Beaucoup de monde, en Russie et chez les divers pro-russes attendaient le pire de la “conférence de la paix” en Ukraine tenue en Suisse, près de la ravissante ville de Lucerne. D’un certain point de vue, ils n’ont pas été déçus, surtout si l’on se tourne vers les plus importants d’entre eux, vers les puissances dont on est accoutumés à attendre des politiques spécifiques, originales, etc. Le “etc.” a bien fait rire Mercouris qui, dans un de ses programmes, nota à propos des interventions de la France, du Royaume-Uni et des USA, – ceci qui réjouira les nostalgiques de Richelieu, de Vergennes, de Talleyrand, de Tocqueville, etc. :
« C’est assez peu ordinaire, mais lorsqu’on lit ces trois positions officielles exprimés sur les textes lus durant la conférence et rendus publics, on a vraiment l’impression de lire le même texte, avec les mêmes expressions redondantes, comme s’il s’agissait d’une feuille de route commune, comme si ces trois pays avaient confié le travail à un speechwriter commun... »
Comme on le voit et le comprend, les partisans des thèses russes n’avaient pas trop de soucis à se faire ; ce pourquoi, sans doute, un Korybko qui est un homme de nuances, juge assez sévèrement les réactions les plus radicales qui avaient précédé la conférence. Mais ici, il va beaucoup plus loin et juge qu’au contraire, cette conférence, effectivement un échec pour les ennemis de la Russie, a permis à certains de ses amis, et particulièrement à l’Inde, de faire avancer une idée très intéressante, – qu’on retrouvera sans doute, lors de l’autre conférence, la bonne, qui est préparée en marge du G20 au Brésil, selon une initiative commune entre le Brésil et la Chine.
Finalement, cette réunion dans la paisible Confédération Helvétique, aura permis aux adversaires de cette réunion de s’exprimer et de dire qu’ils sont venus pour observer qu’il leur fallait dire qu’il était inutile de venir ; et, de manière plus constructive, à certains de proposer que des pays à la position plus appropriée pour cette initiative prennent sur eux de proposer un nouveau cycle de conférences qu’ils conduiraient. C’est alors que Korybko cite l’Inde au vu de ses interventions, de son refus de signer le communiqué (un des 12 pays ayant pris cette position), de sa position générale, etc., – et alors cette conférence suisse pourrait avoir servi de rampe de lancement pour un programme tout à fait différent qui ne sera pas vraiment du goût de l’Occident-répulsif.
« Un autre élément intéressant ressortant du sommet est que le commissaire ukrainien aux droits de l’homme a révélé plus tard que certains des participants qui “entretiennent traditionnellement de bonnes relations avec la Russie” ont proposé de servir de médiateur entre les deux parties belligérantes. Dans la mesure où les relations de l’Inde avec la Russie sont officiellement considérées par les deux parties comme un partenariat stratégique spécial et privilégié, il serait tout à fait logique que le chef de sa délégation soit l’un de ceux qui ont offert les services diplomatiques de leur pays. »
..... Si c’est le cas, la démarche ne sera pas très bien vue à Washington (non plus que l’initiative Brésil-Chine au G20) et contribuera à améliorer la dégradation de l’offensive de récupération dans son orbite de l’Inde par les USA. Dans ce cas, on mesure les effets à terme de cette très-étrange conférence ; et l’on n’est en rien surpris de l’embrouillement des conséquences et des enchaînements, correspondant parfaitement à l’imprévisibilité vertueusement diabolique, –ou diaboliquement vertueuse, – de cette GrandeCrise.
dde.org
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Pas si mauvais que cela
Avec le recul, la rhétorique hyperbolique de la Russie avant ces négociations était sans doute mal orientée, et il aurait été préférable que des responsables tels que Medvedev fassent confiance aux partenaires de la Russie comme l’Inde au lieu de douter de leurs intentions.
Les négociations suisses sur l’Ukraine de ce week-end, qui excluaient la Russie et n’ont pas réuni la plupart des pays du Sud, se sont terminées par un communiqué commun largement inoffensif. Il se contente de répéter certains des principaux points abordés par l’Occident à propos de ce conflit, tout en incluant également quelques lignes sur la sécurité nucléaire et les questions humanitaires. Néanmoins, certains des principaux participants, comme l'Inde, ont décidé de ne pas le signer, ce qui a déçu les organisateurs.
Le chef de la délégation de ce pays a expliqué la neutralité de principe de son gouvernement à l’égard de ce conflit, selon laquelle il participera toujours à toute initiative de paix, même s’il n’est pas d’accord avec les détails de celle-ci. Il est également important de mentionner dans ce contexte que le président suisse a déclaré que « des points de vue différents » avaient été exprimés lors du sommet, suggérant ainsi que l’Inde et d’autres partenaires des Russes ont aimablement repoussé l’Ukraine et la résolution envisagée par l’Occident à ce conflit.
Un autre élément intéressant ressortant du sommet est que le commissaire ukrainien aux droits de l’homme a révélé plus tard que certains des participants qui “entretiennent traditionnellement de bonnes relations avec la Russie” ont proposé de servir de médiateur entre les deux parties belligérantes. Dans la mesure où les relations de l’Inde avec la Russie sont officiellement considérées par les deux parties comme un partenariat stratégique spécial et privilégié, il serait tout à fait logique que le chef de sa délégation soit l’un de ceux qui ont offert les services diplomatiques de leur pays.
Ces résultats supplémentaires contrastent avec les attentes de certains responsables russes, comme l'ancien président et vice-président sortant du Conseil de sécurité, Dmitri Medvedev, qui a tweeté à la fin du mois dernier que les pays qui avaient choisi d'y assister se rangeaient tacitement du côté de l'Ukraine. Des déclarations moins dramatiques ont également été faites par d’autres responsables, dont l’essentiel était que ces pourparlers étaient une perte de temps et pourraient être exploités par l’Occident pour accroître sa pression sur la Russie.
Il est compréhensible que la Russie soit en colère contre la tenue d'un événement multilatéral sur le conflit ukrainien sans sa participation, mais sa réaction à ce dernier événement a été beaucoup plus dure que les événements précédents de l'année dernière, tels que les pourparlers de Djeddah, où les ultimatums de Kiev ont été mis en avant. Le contraste entre ces approches se résume à l’évolution des conditions diplomatiques alors que la Chine et le Brésil cherchent désormais à diriger conjointement un processus de paix plus juste et plus inclusif.
Pour que ces efforts naissants portent les plus grands fruits, il fallait que les derniers pourparlers suisses échouent, notamment en raison du manque de participation des pays du Sud. Cela donne à la dernière initiative plus de chances de réussir puisque le nombre, comme on pouvait s’y attendre, plus élevé de participants du Sud global pourrait être présenté comme signifiant un soutien international accru au consensus de paix commun sino-brésilien en six points. En conséquence, les principes susmentionnés pourraient servir de base à un nouveau cycle de négociations.
Pour en revenir à l'événement du week-end dernier, la situation n'a pas été aussi grave que certains en Russie le craignaient, en particulier après qu'il ait été annoncé que l'Inde et d'autres [12 pays, dont l’Inde, les EAU, l’Afrique du Sud, l’Arabie, le Brésil...] avaient refusé de signer le communiqué conjoint, tandis que l'Ukraine a révélé que certains d'entre eux avaient même proposé de servir de médiateur pour mettre fin au conflit. Avec le recul, la rhétorique hyperbolique de la Russie avant ces négociations était sans doute mal orientée, et il aurait été préférable que des responsables tels que Medvedev fassent confiance aux partenaires de la Russie comme l’Inde au lieu de douter de leurs intentions.
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