Vomir est un acte essentiel, qui prélude à toute quête. Heureux celui qui a tout vomi, ajouterais-je aux Béatitudes, car il aura de la place en lui pour accueillir l’Esprit Saint.
Vomir est le début de la vertu. Celui qui n’a jamais rejeté la masse des breuvages alcoolisés d'abord, puis les racines amères accrochées en nous, n’est jamais allé au fond des choses.
Le vrai fond de nous, c’est le paysage qui apparaît lors de la régurgitation extrême de ces poisons, quand le corps se révulse entièrement, que tous les muscles se crispent dans ce qui ressemble à une agonie, quand les larmes jaillissent des yeux, la morve coule du nez, et quand on va chercher dans un ultime spasme le dernier atome étranger qui obstrue le passage qui nous sépare de la pureté.
Le corps veut renaître, retourner à cette lumière originelle dont il se souvient, dont toutes ses cellules ont gardé la mémoire.
Ce qui est vrai pour l’alcool et les nourritures épaisses, l’est également du monde et des humains qui le peuplent. Comment ne pas avoir besoin de rendre les visions quotidiennes que nous infligent nos congénères, dans l’exercice de la plus grande bassesse qui soit : le maintien du statu quo sur son horrible petit bonhomme de chemin?
Vomir le monde, c’est aussi se vomir soi-même, expulser tout geste qui a pour but la conservation de l’image de soi, la préservation de cette misérable statue qui a pour nom : moi, moi, moi, et qui n’a rien de commun avec ce que nous sommes.
Vomir, c’est ne plus pouvoir réparer l’échafaudage constamment bricolé qui perpétue le lien entre passé et avenir, accepter de le foutre à terre. C’est refuser de mentir.
Parvenu au point où il ne peut plus endurer une seule seconde supplémentaire les données trompeuses et truquées du paraître, la fausse donne de la réalité immédiate : moi et le monde, l’homme naît à la réalité profonde.
Il est intéressant d’évoquer brièvement ici l’ayahuasca, dont je n’ai qu’une connaissance livresque, et dont l’action première consiste à vider tripes et boyaux. Certes, comment verser du vin nouveau dans de vieilles outres, si celles-là n’ont pas été vidées, nettoyées, purifiées ?
Les curanderos mazatèques, comme tous les spécialistes traditionnels des plantes magiques, jeûnent et s’abstiennent de relations sexuelles avant toute prise des pequeños santos. Les indiens de tous peuples ont coutume de fréquenter la hutte de sudation avant d’avaler l’amer peyotl ou autre ololiuqui.
Les frenchies bouffeurs de grenouilles font dégorger longuement leurs escargots avant de les préparer, pour les débarrasser de leurs poisons, de la cigüe dont ils sont friands.
Vomir, suer, dégorger, actes essentiels. Actes purificatoires, exorcismes, ablutions préalables à la rencontre du sacré.
Du monde sacré où Ça crée.
Vieux Jade
Vomir est le début de la vertu. Celui qui n’a jamais rejeté la masse des breuvages alcoolisés d'abord, puis les racines amères accrochées en nous, n’est jamais allé au fond des choses.
Le vrai fond de nous, c’est le paysage qui apparaît lors de la régurgitation extrême de ces poisons, quand le corps se révulse entièrement, que tous les muscles se crispent dans ce qui ressemble à une agonie, quand les larmes jaillissent des yeux, la morve coule du nez, et quand on va chercher dans un ultime spasme le dernier atome étranger qui obstrue le passage qui nous sépare de la pureté.
Le corps veut renaître, retourner à cette lumière originelle dont il se souvient, dont toutes ses cellules ont gardé la mémoire.
Ce qui est vrai pour l’alcool et les nourritures épaisses, l’est également du monde et des humains qui le peuplent. Comment ne pas avoir besoin de rendre les visions quotidiennes que nous infligent nos congénères, dans l’exercice de la plus grande bassesse qui soit : le maintien du statu quo sur son horrible petit bonhomme de chemin?
Vomir le monde, c’est aussi se vomir soi-même, expulser tout geste qui a pour but la conservation de l’image de soi, la préservation de cette misérable statue qui a pour nom : moi, moi, moi, et qui n’a rien de commun avec ce que nous sommes.
Vomir, c’est ne plus pouvoir réparer l’échafaudage constamment bricolé qui perpétue le lien entre passé et avenir, accepter de le foutre à terre. C’est refuser de mentir.
Parvenu au point où il ne peut plus endurer une seule seconde supplémentaire les données trompeuses et truquées du paraître, la fausse donne de la réalité immédiate : moi et le monde, l’homme naît à la réalité profonde.
Il est intéressant d’évoquer brièvement ici l’ayahuasca, dont je n’ai qu’une connaissance livresque, et dont l’action première consiste à vider tripes et boyaux. Certes, comment verser du vin nouveau dans de vieilles outres, si celles-là n’ont pas été vidées, nettoyées, purifiées ?
Les curanderos mazatèques, comme tous les spécialistes traditionnels des plantes magiques, jeûnent et s’abstiennent de relations sexuelles avant toute prise des pequeños santos. Les indiens de tous peuples ont coutume de fréquenter la hutte de sudation avant d’avaler l’amer peyotl ou autre ololiuqui.
Les frenchies bouffeurs de grenouilles font dégorger longuement leurs escargots avant de les préparer, pour les débarrasser de leurs poisons, de la cigüe dont ils sont friands.
Vomir, suer, dégorger, actes essentiels. Actes purificatoires, exorcismes, ablutions préalables à la rencontre du sacré.
Du monde sacré où Ça crée.
Vieux Jade
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