Ada ne dit pas un mot. Elle se poste devant le fusil d’assaut, posé devant elle sur une table en bois. Sa mission ? Le démonter et le remonter le plus rapidement possible. Très concentrée, elle commence par ôter le chargeur, puis tire la culasse. Avec ses petits doigts, elle enlève ensuite le capot, le ressort récupérateur, libère le percuteur…
Cela fait dix jours qu’elle s’entraîne quotidiennement à cet exercice, mais ses gestes restent lents et maladroits. La kalachnikov, d’une longueur de 87 centimètres et d’un poids de plus de 4 kilos, lui glisse plusieurs fois des mains.
Même neutralisée (des modifications la rendent inapte au tir), l’arme paraît démesurée. Ada porte un tee-shirt rouge avec un petit chien noir et blanc à lunettes jaunes et des tongs roses : elle a 9 ans. La petite fille s’est déjà choisi un nom de guerre : Talisman. Comme tous ses camarades, une cinquantaine de jeunes âgés de 6 ans à 18 ans, elle passe une partie de ses vacances au camp d’été patriotique militaire des Azovets (Ukraine).
Préparer la résistance contre l’armée pro-russe
Nous sommes à 35 kilomètres à l’ouest de Kiev, la capitale ukrainienne, dans une forêt à la lisière de la route E40, en direction de Jytomyr. Aucun panneau n’indique le lieu. Une simple banderole est accrochée à la grille d’entrée et deux drapeaux flottent dans la cour : celui de l’Ukraine et celui du camp d’été du régiment Azov – deux silhouettes bleues d’enfants soldats portant des fusils-mitrailleurs et des casques de combat sur fond jaune.
Cette unité paramilitaire ultranationaliste a été créée au lendemain de l’annexion de la Crimée par les Russes, agression qui avait suivi la révolution de Maïdan, en mai 2014.
Composée de volontaires désireux de lutter contre l’insurrection armée pro-russe dans le Donbass, à l’est du pays, elle a été intégrée à la garde nationale ukrainienne dès septembre 2014 et placée sous l’autorité du ministère de l’intérieur. Comme d’autres bataillons de volontaires. Une façon pour Kiev de reprendre le contrôle de ces unités, qui ont pallié dans les premiers mois de la guerre le manque de moyens et d’effectifs de l’armée.
« L’école est censée enseigner les rudiments de la guerre mais elle ne le fait plus. Avec ces exercices, nous leur apprenons à travailler en équipe et à être disciplinés. » « Prof », le directeur du camp
Opérant principalement à Marioupol, puis à Berdiansk, le régiment Azov (autrefois appelé bataillon), qui compterait plus de 2 000 combattants au front selon les estimations, a ouvert cette colonie de vacances pour futures recrues (même s’ils s’en défendent) en juin 2015. L’objectif : « Apprendre aux jeunes à être de bons patriotes », résume le directeur, Andreï, 21 ans.
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