’Écrit sans titre » (NH II, 5)]

Vous n’êtes pas venus pour souffrir, au contraire, vous êtes venus vous défaire de votre lien. Déliez-vous ! Et ce qui vous a lié vous déliera. Sauvez-vous pour que l’âme soit sauvée ! (…) Ne vous laissez pas réduire en esclavage ! Grand est l’éon de l’éon des vivants, de même que le châtiment des infidèles ! De nombreux liens et des bourreaux vous entourent; fuyez rapidement, avant que la mort ne vous gagne ! Regardez la lumière ! Fuyez la ténèbre ! Nous vous laissez pas réduire en esclavage au profit de la mort !

[Zostrien]

Or voici la vie parfaite : que l’homme se reconnaisse lui-même grâce au Tout.

[Témoignage véritable]

Et ces commentaires p.944 (édition de la Pléiade) :

Sur le contenu vécu d’une telle expérience, le Discours sur la régénération est plus explicite que l’Ogdoade et l’Ennéade. On ne se voit pas soi-même dans l’Intellect comme on s’aperçoit dans un miroir : la vision intellectuelle de soi qui provoque la régénération consiste « à ne plus former ses représentations sous la figure du corps à trois dimensions » (CH, XIII, 13). Cela implique une mutation de la conscience. Il faut s’abstraire de l’environnement des objets visibles, afin de « se rendre étranger au monde » (CH XIII, 1) Il faut aussi rejeter l’évidence illusoire que le moi des autres est contenu dans leur corps : « tu me vois, mon enfant, avec les yeux, mais ce que je suis, tu ne peux pas le comprendre en me regardant avec les yeux du corps et par la vue sensible » (CH XIII, 3). Aussi bien on ne se voit plus soi-même dans son corps, on n’est plus un corps pour soi, c’est comme si l’on était « sorti de soi-même » (CH XIII, 3, 4), non point comme en rêve, mais tout éveillé. Pour cela, il faut « arrêter l’activité des sens corporels » (CH, XIII, 7), attirer ou aspirer vers son moi le plus intime toute l’âme et la conscience dispersée à travers la chair, comme dans la Clef (CH X, 6), où « l’âme étant attirée à travers le corps, l’homme est tout entier transformé dans l’Essence ». On abolit ainsi la différence entre « l’homme matériel », composé des quatre éléments, et « l’homme essentiel » (CH, I, 15), à l’image du Dieu Intellect; on revient au moment où l’homme n’était pas encore incarné ni affecté par les sensations ou par les passions des sept planètes mais demeurait encore dans l’Ogdoade. A ce moment-là, on se sent une faculté euphorique d’ubiquité, on s’élève au-dessus du temps, on devient Eon comme Dieu. La vision de soi-même se change ainsi en vision du Tout. »

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