Sans aucun doute, Andrew Korybko est un analyste rationnel, qui entend traiter des sujets les plus complexes avec une logique imperturbable et effectivement rationnelle. C’est ce qu’il a voulu faire après les déclarations de la première ministre estonienne Kaja Kallas nous “révélant” conjointement qu’il y a d’ores et déjà des troupes de l’OTAN qui entraînent des troupes ukrainiennes en Ukraine, – ce que tout le monde savait, bien entendu, – mais que cela n’implique éventuellement en rien l’application de l’Article 5 qui impliquerait toute l’OTAN, – ce qui est également une hypothèse largement débattue depuis des mois.
Note de PhG-Bis : « Ah, l’Article 5 ! Nous en parlons à intervalles irréguliers, pour montrer l’imbroglio que suggère cette partie du traité de l’Atlantique Nord. Nous en parlions encore le 4 novembre 2021, rappelant “Le charme discret de l’Article 5” à partir d’explications qui n’expliquent pas grand’chose, à partir (bis) de citations d’un long article sur le sujet du 20 août 2008, lorsqu’il en fut question durant la courte guerre entre la Russie et la Géorgie pour se faire croire que l’OTAN aurait pu s’occuper de cette guerre. L’Article 5 est une chose qui fait croire à tout le monde qu’il pourrait se manifester, venue de quelque volonté divine, une solidarité à laquelle nul n’est vraiment tenue, et que personne ne tient vraiment à montrer de façon trop risquée pour son propre compte. L’Article 5 est du genre “Retenez-moi ou je fais un malheur”. »
Les explications de Korybko sont un peu à l’image de ce rappel, non pas à cause de l’auteur, mais à cause de l’extraordinaire imbroglio de la situation opérationnelle du côté ukrainien avec les divers contingents otaniens plus ou moins déguisés, et tout cela sous la houlette d’un Zelenski qui implique la cause de ses revers au “monde entier” et se comporte d’une façon qui est ainsi décrite par le porte-parole de Poutine, Dimitri Pechkov
« “Zelenski et d'autres font des déclarations qui tournent parfois à l'hystérie”, a répondu ce 21 mai Dmitri Peskov à une question posée sur le récent appel du président ukrainien à ses alliés occidentaux de s’impliquer davantage dans le conflit. “Cela est dû à la situation difficile [sur le front pour les forces ukrainiennes], malgré l'aide annoncée”, a poursuivi le porte-parole du Kremlin. »
Ainsi lira-t-on le texte de Korybko : en n’y comprenant pas grand’chose là où il n’y a pas grand’chose à comprendre. De toutes les façons, on rétorquera aux prorusses anti-Poutine qui moquent la supposée lenteur des Russes, qu’à ce compte-là on comprend que Poutine ne soit pas trop vite pressé de l’emporter quand il mesure l’ampleur et la somptueuse diversité du désordre qui règne et ne cesse de s’étendre chez les Ukrainiens et leurs alliés de l’OTAN dans le développement général de leur non-stratégie développée à l’ombre rassurante de l’Article 5. Cette analyse de Korybko de ce 22 mai ne prétend rien nous expliquer de la situation générale, mais bien de nous expliquer qu’elle est toute proche d’être inexplicable et que c’est aussi bien comme ça.
