19 mars 2022

Les maîtres de la manipulation de masse

Agissant dans l’ombre ou dans la lumière, les maîtres de la manipulation conçoivent chaque jour des techniques de persuasion qui bouleversent nos comportements. Parce que la communication persuasive est omniprésente, dictant parfois aux individus leurs envies et leurs besoins, faisant et défaisant leurs consentements, la team We Are COM a décidé de dédier un atelier du club We Are COM aux fondements de cet art de la manipulation.

Et pour nous éclairer, qui de mieux que l’expert en matière de phénomènes de manipulation de masse et de propagande, David Colon ? Cet historien a passé en revue le parcours et les exploits des 20 plus grands professionnels de la manipulation du siècle dernier, dans son ouvrage Les maîtres de la manipulation, un siècle de persuasion de masse.

Alors, de quelle manière les grands manipulateurs du XXème siècle sont parvenus à révolutionner la communication persuasive ? Quels enseignements tirer de ces pionniers ? Cet atelier inspirant du Club We Are COM a été l’occasion pour nous communicants, de ne pas se raconter d’histoires, mais de se raconter l’histoire de nos métiers. C’est parti pour une leçon de communication, dispensée par le professeur David Colon !

David Colon est professeur à Sciences Po Paris, où il enseigne notamment l’histoire de la propagande et des techniques de communication persuasive. Cet historien est également chercheur au Centre d’histoire de Sciences Po (CHSP). En 2019, il reçoit le prix Akropolis et en 2020, le prix Jacques Ellul, pour son ouvrage Propagande.

Bonjour David, pour commencer nous sommes curieux. Quelle est votre définition de la manipulation et votre vision de la persuasion invisible.

David Colon : Je définirais la manipulation de masse comme une forme de persuasion qui agit sur les conduites d’un grand nombre d’individus à leur insu. En d’autres termes, cela correspond à la « persuasion invisible », décrite en  1957 par Vance Packard dans son best-seller The Hidden Persuaders. La manipulation de masse apparaît alors comme le produit de l’industrie publicitaire et des « ingénieurs des âmes » de Madison Avenue. La persuasion invisible repose sur deux grandes approches :

  • Une approche scientifique, celle des KPIs, qui se fonde sur des indicateurs, des études de marché et des tests systématiques. 
  • Une approche par la recherche des mobiles (ou recherche des motivations), qui caractérise tout particulièrement le grand prophète de la consommation de masse, le psychologue Ernest Dichter. Cette approche, qui impressionnait déjà beaucoup à l’époque, est selon moi, toujours aussi déterminante aujourd’hui. 

Quel est le profil type du serial manipulateur ? S’agit-il d’une compétition d’hommes ? Quels sont les points communs de leurs stratégies ?

David Colon : À vrai dire, aux débuts de mon travail préparatoire pour ce livre, j’avais élaboré un corpus quarante personnages. À mesure que mes recherches avançaient, j’ai identifié des points communs à certains de ces maîtres de la manipulation. Pour finir, j’ai choisi de ne retenir que les vingt personnages possédant ces quatre caractéristiques :

  • La volonté délibérée de manipuler les masses.
  • La capacité à manipuler ces masses, le plus souvent par le biais de leur situation : spin doctor, cinéaste, directeur d’agence, directeur de média…
  • Les effets qu’ils sont parvenus à produire. Des études précises permettent aujourd’hui de démontrer l’efficacité des campagnes de manipulation passées.
  • La démarche scientifique, qui les amenait à tirer bénéfice des progrès des sciences et des technologies, pour en appliquer les principes à la persuasion. 

Cependant, en termes de personnalités, nous observons des profils très variés. Certains cherchent ardemment la lumière, tandis que d’autres préfèrent agir dans l’ombre. Edward Bernays se présentait lui-même comme un « manipulateur de masse », sans pour autant toujours convaincre de l’efficacité de son action. Albert Lasker et John W. Hill, qui ont été deux  hommes parmi les plus influents du XXème siècle, prenaient grand soin au contraire de rester dans l’ombre.

🎞 Quelles sont pour vous les grandes évolutions historiques de l’art de la persuasion de masse ? Comment s’est-elle professionnalisée au fil des années ?

