Le 31 janvier au petit matin, les enquêteurs se sont rendus aux domiciles de Karim Tadjeddine, ancien directeur associé du cabinet de conseil, et de Mathieu Maucort, ancien consultant du cabinet, ex-responsable argumentaire de la campagne d'Emmanuel Macron en 2017 et désormais délégué interministériel à la jeunesse auprès de la Première ministre, dans le cadre des enquêtes lancées par le parquet national financier (PNF).
Contactés, les deux principaux intéressés n'ont pas souhaité commenter.
Les perquisitions ont eu lieu dans le cadre de l'information judiciaire sur le rôle des cabinets de conseil dans les campagnes électorales, a confirmé une source judiciaire.
Ces anciens consultants ont été mentionnés dans plusieurs plaintes et signalements au PNF dans le cadre de ce qui est devenu l’affaire McKinsey. Les interrogations sur le rôle du cabinet auprès d'Emmanuel Macron et de l'exécutif sont allées croissantes depuis les premières révélations de POLITICO sur les conseils apportés par le cabinet auprès du gouvernement dès janvier 2021.
Longtemps directeur associé du pôle secteur public au sein de McKinsey, Karim Tadjeddine avait été auditionné dans le cadre d’une enquête sénatoriale sur l’influence des cabinets de conseil qui l’avait mise en difficulté, notamment sur les prestations de son employeur pour le compte de l’Education nationale.
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Sollicités, ni Me Vincent Brenot, avocat chez August Debouzy et conseil de McKinsey, ni la communication du cabinet n’ont souhaité commenter sur les évolutions de l’affaire et ces nouvelles perquisitions.
Quatre affaires en cours
Dans la foulée de l’enquête sénatoriale, qui avait provoqué un tollé en pleine campagne en 2022, plusieurs signalements d’élus, d’associations, de syndicats ont été adressés au PNF, qui instruit depuis trois enquêtes.
Un premier volet judiciaire porte sur la situation fiscale de McKinsey, qui avait été perquisitionné en mai dernier dans le cadre d’une enquête ouverte pour "blanchiment aggravé de fraude fiscale". Le Sénat a en effet révélé que le groupe n'a longtemps pas payé d’impôt sur les sociétés en France, où il réalise un important chiffre d’affaires. Le cabinet avait alors affirmé "[respecter] les règles fiscales et sociales françaises qui lui sont applicables".
Deux autres informations judiciaires ont ensuite été ouvertes en octobre dernier par le PNF sur un volet plus politique.
L’une porte sur des chefs de “tenue non conforme de comptes de campagne et minoration d'éléments comptables dans un compte de campagne, portant sur les conditions d'intervention de cabinets de conseils dans les campagnes électorales de 2017 et 2022”.
La seconde a été ouverte pour favoritisme et recel de favoritisme, à laquelle s’ajoutent les chefs de “corruption, trafic d’influence, abus de confiance” et de “détournement de fonds publics”, d’après les dernières informations obtenues par L’Obs et POLITICO.
Après une fuite du Parisien révélant une partie des motifs des enquêtes, des perquisitions avaient eu lieu au siège du parti Renaissance ainsi que dans les locaux de McKinsey à Paris en décembre.
Le parquet de Paris poursuit en parallèle ses travaux sur la plainte du Sénat pour faux témoignage à l’encontre de Karim Tadjeddine — qui a depuis quitté McKinsey pour rejoindre le fonds Partech.
"Toujours été intéressé par la politique"
Maucort avait rejoint dès 2017 l'équipe de campagne d’Emmanuel Macron après avoir été chef de projet chez McKinsey depuis quatre ans. Responsable de l’argumentaire et de la riposte dans l’équipe du candidat, le consultant était devenu directeur de cabinet adjoint de Mounir Mahjoubi après la victoire d’En marche en 2017.
L’ex-secrétaire d’Etat au numérique et son équipe avaient travaillé à la popularisation du concept "Tech for Good", censé mettre le numérique au service du bien commun. Sous cette même expression, le président avait organisé un sommet à l’Elysée et reçu des grands patrons du secteur de la tech, aidé de manière pro bono par des consultants de McKinsey, dont Karim Tadjedinne.
"C’est des gars qui ont toujours été intéressés par la politique, mais [étaient] désespérés des partis, Macron c’était leur superhéros", affirme un ex-conseiller de Bercy qui les a tous deux côtoyés à l'époque.
Maucort est ensuite retourné vers le privé en se lançant dans l’entrepreneuriat et le conseil, d’après son profil LinkedIn. Il était revenu un an plus tard dans le public comme directeur de cabinet de Thibaut Guilluy, haut-commissaire à l’emploi et à l’engagement des entreprises, avant d’être promu récemment au poste de délégué interministériel à la jeunesse auprès d’Elisabeth Borne.
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