09 avril 2012

Deuxième révolution hongroise... Silence des médias

Bousculés par l'histoire, ils exaltent à l'extrême le sentiment patriotique, pour retrouver une unité.
La «Révolution nationale» de Viktor Orban frappe jusque sur la place du Parlement. La statue du comte Mihaly Karolyi, premier ministre puis président en 1918-1919, vient d'être déboulonnée. Pendant ce temps, au château de Budapest se poursuit la grandiose exposition sur les «Héros» de la Hongrie, où figure - discrètement - le premier ministre. Volonté de réécrire l'histoire, comme le clame l'opposition, et de s'inscrire lui-même dans une longue tradition de héros nationaux?
Conseiller de Viktor Orban, l'historien György Granasztoi balaie l'idée d'un revers de main. «Karolyi est considéré comme un précurseur de la dictature communiste, explique-t-il. Devant le Parlement, qui doit représenter l'unité nationale, c'est perturbant.» Pour les conservateurs, la victoire écrasante (plus de 53 % des voix), en 2010, de Viktor Orban, traduit la volonté de la population de se débarrasser de «ces anciens communistes, qui, sous un autre nom, continuaient à dominer la société». Après des années de «djihad» entre les socialistes et les conservateurs, poursuit l'historien, «nous prônons l'apaisement, et une reconstruction civique autour des valeurs de la nation».
En 1990, «l'implosion du système communiste a créé un grand vide dans la société, rappelle György Granasztoi. Nous avions un problème d'identité. Il nous fallait des repères, des modèles». Ces repères, les Hongrois les trouvent dans les démocraties occidentales, dans l'Union européenne, à laquelle ils adhèrent avec enthousiasme en 2004. «Viktor Orban a dépensé une énergie phénoménale pour que la droite hongroise soit européenne. Ce n'était pas évident, regardez la droite polonaise…, suggère Zoltan Balog, ministre délégué chargé de l'Inclusion sociale et très proche ami d'Orban. Et voilà que tous ces investissements s'écroulent! Aujourd'hui, l'image de l'UE s'est dégradée dans la population. Et les critiques incessantes de Bruxelles ne font que radicaliser le patriotisme hongrois.»

«Nous ne serons pas une colonie!»

Le quotidien conservateur Magyar Nemzet écrivait ainsi récemment que les «bureaucrates sans âme de Bruxelles», qui menacent désormais le pays de sanctions, voulaient non seulement «mettre le gouvernement Orban à genoux», mais aussi «tous les Hongrois à la torture». Pas étonnant, dès lors, que le premier ministre retrouve des accents très nationalistes pour clamer, comme il l'a fait le 15 mars dernier, lors de la fête nationale: «Nous ne serons pas une colonie!»«Nous n'avons pas accepté le diktat de Vienne de 1848, puis nous nous sommes opposés à Moscou en 1956 et en 1990, a-t-il lancé devant une foule très remontée. Aujourd'hui, nous ne permettrons à personne de nous dicter notre conduite.»
Un membre du gouvernement l'admet: «Utiliser notre sentiment patriotique contre Bruxelles, ce n'est pas bien.»Mais «comment expliquer cela aux Français, dont le pays est souverain depuis toujours? se demande György Granasztoi. Il faut comprendre ce discours avec nos références historiques totalement différentes. C'est un jeu très subtil d'Orban pour réconforter les Hongrois, flatter leur patriotisme, tout en canalisant leurs sentiments antieuropéens.»
Car les critiques de Bruxelles, couplées à la crise économique, ont fait au moins un vainqueur en Hongrie: l'extrême droite. Le Jobbik, un parti antisémite et antiroms, prône carrément la sortie de l'UE! Après l'entrée fracassante du Jobbik au Parlement de Budapest en 2010, avec près de 17 % des voix, Viktor Orban avait promis de s'en débarrasser avec «deux claques». Mais aujourd'hui, son parti Fidesz est en baisse, tandis que certains sondages accordent plus de 22 % à l'extrême droite, ce qui en ferait la deuxième formation du Parlement, devant les socialistes…
En attendant, Gabor Vona, le jeune chef du Jobbik, ne semble pas prêt à se taire. «Nous ne sommes pas des démocrates! a-t-il lancé, sans complexe, dans un récent discours. Contrairement à ces froussards, qui dansent au son de la flûte de l'UE

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