15 mars 2024

Transgenre - L’incapacité à distinguer les faits des souhaits

Matt Taibbi donne son avis sur la dernière absurdité concernant les transgenres :

L’article “Freedom of Sex” du New York Magazine est l’exemple ultime du nihilisme lunatique qui consume la classe intellectuelle américaine.

Le New York Magazine a publié un nouvel article en couverture, écrit par l’écrivain transgenre Andrea Long Chu : “L’argument moral pour laisser les enfants transgenres changer de corps“. Une jérémiade en faveur de l’idée que les enfants doivent avoir un pouvoir politique absolu, qui fait passer le manifeste d’Unabomber pour un sonnet de Shakespeare. Le passage sur l’argent :

Nous devons être prêts à défendre l’idée qu’en principe, tout le monde devrait avoir accès à des soins médicaux pour changer de sexe, indépendamment de l’âge, de l’identité de genre, de l’environnement social ou des antécédents psychiatriques.

Une grande partie de l’article est un nihilisme de bande dessinée standard de type “woe-is-me fuck-everything” que l’on peut entendre de la part de n’importe quel produit « art libéral de la classe col blanc », plaidant pour une destruction généralisée du patriarcat, entre autres en s’attaquant à la conspiration biologique visant à produire ces unités de valeur de travail matériel connues sous le nom de “bébés“. L’abolition complète des normes serait une “tâche impossible“, note tristement Chu, mais cela n’empêche pas leur “réimagination collective” par une alliance de victimes intersectionnelles travaillant à l’avènement d’un paradis marxien débarrassé des “systèmes oppressifs“, dont fait bien sûr partie la famille classique.

Le nihilisme dont parle Taibbi est également le thème principal abordé par l’anthropologue français Emmanuel Todd dans son livre intitulé « La défaite de l’Occident ».

Extrait de la critique du New York Times :

This Prophetic Academic Now Foresees the West’s Defeat (archivé) – New York Times, 9 mars 2024

Le leadership américain est en train d’échouer : Tel est l’argument d’un nouveau livre excentrique qui, depuis janvier, se trouve en tête des listes de best-sellers en France. Il s’intitule “La Défaite de l’Occident“. Son auteur, Emmanuel Todd, est un historien et anthropologue célèbre qui, en 1976, dans un livre intitulé “La chute finale“, a utilisé les statistiques de mortalité infantile pour prédire que l’Union soviétique était sur le point de s’effondrer.

Todd n’est pas un moralisateur. Mais il insiste sur le fait que les cultures traditionnelles ont beaucoup à craindre des diverses tendances progressistes de l’Occident et qu’elles peuvent résister à l’idée de s’allier, en matière de politique étrangère, à ceux qui les épousent. De même, pendant la guerre froide, l’athéisme officiel de l’Union soviétique a été un facteur de rupture pour de nombreuses personnes qui auraient sinon pu être bien disposées à l’égard du communisme.

Todd pense que certaines de nos valeurs sont “profondément négatives“. Il présente des preuves que l’Occident n’accorde pas de valeur à la vie de ses jeunes. La mortalité infantile, le paramètre révélateur qui l’a amené à prédire l’effondrement de l’Union soviétique il y a un demi-siècle, est plus élevée dans l’Amérique de M. Biden (5,4 pour mille) que dans la Russie de M. Poutine – et trois fois plus élevée que dans le Japon du Premier ministre Fumio Kishida.

Si M. Todd ne porte pas de jugement sur les questions sexuelles, il en porte sur les questions intellectuelles. L’incapacité à distinguer les faits des souhaits le surprend à chaque tournant de la guerre en Ukraine. L’espoir américain, au début de la guerre, que la Chine puisse coopérer à un régime de sanctions contre la Russie, aidant ainsi les États-Unis à perfectionner une arme qui serait un jour dirigée contre la Chine elle-même, est, pour M. Todd, un “délire“.

En janvier dernier, Todd a développé l’incapacité à distinguer les faits de la fiction, qui est également à la base du trans-genrisme, lors d’une interview accordée au Figaro. Extrait de la traduction anglaise :

Q : Avec le temps, n’êtes-vous pas devenu un peu réactionnaire ?

J’ai été élevé par une grand-mère qui m’a dit que, sexuellement parlant, tous les goûts sont dans la nature, et je suis fidèle à mes ancêtres. Alors, LGB, bienvenue. Pour T, la question des trans est autre chose. Les personnes concernées doivent bien sûr être protégées. Mais la fixation des classes moyennes occidentales sur cette question ultra-minoritaire pose une question sociologique et historique. Ériger en horizon social l’idée qu’un homme peut réellement devenir une femme et une femme un homme, c’est affirmer une impossibilité biologique, c’est nier la réalité du monde, c’est affirmer le faux.