Ainsi, en guise d’avertissement ou d’introduction, on ne sait exactement, Korybko résume son article par ce propos qui ne peut qu’emporter notre adhésion :
« Les assurances de Kaja Kallas selon lesquelles l’article 5 ne serait pas automatiquement invoqué si la Russie tuait des formateurs de l’OTAN en Ukraine ne doivent pas être prises au pied de la lettre, car les tensions pourraient facilement devenir incontrôlables dans ce scénario. »
dde.org
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La Kallas et l’Article 5 en Ukraine
Le Premier ministre estonien Kaja Kallas a déclaré au Financial Times que l’article 5 ne serait pas automatiquement invoqué si des soldats de l’OTAN étaient tués en Ukraine. Selon elle : « Je ne peux pas imaginer que si quelqu’un est blessé là-bas, alors ceux qui ont envoyé leurs hommes diront ‘c’est l’article cinq. Bombardons la Russie’. Ce n’est pas comme ça que ça marche. Ce n'est pas automatique. Ces craintes ne sont donc pas fondées. Si vous envoyez votre peuple aider les Ukrainiens... vous savez que le pays est en guerre et vous vous trouvez dans une zone à risque. Alors vous prenez le risque. »
Elle a également admis que « certains pays entraînent déjà des soldats sur le terrain », ses propos ne sont donc pas simplement théoriques. Cette révélation fait suite à l’admission du Premier ministre polonais Donald Tusk au début du mois qu’« il y a des troupes là-bas, je veux dire des soldats. Il y a des soldats là-bas. Observateurs, ingénieurs. Ils les aident. Même si beaucoup pensent que les États-Unis sont également impliqués dans ces missions, le président de l'état-major interarmées, le général. Charles Q. Brown Jr. le nie.
Il a déclaré au New York Times que « nous y parviendrons éventuellement, avec le temps » en ce qui concerne l'autorisation du déploiement de soldats américains sur le terrain à des fins d'entraînement présumées, malgré sa crainte que cela « mette en danger un groupe d'entraîneurs de l'OTAN » et nécessitent des défenses aériennes pour les protéger. Sur ce sujet, bien qu’il ait été estimé précédemment qu’« il serait surprenant que des systèmes Patriot’ polonais soient utilisés pour protéger l’Ukraine occidentale » en raison des objections anglo-américaines de l’époque, les calculs pourraient changer.
Les révélations de Tusk et Kallas confirment le secret de polichinelle selon lequel les membres de l’OTAN ont secrètement déployé des troupes en Ukraine sous prétexte d’entraîner leurs homologues, et alors que Zelensky panique après la nouvelle poussée de la Russie dans la région de Kharkov, il exige une fois de plus que l’OTAN abatte les missiles russes. Étant donné que Brown a déclaré qu’un parapluie serait nécessaire pour protéger les formateurs de l’OTAN sur place, dont les deux dirigeants susmentionnés ont déjà déclaré qu’ils étaient sur le terrain, un scénario commence à se dessiner.
La France, la Pologne et d’autres pays comme les États baltes qui pourraient participer à une « coalition des volontaires » pour intervenir de manière conventionnelle en Ukraine pourraient potentiellement y formaliser une présence militaire jusqu’ici non officielle après avoir regroupé leurs forces dans l’ouest de l’Ukraine, près de la frontière de l’OTAN. Ce faisant, leurs homologues ukrainiens – y compris les forces de l’ordre – pourraient alors être libérés pour aller au front, ces troupes de l’OTAN étant protégées par les systèmes Patriot en Pologne et en Roumanie.
Ce scénario est loin d'être comparable à celui dramatique d'une force de l'OTAN à grande échelle se précipitant vers le Dniepr ou peut-être même au-delà, ce dernier scénario pouvant inciter la Russie à utiliser des armes nucléaires tactiques en état de légitime défense afin d'empêcher ses nouvelles régions anciennement ukrainiennes être envahi par le bloc. Si Kallas disait la vérité sur le fait que l’OTAN n’était pas intéressée à activer l’article 5 si des missiles russes traversaient le parapluie Patriot pour y tuer ses entraîneurs officiels de l’époque, alors une Troisième Guerre mondiale serait peu probable.
Néanmoins, il est peu probable que les États-Unis laissent anéantir leurs alliés sans réagir si la Russie pulvérisait leurs forces en Ukraine, accélérant ainsi le scénario apparemment inévitable auquel Brown a fait allusion au début du mois concernant l’implication militaire américaine conventionnelle en Ukraine malgré les risques de guerre avec la Russie. Pour ces raisons, les assurances de Kallas sur ce sujet sensible ne doivent pas être prises au pied de la lettre, car les tensions pourraient facilement devenir incontrôlables si des soldats en uniforme de l’OTAN étaient tués par la Russie en Ukraine.
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