Mohsen Abdelmoumen : Dans votre récent article ‘’America goes to war’’, vous avez parlé de l’influence des juifs dans les différentes institutions américaines. Quel est le véritable poids du lobby sioniste sur la décision politique aux Etats-Unis ?
Philip Giraldi : Le niveau d’influence des groupes juifs aux États-Unis dépend de la question. S’il s’agit de politique étrangère, ils sont en général extrêmement puissants et on peut généralement compter sur eux pour infléchir et contrôler les actions du gouvernement. C’est ce que nous voyons actuellement en Ukraine, une question qui n’a absolument rien à voir avec la sécurité ou les intérêts vitaux des États-Unis, mais ce sont les groupes juifs politiquement actifs et les médias qui font le plus pression pour affronter la Russie, qu’ils détestent pour de nombreuses raisons historiques. Et lorsqu’il s’agit de protéger et de nourrir Israël, le lobby juif-israélien, associé à des médias fortement influencés par les juifs, a un pouvoir total sur ce que font les Etats-Unis. Ce pouvoir a été obtenu par l’utilisation judicieuse des dons politiques aux deux grands partis, les contributeurs juifs occupant une place prépondérante.
On a vu les conséquences de l’ingérence américaine en Syrie, en Libye et maintenant en Ukraine. La néocons Samantha Power s’est rendue récemment en Hongrie, comme vous l’avez évoqué dans votre article ‘’US Foreign Policy goes Woke ?’’. D’après vous, quand les Etats-Unis cesseront-ils de s’ingérer dans les affaires internes des autres pays sous prétexte d’exporter leur soi-disant «démocratie» ?
Les prétextes de l’exportation de la «démocratie», de la «liberté» et d’un «ordre international fondé sur des règles» servent de couverture aux Etats-Unis pour intervenir dans le monde entier pour diverses raisons, mais surtout pour dominer politiquement et économiquement. Cette pratique cessera lorsque l’argent s’épuisera après la mort du pétrodollar, ce qui pourrait arriver bientôt !
Quelle est votre analyse à propos du conflit en Ukraine ? Ne pensez-vous pas que le complexe militaro-industriel américain a besoin de guerres impérialistes ?
L’Ukraine est une guerre qui n’aurait pas dû se produire si les Etats-Unis et le Royaume-Uni avaient sérieusement négocié avec la Russie. La guerre est actuellement poussée avec le plus grand enthousiasme par les politiciens et les médias qui bénéficient de leurs relations avec le complexe militaro-industriel (CMI) et par divers groupes conservateurs juifs et néo-conservateurs.
Pensez-vous qu’Israël va commettre une attaque contre l’Iran qui risque d’embraser tout le Moyen-Orient, voire le monde ? Israël et les néocons dans l’administration américaine ont-ils peur de l’Iran qui est en train de finaliser son programme nucléaire ?
Je pense qu’Israël lancera une sorte de conflit armé avec l’Iran au cours de l’année prochaine et que les Etats-Unis soutiendront cet effort. Les Etats-Unis et Israël savent cependant que l’Iran ne menace pas vraiment l’un ou l’autre pays. Son programme nucléaire est loin de produire une arme. Il s’agit plutôt pour Israël d’établir une domination militaire sur sa région au Moyen-Orient. L’Iran est la seule nation qui puisse potentiellement défier la puissance israélienne, il faut donc l’éliminer.
Vous avez été un haut gradé de la CIA et vous êtes un expert averti en géopolitique. Ne pensez-vous pas que nous avons besoin d’un monde multipolaire débarrassé de l’hégémonie américaine ?
Oui, nous avons besoin d’un monde multipolaire tel que décrit par Vladimir Poutine et d’autres, et je crois qu’il est en train d’arriver car les États-Unis sont de plus en plus considérés comme un paria et même comme une menace par de nombreuses nations.
Interview réalisée par Mohsen Abdelmoumen
Qui est Philip Giraldi ?
Philip Giraldi est une autorité reconnue en matière de sécurité internationale et de lutte contre le terrorisme. Ancien spécialiste de la lutte contre le terrorisme et officier du renseignement militaire de la CIA, il a servi pendant dix-huit ans à l’étranger, en Turquie, en Italie, en Allemagne et en Espagne. Il a été chef de la base de Barcelone de 1989 à 1992, désigné comme haut responsable de l’Agence pour assurer la sécurité des Jeux olympiques. Depuis 1992, il est consultant pour un certain nombre d’entreprises figurant au classement de Fortune 500.
Phil Giraldi est actuellement directeur exécutif du Council for the National Interest (CNI), une organisation non partisane à but non lucratif qui plaide en faveur de politiques au Moyen-Orient qui servent l’intérêt national US. Le CNI cherche à encourager et à promouvoir une politique étrangère américaine au Moyen-Orient qui soit cohérente avec les valeurs américaines, qui protège ses intérêts nationaux et qui contribue à une solution juste du conflit israélo-arabe. L’objectif de CNI est de restaurer un environnement politique en Amérique dans lequel les électeurs et leurs représentants élus sont libres de l’influence et de la pression abusives des pays étrangers et de leurs partisans.
M. Giraldi est titulaire d’une maîtrise et d’un doctorat en histoire européenne de l’université de Londres et d’une licence en arts avec mention de l’université de Chicago. Il parle espagnol, italien, allemand et turc.
Ses articles sur le terrorisme, le renseignement et les questions de sécurité sont régulièrement publiés dans le magazine The American Conservative, le Huffington Post et Antiwar.com. Il a écrit des articles d’opinion pour les journaux du groupe Hearst et est apparu à l’émission « Good Morning America », sur la chaîne MSNBC, à la National Public Radio et dans les filiales locales de la chaîne de télévision ABC. Il a été l’orateur principal lors de la réunion annuelle du Conseil de sécurité de l’industrie pétrolière, a pris la parole à deux reprises lors de la convention annuelle CPAC de l’American Conservative Union à Washington et s’est adressé à plusieurs membres du Conseil des affaires mondiales. Il a été interviewé par la Canadian Broadcasting Corporation, la British Broadcasting Corporation, l’Independent Television Network britannique, FOX News, la télévision nationale polonaise, la télévision nationale croate, Al-Jazeera, Al-Arabiya, 60 Minutes et d’autres médias nationaux et internationaux.
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