David Colon : La persuasion de masse est née aux Etats-Unis, au début du XXème siècle. Cette nation reposant sur le mythe du progrès et du partage des richesses, était la plus grande puissance économique, mais aussi la plus grande démocratie et la plus grande puissance industrielle de l’époque. L’industrialisation de masse et l’avènement des marchés politiques et économiques ont donc tout naturellement favorisé la naissance de nouveaux produits et nouveaux métiers. Y apparaissent alors la publicité scientifique, le marketing, les relations publiques, les sondages et les grandes théories de la communication.

Plus concrètement, la professionnalisation de la persuasion de masse émane d’un continuum historique, dès lors que la communication est devenue une science appliquée, visant à engendrer un comportement (vote, clic, achat). Afin d’atteindre ces objectifs, il était nécessaire de s’appuyer sur les principes tirés des progrès des sciences ou des techniques. Je dirais que ces progrès étaient davantage incrémentaux au XXème siècle et sont devenus plus récemment exponentiels, avec l’avènement du numérique, du Big data et de ce que l’on nomme « l’intelligence artificielle ».

Les géants actuels de la Silicon Valley sont les héritiers directs de ce continuum historique. Ils ont construit leur force persuasive en s’employant à tirer profit d’un siècle de persuasion de masse et de théories de la communication.

La professionnalisation de la persuasion de masse émane d’un continuum historique, dès lors que la communication est devenue une science appliquée, visant à engendrer un comportement

Nous, communicants, sommes-nous tous des manipulateurs dans la mesure où nous avons recours à la persuasion pour agir sur les conduites des individus ?

David Colon : Ernest Dichter affirmait que la persuasion de masse s’apparentait en quelque sorte à un couteau, avec lequel on peut faire le bien ou le mal. C’est une manière de présenter la communication comme étrangère par essence à toute considération morale : elle est un outil, au service des buts poursuivis par le client des maîtres de la manipulation.

Toutefois, si nous nous penchons sur le parcours de ces derniers, nous observons qu’ils ont, pour la plupart, porté leur réflexion sur la question de l’éthique. Selon Ivy Lee, l’éthique du communicant repose sur la transparence et donc la volonté de dévoiler au nom de qui un discours est mis en place. Ce maître de la manipulation considérait également que la communication devait être à double sens, avec le principe du « two-way street ». Il ne s’agissait pas, par exemple, de manipuler uniquement l’opinion publique pour qu’elle approuve Rockfeller, alors perçu comme un capitaliste prédateur. Il s’agissait également de convaincre cet industriel de changer d’attitude, envers ses salariés ou les journalistes. De la même manière, lorsqu’il a été recruté par l’Allemagne nazie, Ivy Lee s’est défendu en déclarant avoir l’espoir de faire de modifier l’attitude de ces derniers. Tout cela traduit l’idéalisme du personnage.

D’autres maîtres de la manipulation estimaient que l’éthique de la communication devait reposer uniquement sur le but recherché. La communication est morale dès-lors que le but recherché l’est. Pourtant, Edward Bernays, à l’origine de très célèbres campagnes pour le tabac dans les années 1920, avait déjà connaissance du caractère cancérigène du produit. Ce n’est que très tardivement, dans les années 1960, qu’il a changé son fusil d’épaule.

Ernest Dichter affirmait que la persuasion de masse s’apparentait en quelques sorte à un couteau, avec lequel on peut faire le bien ou le mal

Est-ce en partie le rôle de l’entreprise que de chercher à manipuler l’opinion publique ? La persuasion de masse peut-elle être morale en dehors d’organisations à but non lucratif ?

David Colon : Selon moi, deux types d’entreprises ont recours aux techniques de manipulation de masse.

D’une part, les entreprises de grande consommation, confrontées dès les années 1920 à la situation complexe de la surproduction. Alors que les capacités de production surpassaient les capacités de vente, il devenait indispensable de percer les secrets de la persuasion commerciale et de la publicité scientifique. Pour ces entreprises, le recours aux maîtres de la manipulation est resté vital. En effet, pour qu’un produit de grande consommation se démarque de ses concurrents, souvent identiques, il lui faut opérer la stratégie de l’ « unique selling proposition » (USP). Ce qu’Ernest Dichter a fait pour Esso, avec l’accroche « Put a tiger in your tank ». Autrement dit, vous n’achetez pas de l’essence, vous achetez de la puissance. Jouant sur le même principe, ce dernier conseillait de ne pas vendre aux femmes des chaussures, mais de jolis pieds.

