Il y a presque 11 ans, j'ai mis en garde contre "l'avènement de l'agridollar (dollar soutenu par l'agriculture et l'alimentation)" qui mettrait la Chine dans une situation géopolitique désavantageuse en raison de ses importations, vu la difficulté pour nourrir la plus grande population de la planète et de la disparition du pétrodollar (https://bit.ly/4808i2a ) et (https://bit.ly/44GORIE )".
Deux conséquences notables de la guerre en Ukraine et de sa multidimensionnalité sont la double crise énergétique et alimentaire. Onze ans après l'avertissement sinistre de Zero Hedge, un "effet alimentaire BRICS" s'est produit lorsque "le Brésil a supplanté les États-Unis en tant que roi des exportations de maïs", selon le portail mondialiste Bloomberg (https://bloom.bg/3R3pTQK ). Zero Hedge lui-même admet, 11 ans plus tard, qu'"un nouvel ordre multipolaire est en train d'émerger avec les BRICS et le Groupe de Shanghai (SCO)" qui "offrent de larges alternatives à l'Occident hégémonique collectif (https://bit.ly/3Rak3gC )".
C'est l'hypothèse de votre serviteur depuis 13 ans, notamment dans son livre El hibrido mundo multipolar - Un enfoque multidimensional (= The Hybrid Multipolar World : A Multidimensional Approach) (https://bit.ly/3LdnmQi ).
Le ministère américain de l'agriculture (USDA) montre que le règne incontesté de Washington sur le maïs, qui a duré cinq décennies, a pris fin avec la récolte de 2023, lorsque ses exportations mondiales ont atteint 23 %, bien en deçà des 32% du Brésil. Au cours de la dernière décennie, le Brésil et d'autres membres des BRICS+ avaient déjà supplanté les États-Unis, qui avaient perdu leur suprématie en matière de production et d'exportation de blé et de soja.
Les statistiques varient en ce qui concerne les exportations et la production. Dans le classement des cinq premiers producteurs (sic) de blé, trois appartiennent au CIR, soit, dans l'ordre : Chine (1), Inde (2) et Russie (3), avant les États-Unis (4). Dans la production mondiale de soja, dans le classement des cinq premiers, quatre appartiennent aux BRICS+ : le Brésil (1), l'Argentine (3), la Chine (4) et l'Inde (5), avant les États-Unis (2).
La perte de la première place pour les exportations de maïs n'est pas anodine, alors que sa valeur aux États-Unis était de 91,73 milliards de dollars, celle du soja de 61,15 milliards et celle du blé de 14,6 milliards en 2022.
Selon Stephen Nicholson, stratège mondial des céréales à la banque agricole Rabobank, chaque année "le Brésil est susceptible de prendre une plus grande part du marché mondial" et l'une des principales raisons est le "réalignement du commerce agricole de la Chine avec le Brésil et loin des États-Unis" lorsque les décideurs politiques à Washington "ont frénétiquement militarisé le dollar et le commerce contre Pékin (https://reut.rs/485kqia )". Il applique ici la métaphore de la "lente ébullition de la grenouille" lorsque les États-Unis ont perdu la suprématie qu'ils exerçaient sur le maïs depuis 40 ans.
Michael Hirtzer et Dominic Carey de Bloomberg citent "un certain nombre de facteurs expliquant la fin du règne des États-Unis": "les coûts élevés et la rareté des terres agricoles ouvertes, les effets continus de la guerre commerciale avec la Chine et un dollar fort". Ils ajoutent que "le déclin continu et la perte de la concurrence américaine sont un coup dur pour un pays qui a toujours utilisé l'alimentation comme une force géopolitique". Ils omettent de mentionner que le Brésil a la chance climatique d'avoir une double récolte annuelle.
Plus important encore, la faiblesse du real (la monnaie brésilienne) par rapport au dollar est exploitée par la Chine (https://bloom.bg/3Lc7Jsf ). Karl Plume de Reuters affirme que "le Brésil est en train de gagner le jeu des exportations de maïs".
La complémentarité entre la Chine et le Brésil devient plus substantielle lorsque Brasilia interagit de manière intensive avec les investissements en infrastructure et en technologie de Pékin. Ainsi, les exportateurs chinois utilisent des swaps (https://bit.ly/44A7oq8), par le biais de leurs monnaies nationales respectives, en contournant le dollar dans leur commerce bilatéral annuel de 150 milliards de dollars (https://bit.ly/486l9Qv). Le commerce intra-BRICS+ devient "circulaire", car ils achètent et vendent avec leurs monnaies nationales respectives en contournant l'hégémonie du dollar.
Traduction par Robert Steuckers
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