L’un des plus grands dangers des monnaies numériques réside dans la possibilité technique de les programmer et de les lier ainsi exclusivement à certains achats. De toutes nouvelles possibilités s’offrent au monde de la finance et à ses complices politiques dociles dans les États-nations : d’une part, le comportement des consommateurs peut être contrôlé. D’autre part, de toutes nouvelles opportunités s’offrent pour promouvoir des effets économiques souhaités en appuyant sur un bouton.
Ce n’est qu’une petite information qu’il faut lire deux fois pour en percevoir son caractère explosif : le gouvernement thaïlandais a annoncé un plan de soutien à l’économie. Quelque 50 millions de Thaïlandais devraient recevoir chacun environ 250 euros sous forme de crédit numérique à dépenser dans leurs commerces locaux.
Prestations sociales par carte
Les achats numériques, lit-on, ne sont autorisés que dans les districts des bénéficiaires, mais pas pour des articles comme le pétrole, les services et les achats en ligne. Les 50 millions de Thaïlandais concernés sont des personnes à faible revenu et aux économies modestes. Sur une population totale d’un peu plus de 70 millions d’habitants, nous parlons néanmoins d’une grande partie de la population.
Ce qui semble être une idée astucieuse (nous encourageons la consommation par des dons d’argent et stimulons ainsi l’économie) se révèle être une tendance inquiétante : les aumônes ciblées pour les groupes de population précaires deviennent une réalité grâce à l’argent programmé de la banque centrale.
La Thaïlande, comme de nombreux autres pays, mène actuellement un projet pilote pour introduire la monnaie numérique de la banque centrale. L’utilisation est testée aussi bien pour le commerce de gros que pour le commerce de détail, le gouvernement étant soutenu et conseillé sur le plan technologique par le groupe allemand Giesecke + Devrient.
Certes, la BCE affirme que l’euro numérique ne doit en aucun cas constituer une monnaie programmable. Mais l’utilisation des possibilités technologiques de la monnaie numérique de la banque centrale est toujours une question de circonstances et de décisions politiques.
En Allemagne, le gouvernement d’Olaf Scholz s’est mis d’accord sur une base juridique nationale pour l’introduction d’une carte de paiement pour les réfugiés et les demandeurs d’asile. À l’avenir, les autorités devront transférer l’argent provenant de l’aide publique aux banques qui rechargeront ensuite ces cartes. Cette mesure vise à mettre fin aux abus répandus parmi les migrants qui transfèrent de l’argent à l’étranger.
L’introduction de l’euro numérique offrira aux États membres de toutes nouvelles possibilités d’orienter le comportement de consommation des gens par le biais des prestations sociales. Mais ils disposeront également d’un moyen d’empêcher les gens de consommer en appuyant sur un bouton.
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2024/04/12/monnaie-numerique-laumone-programmable-pour-les-pauvres-par-ulrike-reisner/?
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