Sur le papier et il y a cinquante ans de cela, l’Union européenne semblait une excellente idée. Avec les dernières décennies et, notamment, les cinq dernières années, l’idée a rapidement viré au cauchemar et tout s’y déroule comme si la construction européenne avait été conçue pour ruiner la France puis, maintenant, l’Allemagne.
Pour tous les thuriféraires de la superstructure étatique européenne, il ne fait pas de doute que le réveil sera d’autant plus long qu’il sera brutal et douloureux. Pour les autres, le doute n’a déjà plus place surtout que ces derniers mois, des informations dont seuls les initiés disposaient jusqu’alors commencent à fuiter abondamment.
C’est ainsi qu’on a récemment appris (ou disons, redécouvert) que Dominique Voynet, alors ministre de l’Environnement sous le gouvernement Jospin entre 1997 et 2001, a consciencieusement fusillé le nucléaire français, saboté même, en s’assurant que ce dernier ne serait pas épargné par les malus taxatoires qui touchent le pétrole, le charbon et le gaz.
On pourrait charitablement (ou niaisement) croire que la trahison de Voynet et son sabotage de la filière nucléaire française n’était que le fait d’une erreur de personne ou d’une mauvaise compréhension des enjeux. Il n’en est rien : en réalité, il ne s’agit ni pas d’une erreur tactique, stratégique ou idéologique, mais cela s’inscrit bel et bien dans un projet de longue haleine visant à affaiblir la France depuis la fin des années 90.
Ce projet, essentiellement piloté par les Allemands, a consisté à tout faire pour détruire le potentiel industriel de la France en utilisant différents lobbies, puis, depuis 2015, l’agenda 2030 et très notamment son volet écologique pour s’assurer de l’arrêt et du démantèlement de la filière nucléaire française.
Le but pour les Allemands était d’amoindrir puis d’annuler l’avantage compétitif des Français en matière d’énergie électrique. Le lobbying constant d’associations plus ou moins écologistes, systématiquement en défaveur du nucléaire bien avant les autres énergies (et surtout pas le gaz – le géant du gaz russe, Gazprom, arrosant régulièrement les écolos allemands), l’infiltration de lobbyistes allemands au plus haut niveau des institutions françaises, la mise en place d’un “marché de l’électricité” fortement défavorable aux opérateurs français, l’imposition de prix électriques fixés arbitrairement pour favoriser les énergies alternatives intermittentes et non-pilotables et divertir une masse considérable d’argent public dans les poches de promoteurs privés amis des politiciens bien placés, tout aura aidé ces dernières années pour garantir des difficultés grandissantes au nucléaire français.
Et de façon claire, les industriels français ont progressivement perdu l’avantage énergétique à rester en France : une fois les prix électriques de plus en plus proches de ceux qu’on trouve outre-Rhin, il n’est pas plus intéressant d’être en France qu’en Allemagne d’autant qu’on y trouve plus facilement une main-d’œuvre mieux formée et nettement moins de pénibleries paperassières administratives.
Malheureusement, si l’objectif semble rempli pour les Allemands, la survenue du conflit russo-ukrainien a profondément modifié la donne, d’autant qu’il s’est doublé de choix géopolitiques de plus en plus hasardeux des institutions européennes : poussée par un exécutif américain ravi de voir l’Europe se tirer une balle dans le pied, les sanctions économiques puis le sabotage de NordStream auront durablement modifié la donne énergétique allemande dont l’industrie se retrouve à présent dans une situation tendue.
Sans surprise, le moteur industriel européen, essentiellement allemand, commence à caler : dans un récent article de Politico, on apprend par exemple que la capacité de l’Allemagne à attirer les investissements des entreprises a subi une baisse alarmante l’année dernière, lorsque plus de 135 milliards de dollars d’investissements directs étrangers sont sortis d’Allemagne et que seulement 10,5 milliards d’euros ont été enregistrés. Comme les coûts de l’énergie ont explosé, les industries chimique et métallurgique grosses consommatrices d’énergie et piliers de l’économie allemande, ont donc choisi de déplacer leurs usines à l’étranger.
Le bilan n’est pas réellement réjouissant et on comprend que si la situation devait durer, l’économie allemande pourrait se prendre une gamelle mémorable. Ce qui pourrait n’avoir été qu’un petit mauvais moment à passer, une récession purement “technique”, est en passe de se transformer en renversement fondamental de situation économique qui pourrait fort bien emporter toute l’Europe avec elle.
Cette désindustrialisation allemande, que l’Italie ou la France sont incapables de compenser (les deux pays pataugeant actuellement dans leurs propres problèmes économiques de plus en plus graves), entraîne des phénomènes nouveaux outre-Rhin avec par exemple le début d’un exode des travailleurs allemands à l’étranger.
Du point de vue de la construction européenne, cela ressemble de plus en plus à un échec cuisant. Du point de vue des Américains, en revanche, cela affirme une tendance déjà en place depuis le tournant du siècle : entre la guerre en Ukraine et les actuelles difficultés économiques majeures du Vieux Continent, l’Europe divisée est une réalité rentable pour les États-Unis dont le niveau de vie a continué à augmenter ces vingt dernières années au contraire du niveau de vie européen qui a, lui, globalement stagné (au mieux) voire baissé (dans certains pays, notamment en Italie).
À tel point que, comme le soulignait déjà un article de 2019 de FEE et qui n’est pas démenti à ce jour, les 20% les plus pauvres des Américains sont en moyenne plus riches que la plupart des nations européennes. Les pauvres vivant aux États-Unis ont ainsi accès à plus de ressources matérielles que la moyenne de la plupart des pays les plus riches du monde…
Le bilan des dernières années est sans appel : à force de lobbying, jouant sur la naïveté française qui croyait en être restée à une entente franco-allemande quelque peu romancée, l’Allemagne a durablement fusillé l’industrie française. Et au moment où elle allait enfin assurer sa suprématie sur tout le continent, la guerre en Ukraine et les décisions européennes qui furent prises à la suite ont fusillé l’industrie allemande.
Bravo : à présent, l’Europe est foutue.
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