D’autre part, les industries productrices d’externalités négatives ne peuvent pas, elles non plus, faire l’impasse sur la manipulation des consommateurs. C’était le cas de l’industrie du tabac, qui avait confié le plus gros budget de communication de l’histoire de l’humanité à John W. Hill, afin qu’il contre l’impact des études scientifiques sur l’opinion publique, en semant le doute sur la nocivité du produit. C’est aujourd’hui toujours le cas des entreprises polluantes qui, sans recourir à la manipulation des masses, ne seraient vraisemblablement pas en mesure de poursuivre leurs activités.

En ce qui concerne les organisations à but non lucratif, sont-elles morales par essence ? Je ne le pense pas. Certaines ONG, par exemple, ont recours à des techniques de manipulation, même si leurs intentions sont bonnes. Cela renvoie au concept du « nudge » : faire le bien des individus à leur insu. Ajoutons que très souvent, une organisation à but non lucratif peut masquer les intérêts d’une industrie, ou encore être manipulée pour servir les intérêts de cette dernière, sans nécessairement le savoir.

Comment percevez-vous l’évolution des procédés persuasifs numériques, depuis l’avènement d’internet, de la data et des réseaux sociaux ? En quoi Facebook est-il véritablement une innovation de rupture ?

David Colon : Facebook constitue une véritable innovation de rupture, dont la croissance s’est appuyée sur les technologies persuasives de B.J Fogg. Ses élèves de Stanford ont d’ailleurs grandement rejoint les growth teams de Facebook. L’objectif de la plateforme à ses débuts était de rendre accros les utilisateurs au produit numérique, afin de les pousser à s’engager et encourager leur entourage à le faire.

Au cours des années 2006 et 2007, Facebook a été monétisé. Or, cette monétisation est celle de ses utilisateurs et de l’analyse prédictive leurs comportements, par le biais de collectes extrêmement massives de données. Cette analyse repose sur trois approches principales :

  • L’approche inductive, où les analystes de la plateforme infèrent des probabilités à partir des données dont ils disposent.
  • L’approche déductive, qui est lagrande particularité de Facebook, et sa force, puisqu’elle rend possible l’étude des comportements des utilisateurs à grande échelle. En effet, Facebook teste et brevette nombre de dispositifs persuasifs et les expérimente sur ses utilisateurs.
  • L’approche d’apprentissage profond, plus communément appelée l’intelligence artificielle. Il est désormais possible d’identifier des traits de caractère, des traits de personnalité ou encore des traits psychologiques sur la simple analyse des individus en temps réel : leurs photos, leurs publications, leur manière de taper un message…

Le cœur du réacteur de Facebook est constitué des équipes d’analystes et d’ingénieurs qui s’emploient quotidiennement à monétiser toutes ces découvertes relatives aux relations sociales et à la communication persuasive. Et ce, dans un cadre visant essentiellement à générer des profits.

Aujourd’hui, il est possible d’analyser de manière empirique le comportement des individus, tout en croisant ces comportements avec des caractéristiques psychologiques. C’est précisément là que se trouve la grande révolution, celle de la segmentation psychologique du marché. La célèbre expression « Code is law », de Lawrence Lessig, prend ici tout son sens. Ce professeur de Harvard a été le premier à identifier les deux principales caractéristiques des systèmes numériques, à savoir l’immédiateté et l’universalité. En effet, le numérique a engendré cette évolution phénoménale, celle de pouvoir agir sur les comportements de manière à la fois immédiate et universelle. L’invention du bouton « like » ou celui de « partage » restent des innovations tout à fait dérisoires d’un point de vue technologique, une succession de lignes de code. Toutefois, ces lignes de code ont bouleversé nos vies. Le bouton « partage » ayant par exemple une responsabilité considérable dans la diffusion de la haine et des théories du complot.

Le numérique a engendré cette évolution phénoménale, celle de pouvoir agir sur les comportements de manière à la fois immédiate et universelle

Existe-t-il un contre-pouvoir de la part de la « masse » ? De la part des annonceurs ?

David Colon : J’ai conscience que la voie de la réglementation peut mener à une impasse. Condamnant telle ou telle entreprise à verser 4% de son chiffre d’affaires annuel parce qu’elle a eu recours à la manipulation de masse a peu de chance de dissuader l’entreprise au vu des bénéfices générés par l’infraction. En outre, comment espérer démontrer le recours à ladite manipulation, dès-lors que les systèmes algorithmiques relèvent du secret industriel ?

