14 novembre 2022

Aux Mid-terms américaines, le feu couve sous la cendre des résultats

Sous le psychodrame de la demi-défaite démocrate, Yves-Marie Adeline voit une démocratie bloquée.

Les Démocrates américains, qui ont certes dû céder du terrain aux Républicains, se réjouissent de n’avoir pas eu à subir un raz-de-marée de leurs adversaires aux élections de mi-mandat, sans réaliser ce qui se manifeste derrière ce quasi-immobilisme des positions : à quelques points près, on en reste à deux moitiés quasiment égales, comme on l’avait vu il y a deux ans.

Le jeu de l’alternance est-il bloqué aux Etats-Unis? 

 Ce qui serait une bonne nouvelle pour la « démocratie », en tout cas pour la vie politique, ce serait au contraire que puissent se produire de temps à autre des mouvements de bascule bien nets, penchant d’un côté ou de l’autre, car cela signifierait que des électeurs sont encore capables de changer d’avis par rapport à leur position précédente. Peu importe dans quel camp on se range, il convient de retenir ceci : la vie politique américaine est devenue très dangereuse pour la paix civile – comme au Brésil d’ailleurs, où la dernière élection présidentielle a montré deux moitiés de la population se faisant face dans un climat de haine réciproque. Ce que nous avons publié ici de la menace d’implosion américaine[1] se confirme avec ce dernier scrutin.

 En effet, comment se peut-il que les positions démocrates aient si bien tenu, avec un Président dont personne, quelle que soit son appartenance politique, ne peut ignorer qu’il est sénile et inapte à gouverner le pays ? Comment peut-on s’expliquer que la gestion de la grippe chinoise, très interventionniste dans les Etats démocrates, ou au contraire très souple dans des Etats républicains comme la Floride, n’ait eu, dans un cas comme dans l’autre, aucune incidence sur le scrutin ? C’est qu’au fond, peu importe la politique adoptée par les leaders des deux camps, les électeurs s’enferment dans une attitude radicale qui les fige, et refusent toute possibilité de dialogue, de réflexion, de remise en question.

Un climat d’avant-guerre civile s’installe, aggravé encore par l’impossibilité de réformer des règles électorales soit obsolètes – datant de l’époque des cow-boys – soit au contraire trop aventureuses, comme le vote électronique, que l’on s’interdit chez nous parce qu’il ne peut être  sérieusement garanti contre le piratage, quand on songe que le site du Pentagone lui-même a pu être piraté[2]. Cette fois-ci, pour l’instant, on n’entend pas trop de contestations de la sincérité du scrutin (contrairement au Brésil où l’armée s’est réservé le droit de vérifier le comptage), même en Pennsylvanie où des électeurs ont pu voter avant l’ouverture des bureaux de vote et où un démocrate mort a été triomphalement réélu[3].

Peu importe au fond : ce qu’il faut retenir de ce scrutin, c’est le gel des positions, fixant l’opinion en deux moitiés tellement hostiles qu’elles ne s’adressent plus la parole, ne fût-ce que pour s’insulter face à face dans la vie quotidienne. Ce sont ces deux moitiés égales qui inquiètent : si encore la politique avait tourné à la domination brutale d’une minorité par la majorité, on aurait pu éventuellement le déplorer, mais un certain équilibre se fût maintenu. Au contraire, l’apparition en 2016 – Quand M. Trump a balayé les caciques républicains démocrato-compatibles – de deux Amériques semblant irréconciliables, augure mal de l’avenir.

[1] Le 4 août 2022.

[2] Par exemple en 1999 par un adolescent de 15 ans, Jonathan James, et il en eut d’autres.

[3] Rappelons tout de même qu’aujourd’hui, 60% des Américains, donc plus que la partie républicaine, pensent que la présidentielle de 2020 a été fraudée.

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