11 août 2023

La Chine va-t-elle entrer en crise économique ?

 
Oui, mais pour d’autres raisons que celles qui se posent au reste du monde, victime avant toute chose de l’enchérissement des énergies. C’est d’ailleurs cela qui inquiète, car cela signifie qu’il existe un problème spécifique à la Chine. Regardons cela de plus près.
D’un côté, le commerce s’est intensifié avec la Russie, à cause des sanctions occidentales contre-productives qui n’ont nui qu’à l’Europe : ses exportations vers sa voisine ont ainsi connu une progression de presque 75%. Mais ce chiffre colossal ne doit pas faire oublier une réalité plus globale : l’économie russe, pour prospère qu’elle soit en ce temps de guerre, n’est pas comparable en taille à celles de l’ensemble des puissances occidentales. Or, vers l’Occident, les exportations chinoises ont chuté de 15% sur un an.

Commerce extérieur sous pression

Quelles sont les raisons de ce recul ? En premier lieu, une baisse de la demande extérieure, non seulement occidentale, mais du monde en général. A l’inflation et la hausse des taux chez nous s’ajoutent les tensions internationales entre la Chine et ses voisins protégés par les États-Unis ; des tensions qui intimident les investisseurs, dans un pays trop dépendant de sa balance commerciale. En outre, l’Union européenne, principal importateur mondial, a résolu d’augmenter ses taux de douane sur de nombreux produits chinois exportés à des prix abusivement bas.

C’est ainsi que l’on constate un effondrement de 87% des entrées nettes d’investissements étrangers, et probablement plus encore, car n’oublions pas que la Chine est économiquement capitaliste, mais politiquement communiste, elle pratique donc un maquillage de ses statistiques comme ont fait avant elle tous les pays communistes – on se souvient de l’imposture de la prétendue prospérité économique est-allemande.

Trop sûr de lui, le régime chinois a renforcé la présence d’un secrétaire du parti communiste dans chaque conseil d’administration, ce qui augmente la crainte des investisseurs. Or, nous l’avons dit, la prospérité chinoise dépend largement de ses exportations, et plus grave encore, d’exportations réalisées à 70% par des entreprises d’origine étrangère installées chez elle, attirées par les faibles coûts salariaux.

Économie intérieure fragile

La seule solution serait donc de se tourner vers le marché intérieur : qu’en est-il ? La population vieillit tellement que les entreprises chinoises elles-mêmes, en mal de travailleurs disponibles, sont obligées de s’implanter chez les voisins : au Vietnam, en Thaïlande, en Indonésie, ce qu’on appelle désormais la « Chine +1 » – au sens économique de l’expression. Il n’empêche que la demande s’est affaiblie au point que les prix s’effondrent. A Pékin, on peut prendre son petit-déjeuner pour 38 centimes d’euro. A première vue, les ménages ont plus de pouvoir d’achat, du fait de la baisse des prix. Mais le régime communiste ne peut plus les orienter vers des achats engageant l’avenir, comme l’immobilier dont nous avons vu qu’il est en crise depuis longtemps, des villes entières ayant été construites sans attirer autant d’habitants qu’attendu. Le réflexe des ménages, de plus en plus âgés, est de thésauriser. Ainsi l’effet-revenu l’emporte-t-il sur l’effet-prix-bas qui chez un jeune l’encouragerait à consommer davantage. Mais si la demande baisse, la production aussi. Qui plus est, dans ce contexte de baisse des prix, l’épargne jouit d’un taux d’intérêt réel plus élevé que le taux d’intérêt affiché, ce qui encourage l’épargnant à attendre que les prix baissent encore, voire à laisser son épargne grandir toute seule : c’est la spirale déflationniste, qui finit par mettre une économie à l’arrêt.

Le marché interne étant trop poussif, il reste encore à la Chine la possibilité de renforcer son commerce extérieur et dépréciant le yuan, ce qui rendrait ses marchandises moins chères et donc plus compétitives. Si l’Union européenne ne rehausse pas ses barrières douanières, nos entreprises aligneront leurs prix, en devant au passage aggraver le chômage et geler les salaires, ou les baisser grâce à l’immigration. Bref, enfoncer l’Europe dans sa propre crise…

Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/08/11/la-chine-va-t-elle-entrer-en-crise-economique-par-yves-marie-adeline/

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