En revanche, il y a une autre piste intéressante. Lorsqu’il a été constaté que les outils de Facebook étaient utilisés au Moyen-Orient pour favoriser le trafic d’êtres humains, il a suffi qu’Apple menace Facebook de supprimer ses applications de son AppStore pour que des corrections soient apportées. Les sommes en jeu étaient en effet bien plus colossales qu’une hypothétique amende de la Commission européenne. Par conséquent, un pouvoir s’offre à nous, celui inventé par des agriculteurs irlandais du XIXème siècle : le boycott. Lancer à grande échelle un boycott des fabricants de téléphone qui acceptent d’héberger des applications qui recourent à la manipulation pourrait avoir un grand impact.

Il est également envisageable de mobiliser les ingénieurs et data analysts de la Silicon Valley, qui de plus en plus prennent de la distance par rapport aux effets délétères de la manipulation numérique, constatés sur les individus et les sociétés. La masse a encore son mot à dire, tout n’est pas tout à fait perdu ! 

Quels seront, selon vous, les prochains défis des communicants au service des entreprises, à l’ère de la micropersuasion ? Avez-vous des conseils à partager ?

David Colon : Plus que jamais l’enjeu est, me semble-t-il, celui de l’éthique et de la responsabilité. Il est important de s’interroger sur le sens que nous donnons à ces deux termes à la mode dans le monde de la communication. Qu’est-ce qu’une communication éthique et responsable ? Faut-il bannir la segmentation psychologique du marché, l’exploitation de la vulnérabilité des individus par des biais cognitifs ? Faut-il bannir un certain nombre d’outils jugés intrusifs ? Faut-il faire preuve de transparence en ce qui concerne les stratégies de communication et les tactiques de persuasion qui en découlent ? Pour finir, j’ajouterai que l’éthique en matière de communication persuasive consiste certainement à laisser un individu être libre de ne pas être persuadé par un discours manipulateur.

L’éthique en matière de communication persuasive consiste certainement à laisser un individu être libre de ne pas être persuadé par un discours manipulateur

Votre livre retrace l’histoire de 20 maîtres de la manipulation, s’il devait y en avoir un 21ème, qui serait-il ?

Le 21ème maître de la manipulation que j’aurais souhaité évoquer ici est une femme, Leni Riefenstahl, réalisatrice, photographe et actrice allemande. Malheureusement, son profil ne correspondant pas aux quatre critères de sélection, j’ai du me résoudre à l’évincer de l’ouvrage. Leni Riefenstahl est une manipulatrice certes, mais à une échelle davantage individuelle. Ce fascinant personnage est parvenu à s’imposer dans des milieux extraordinairement sexistes et masculins, celui du cinéma et surtout celui du nazisme. Cela dit, elle n’a jamais revendiqué sa volonté claire et affirmée de manipuler les masses auprès du régime totalitaire. Et ses films ont eu très peu d’impact à l’époque du nazisme. La manipulation qu’était la sienne a plutôt été mise en œuvre après la guerre, lorsqu’elle a dû masquer son engagement auprès des nazis et dissimuler sa complicité dans certains crimes contre l’humanité. Une personnalité à aborder peut-être dans un prochain livre…

Vous en voulez plus ? On rembobine

Les origines de l’art manipulatoire remontent à la Grèce antique et leur art oratoire si perfectionné, la rhétorique. Le grand Aristote définissait cette dernière en ces termes « la faculté de considérer, pour chaque question, ce qui peut être propre à persuader ». Les procédés et techniques de la rhétorique, restés intemporelles, sont au fondement de toute action de persuasion.

C’est au XXème siècle que s’opère un tournant majeur dans l’histoire de la persuasion, la manipulation jusqu’alors oratoire, se meut en science appliquée. Extraordinaire industrialisation, consommation de masse, élections démocratiques… Les campagnes publicitaires et politiques nécessitent une mise en application des théories de la persuasion de masse. Les maîtres de la manipulation ont désormais le devoir de tout mettre en œuvre pour concevoir et perfectionner les techniques et les stratégies persuasives les plus efficaces. Ainsi sont nées, au Etats-Unis, les sciences de la Communication et du Marketing, très rapidement exportées vers la France et le reste de l’Europe. Petit tour d’horizon sur quelques uns des grands maitres de la manipulation.

