L’intelligence artificielle progresse fortement et chaque semaine apporte son lot de nouvelles surprises et de nouveaux défis relevés par les principaux développeurs. ChatGPT vient par exemple de gagner de nouvelles fonctionnalités lui permettant de “voir” (c’est-à-dire d’analyser des images) et de “parler” (produire ses réponses avec une voix synthétique).
Les premiers utilisateurs (privilégiés) qui ont testés ces nouvelles possibilités n’ont pas été déçus : programmation de tableaux de bord ou description de processus techniques à partir d’un simple exemple graphique, explication d’historiettes ou synthèse rapide d’organigrammes complexes, production de programmes à partir de descriptions imagées sommaires, les prouesses sont impressionnantes. Et on ne pourra s’empêcher de noter la pertinence de l’automate à décrypter les illisibles panneaux de régulation de parking…
Si l’on ajoute la possibilité, disponible depuis une paire de semaines, de traduire de sa langue vers une autre des vidéos à la volée tout en conservant le timbre de l’auteur – comme le propose par exemple HeyGen– on commence à entrevoir l’impact puissant que ces technologies vont avoir sur notre vie quotidienne, sans même parler de ces professions qui vont subitement devenir inutiles.
Bref, comme ces colonnes le mentionnaient déjà il y a quelques mois, tout indique que l’apparition, le développement et la croissance des outils d’intelligence artificielle vont largement contribuer à mettre en place des solutions remplaçant purement et simplement des pans entiers de l’économie en y diminuant le coût de l’intervention humaine.
En clair, il est évident que cette technologie constitue une incitation impérieuse en faveur des généralistes, les professions intellectuelles spécialisées étant les plus à risque de trouver une application pratique et bien meilleur marché en intelligence artificielle. L’ajustement de ces professions puis, progressivement, de toute l’humanité à cette nouvelle donne promet d’être complexe et ce d’autant que l’intelligence artificielle s’encombre peu de la relative lenteur d’adaptation des individus.
On comprend déjà qu’il ne sera pas facile de former les générations actuelles et futures tant l’avancée technologique est puissante et surtout rapide, et dans ce contexte, on peut raisonnablement s’inquiéter du sort de la France tant son enseignement semble actuellement lacunaire, mal positionné et surtout aux performances de plus en plus basses comme en atteste une note récente du conseil scientifique de l’Education nationale qui constate une “inquiétante mécompréhension des nombres et surtout des fractions à l’entrée en sixième”.
En somme, la situation, déjà passablement complexe même pour les pays en pleine croissance ou disposant d’un niveau éducatif solide, s’avère franchement tendue pour les autres, notamment en Europe et particulièrement en France.
Heureusement, l’Union européenne avait décidé d’agir dans le domaine, en mai dernier, en choisissant de le réguler à coup de centaines de petites lois, obligations et contraintes. Si vous sentez une odeur persistante de brûlé, ne vous inquiétez pas, c’est le succès prévisible de ce genre de régulations.
Bien entendu, la France n’est pas en reste, surtout lorsqu’il s’agit de mettre des bâtons dans des roues. Et pour cette fois-ci, comme cela concerne l’intelligence artificielle, ce sera donc les roues de Nvidia.
Corporation américaine de conception de puces et de cartes graphiques puis, plus récemment, de cartes électroniques spécialisées pour l’intelligence artificielle, Nvidia vient de faire les frais de l’attention du gendarme français de la concurrence qui a décidé de faire une perquisition dans les locaux de la société à Courbevoie et à Sophia-Antipolis.
Trop efficace et bien trop en avance sur les sociétés européennes et française, la société serait soupçonnée de pratiques anticoncurrentielles même si les perquisitions “ne présupposent pas l’existence d’une infraction à la loi” selon l’Autorité de la concurrence. Autrement dit, cette dernière va à la pêche et entend bien trouver quelque chose pour calmer les ardeurs de la firme en matière de développement et d’intelligence artificielle sur le sol français, non mais.
Que voilà une excellente initiative : toute entreprise qui se développe de façon soutenue, dans un domaine où les entreprises françaises sont sinon absentes mais tout du moins particulièrement discrètes, peut donc se retrouver passablement prise à partie par les administrations du cru. La prochaine étape sera probablement l’un ou l’autre contrôle fiscal bien serré, pour faire bonne mesure. Du point de vue extérieur, tout ceci ne peut qu’inciter les entreprises en plein essor et notamment les technologiques dans le domaine de l’intelligence artificielle à réfléchir à deux fois avant de s’implanter en France.
Repousser hors du territoire les firmes innovantes, harasser celles qui sont déjà là et, plus généralement, martyriser les entrepreneurs et ceux qui auront le mauvais goût de s’enrichir en créant de la valeur sur le territoire français, voilà assurément une méthode efficace pour créer de l’emploi et garantir de la création de richesse dans l’Hexagone.
Au passage, on ne pourra s’empêcher de noter que l’article initial qui rapporte les perquisition provient du Wall Street Journal. C’est pratique : voilà qui donnera à cette information un retentissement international et ne risque pas de faire passer le pays comme un havre de paix propice à l’innovation et à l’investissement.
En ces temps économiques incertains, c’est exactement ce dont on avait besoin.
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