03 décembre 2022

Ivre de lui-même, l’Occident est pris de « delirium tremens »

Cette semaine, nous nous prenons un gros coup derrière la tête : la BCE souhaite généraliser le recours aux taux variables pour financer les prêts immobiliers ! Oui, vous avez bien lu. Cette décision va totalement à l’encontre de la tradition française du secteur bancaire. En effet, contrairement par exemple au Royaume-Uni, nous nous distinguons des autres pays européens par nos efforts à proposer des taux d’intérêts fixes aux ménages qui font leurs acquisitions immobilières. Cependant, la Banque centrale européenne pique sa crise : dans un contexte de taux de crédits plafonnés par le taux d’usure, elle encourage à présent les banques de second rang (qui ne sont décidément plus que les courroies de transmission, ou les filiales, de Francfort) à proposer à nouveau des crédits à taux variables et l’on commence déjà à observer leur retour ! Ce type de crédit, généralement indexé sur le taux de crédit bancaire EURIBOR, permet en effet aux banques d’engranger davantage d'intérêts au gré du resserrement monétaire des banquiers centraux européens.

En privilégiant les taux fixes, les banques françaises avaient en effet vu fondre leurs marges, les taux de refinancement auprès de la BCE dépassant souvent les taux d’intérêt pratiqués en prêtant aux particuliers. Néanmoins, les banques compensaient déjà, bien évidemment, ces pertes par d’autres sources de revenus. Pour le dire vite, tant qu’un taux est fixe, ce sont les banques qui assument l’essentiel des risques liés à l’octroi de crédit immobilier (on parle de financement intermédié). La vraie révolution qu’est donc en train d’impulser la BCE est que ce retour des taux variables transfère le risque aux emprunteurs, ce qui peut in fine s’avérer très dangereux pour la stabilité du système financier, surtout par temps, et nous en traversons un, de remontée rapide du taux directeur. Christine, gare à l’effet boomerang !

Le chiffre de la semaine

30 $

L’UE doit interdire la quasi totalité des importations de pétrole russe dans l’Union lundi prochain, mesure qui devrait être couplée à un plafonnement international du prix des exportations russes. Cependant, à quelques jours de l’entrée en vigueur de ces mesures, l’ensemble des États-membres ne s’étaient pas encore mis d’accord sur le prix-plafond. L’Union européenne a travaillé le dossier avec les pays du G7, lesquels ont plaidé pour un plafond de 65 à 70 $ le baril. Nous apprenons au moment de conclure ce 21ème Hebdo que l’UE valide finalement un plafond à 60 $, de nature à « favoriser l’efficacité de [son] embargo ». Mais l’UE sait-elle que tout mécanisme empêchant la flexibilité des prix, à la baisse comme ici à la hausse, engendre immanquablement déséquilibres, désajustements, ruptures des chaînes d’approvisionnement, pénuries et rationnements sur les marchés ? Sait-elle qu’elle se meut insensiblement en « UERSS » ? 

Afin tout à la fois de permettre au pétrole russe de continuer à circuler tout en réduisant la capacité de Moscou à financer son opération spéciale, les Polonais avaient proposé un plafond à 30 $. On se demande pourquoi certains n’ont pas proposé un seuil à zéro. Je ne sais pas vous, mais je les trouve timides en ce moment nos eurocrates…

La déclaration de la semaine

« Les investissements sont la clé d’une future reprise économique rapide et efficace de Kiev. » Yuliia Svyrydenko

Cette semaine le gouvernement ukrainien, par l’intermédiaire de son ministre de l’Économie, Yuliia Svyrydenko, a annoncé avoir donné carte blanche à BlackRock (dont nous parlons ici) pour gérer tous les investissements futurs dans le pays ! Cet accord prévoit notamment le développement « d’une plateforme spéciale visant à attirer des capitaux privés pour la reprise et le soutien de l’économie ukrainienne », laquelle devrait se concentrer sur la mobilisation des investissements dans quelques secteurs clés.

D’après nos informations, cet accord, signé nuitamment à Washington DC, autoriserait directement le plus gros gestionnaire d’actifs au monde à consulter le ministère de l’Économie ukrainien pour bâtir une feuille de route aux fins d’attirer des investissements publics et privés en Ukraine. Une telle proximité rend vraiment invraisemblable la rumeur selon laquelle le même gestionnaire pourrait avoir son mot à dire dans la collecte, en France cette fois, des cotisations Agirc-Arrco.

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