Les maîtres de la manipulation : Ivy Lee, Georges Creel, Albert Lasker et Edward Bernays

Ivy Lee, le pionnier

En effet, Ivy Lee n’est autre que le pionner des relations presse, qui est parvenu à convaincre les entreprises des bienfaits de la communication médiatique. Il est l’auteur du tout premier communiqué de presse de l’histoire, utilisant les leaders d’opinion à des fins stratégiques. Celui qui se qualifiait lui-même de « Docteur en publicité », pose également les fondements de la communication de crise : réactivité, empathie et transparence. Cela dit, pour Ivy Lee, le principe de transparence était assez relatif, remodelant davantage la vérité que l’exposant clairement. Son innovation ? Le « two way street », une communication à double sens visant à instaurer la confiance du grand public envers les entreprises.

Edward Bernays, le père des relations publiques

Quelques années plus tard, le publicitaire Edward Bernays se démarque lui aussi. A contrario de nombre de ses confrères, il ne souhaite pas jouer sur l’aspect qualitatif d’un produit, mais davantage sur les comportements et habitudes des consommateurs. Edward Bernays est connu pour sa capacité à créer de toute pièce des évènements, et générer ainsi de fortes retombées médiatiques. Qualifié par le New-York Times de « père des relations publiques », ce maître de la manipulation est le spécialiste de l’opinion publique. Pour l’anecdote, c’est à Edward Bernay que nous devons également le premier placement produit, lorsqu’il fit dire à Maurice Chevalier « vous avez cette attitude, cette attitude provocante qui me fait me précipiter chez Cartier ».

Les maîtres de la manipulation : Ernest Dichter, David Ogilvy, rosser Reeves et Marcel Bleustein-Blanchet

Ernest Dichter, le ciblage psychologique

Ernest Dichter révolutionne les stratégies publicitaires, lorsqu’en 1939, il porte sa réflexion sur la recherche de motivations. En plaçant les consommateurs au cœur de sa stratégie de persuasion, Ernest Dichter lève le voile sur les désirs inconscients des individus et le caractère pulsionnel de l’acte d’achat. Ce psychologue, expert en marketing, conçoit le premier laboratoire d’anthropologie culturelle appliquée, où les désirs humains étaient explorés, à des fins toujours manipulatoires. Nous lui devons de nombreuses études sur le ciblage psychologique, ainsi que de mémorables slogans, qui le plus souvent, s’appuyaient sur l’émotion.

David Ogilvy, l’appel à la curiosité

Le mythique publicitaire, David Ogilvy, introduit la notion de « story appeal » dans les stratégies de communication. Le principe n’est autre que l’appel à la curiosité des consommateurs, par le biais d’une publicité originale. Pour lui, l’essentiel était de parvenir à mêler créativité et recherches scientifiques, il expérimenta entre autres l’AB testing. David Ogilvy était avant tout attaché à la cohérence et à la consistance de l’image de marque. Il déclarait d’ailleurs « Chaque publicité doit être conçue comme une contribution à l’image de marque ». Ce maître de la manipulation a légué aux communicants de nombreux principes : l’information produit, la formulation d’un bon titre, l’utilisation de témoignages, le pouvoir de la photographie ou encore la répétition et la mise en avant de solution.

Les maîtres de la manipulation : Michel Bongrand, B.J. Fogg, Mark Zuckerberg et Richard Thaler

Mark Zuckerberg, la révolution

En créant Facebook, Mark Zuckerberg révolutionne l’art de la manipulation de masse. Bien plus qu’un réseau social, Facebook est devenu un véritable graphe social capable de cartographier les dynamiques de milliards d’utilisateurs et d’agir sur celles-ci. Ces études comportementales à grande échelle séduisent les annonceurs, Facebook vend alors un outil pour surveiller et prédir. Avec sa stratégie de growth hacking bien menée et son expérience utilisateur addictive, Mark Zuckerberg devient le « premier empereur du numérique ».

Richard Thaler, le « bon » choix

En 2008, Richard Thaler invente le nudge, un concept visant à « rendre le monde meilleur grâce à l’économie comportementale ». Autrement dit, c’est une stratégie de communication incitant les individus à faire le « bon » choix, en recentrant l’utilisateur et son expérience au cœur de la stratégie. L’idée lui vient après avoir acheté un iphone, un achat qu’il considérait comme tout à fait bénéfique, utile et simple d’utilisation. Ce théoricien de la finance comportementale a également souhaité appliquer le nudge aux politiques publiques, en organisant un contexte de choix propice à la « bonne décision ». Le plus de son concept ? Le nudge est peu couteux, peu risqué et très efficace.

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