L’idéologie trans est donc, à mon sens, l’un des étendards de ce nihilisme qui caractérise aujourd’hui l’Occident, de cette volonté de détruire non seulement les choses et les hommes, mais aussi la réalité. Mais, encore une fois, je ne me laisse nullement envahir par l’indignation ou l’émotion. Cette idéologie existe et je dois l’intégrer dans un modèle historique. À l’ère du métavers, je ne peux pas dire si mon attachement à la réalité fait de moi un réactionnaire.

Le déni intentionnel de la réalité, tel qu’il est pratiqué actuellement en Occident, n’est pas un phénomène nouveau. Il est à la base du néo-conservatisme, d’où il s’est insinué du côté progressiste.

Comme l’a écrit Ron Susskind dans son portrait des premières années de la présidence de Bush junior :

Faith, Certainty And The Presidency Of George W. Bush – Ron Susskind / New York Times, Oct 17 2004

L’assistant m’a dit que les types comme moi faisaient partie de ce que nous appelons la communauté basée sur la réalité, qu’il a définie comme des gens qui croient que les solutions émergent de l’étude judicieuse de la réalité discernable. J’ai acquiescé et murmuré quelque chose à propos des principes des Lumières et de l’empirisme. Il m’a interrompu. “Ce n’est plus ainsi que le monde fonctionne. Nous sommes un empire maintenant, et quand nous agissons, nous créons notre propre réalité. Et pendant que vous étudiez cette réalité – de manière judicieuse, comme vous voulez – nous agirons à nouveau, créant d’autres nouvelles réalités, que vous pourrez étudier également, et c’est ainsi que les choses s’arrangeront. Nous sommes les acteurs de l’histoire […] et vous, vous tous, ne ferez qu’étudier ce que nous faisons“.

Karl Rove, le conseiller de Bush cité par Susskind, a fait preuve du même nihilisme lunatique que celui représenté par ceux qui soutiennent que les enfants, les adolescents ou les personnes en général devraient pouvoir choisir librement leur sexe. Il s’agit d’une tentative de “créer d’autres réalités nouvelles“. Il s’agit d’un déni total de la réalité actuelle et des valeurs communes qui en découlent. L’administration Bush a échoué dans sa tentative de créer de nouvelles réalités en Irak. Le régime actuel de l’Occident échouera de la même manière avec le changement de régime en Russie. Il en sera de même pour tous ceux qui nient la réalité.

L’auteur de la critique du livre de Todd, Christopher Caldwell, ajoute :

Pour mener une guerre fondée sur des valeurs, il faut de bonnes valeurs. Or, les États-Unis sont plus éloignés de cet accord sur les valeurs qu’ils ne l’ont jamais été dans leur histoire – plus éloignés, même, qu’ils ne l’étaient à la veille de la guerre de Sécession. Il semble parfois qu’il n’y ait pas de principes nationaux, mais seulement des principes partisans, chaque camp étant convaincu que l’autre essaie non seulement de diriger le gouvernement, mais aussi de s’emparer de l’État.

Je vois un déni de réalité très similaire, suivi d’un nihilisme et d’un manque de valeurs, au sommet des dirigeants européens actuels. La perte de la vision commune des choses divise les sociétés des deux côtés de l’Atlantique.

Toutefois, en ce qui concerne le transgendérisme, un certain sens de la réalité tente encore de survivre :

Le National Health Service anglais arrête de prescrire des bloqueurs de puberté, citant “un manque de preuves – USA Today. 13 mars 2024

« Nous en avons conclu qu’il n’y a pas assez de preuves supportant la sécurité ou la qualité clinique des hormones bloquant la puberté pour en faire, pour le moment, un traitement ordinaire disponible facilement » explique la publication du National Health Sesrvice anglais.

La puberté est un processus naturel qui s’accompagne souvent d’une confusion temporaire sur l’identité. Bloquer la puberté d’un enfant pour renforcer une confusion éphémère que certains peuvent avoir pendant cette période est, à mon avis, criminel.

Je suis même d’accord avec Rishi Sunack sur ce point :

Le premier ministre britannique à propos du genre : “Un homme est un homme et une femme est une femme– Washington Post, 5 octobre 2023

Le Premier ministre britannique Rishi Sunak a affirmé sa position sur l’identité sexuelle dans un discours mercredi, déclarant qu’il était “de simple bon sens” qu'”un homme soit un homme et une femme une femme” – une remarque qui a suscité des critiques de la part des militants des droits des transgenres et des applaudissements fervents de la part des participants à la Conférence du Parti conservateur.

Je me considère, tout comme Matt Taibbi semble se considérer, comme un progressiste aspirant à une société fondée sur une forme de socialisme et de justice.

Le fait de me retrouver du même côté, sur ce sujet, que certains conservateurs convaincus, et d’être attaqué pour cela, est légèrement troublant.

Est-il vraiment impossible d’être réaliste tout en se situant du côté gauche des choses ?

Moon of Alabama

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