Voilà qui ne va pas arranger le rythme de la campagne de vaccination, en France mais également dans plusieurs pays européens. Hier après-midi, en effet, la France s’est résolue à emboîter le pas à d’autres membres de l’Union européenne comme les Pays-Bas, l’Italie ou l’Allemagne en décidant de « suspendre par précaution » l’utilisation du vaccin AstraZeneca, dans l’attente d’un avis de l’agence européenne des médicaments (EMA) qui doit être rendu ce jeudi. L’annonce a été faite par Emmanuel Macron en personne à l’occasion de la conférence de presse qu’il a tenue avec Pedro Sanchez lors de son déplacement à Montauban.
Effets secondaires et décès suspects
« Sur la recommandation du ministre de la Santé, en lien avec les
autorités sanitaires françaises, la décision qui a été prise, en
conformité avec notre politique européenne, c’est de suspendre par
précaution la vaccination avec AstraZeneca, en espérant la reprendre la
plus vite possible si l’avis est favorable », a déclaré le chef de
l’Etat.
Une douzaine de pays ont suspendu par précaution l’utilisation du vaccin
AstraZeneca, malgré des campagnes de vaccination poussives, après le
signalement d’effets secondaires « possibles », notamment la formation
de caillots et des décès suspects. La Norvège a ainsi annoncé hier la
mort par hémorragie cérébrale d’une soignante de moins de 50 ans qui
avait été hospitalisée après avoir reçu une injection du vaccin, mais
sans qu’un lien entre les deux puisse être établi à ce stade. C’est le
deuxième cas analogue mortel signalé en quelques jours dans le pays
nordique qui a suspendu jeudi dernier « par précaution » le vaccin
anglo-suédois. La semaine dernière en Autriche, une infirmière de 49 ans
est morte à la suite de «graves troubles de la coagulation.»
Les autorités du Piémont, dans le nord de l’Italie, ont annoncé hier la
saisie d’un lot de 393 600 doses du vaccin à la suite de la mort d’un
homme quelques heures après sa vaccination. Et hier, les
sapeurs-pompiers des Bouches-du-Rhône ont suspendu la vaccination de
leur personnel contre le Covid-19 avec le vaccin AstraZeneca après la
survenue d’effets indésirables chez un pompier…
Le groupe pharmaceutique anglo-suédois a affirmé qu’il n’y a « aucune
preuve de risque aggravé » de caillot sanguin entraîné par son vaccin.
Dans un communiqué publié dimanche, AstraZeneca a indiqué qu’un « examen
attentif de toutes les données de sécurité disponibles sur plus de 17
millions de personnes vaccinées dans l’Union européenne et au
Royaume-Uni » avec son vaccin « n’a apporté aucune preuve d’un risque
accru d’embolie pulmonaire, thrombose veineuse profonde (TVP) ou de
thrombocytopénie dans aucun groupe d’âge, de genre, de lot ou de pays
particulier ».
Hier l’Organisation mondiale de la santé (OMS), qui doit se réunir
aujourd’hui, a estimé qu’il n’y a « pas de raison de ne pas utiliser »
ce vaccin. « Nous ne voulons pas que les gens paniquent et, pour le
moment, nous recommandons que les pays continuent de vacciner avec
AstraZeneca », a déclaré la cheffe scientifique de l’OMS Soumya
Swaminathan.
Hier même ton du côté de l’EMA qui assure que « les avantages
l’emportent toujours sur les risques… ». L’agence a convoqué une réunion
extraordinaire jeudi pour conclure sur les informations recueillies et
sur toute autre mesure qui pourrait être nécessaire.
Problème de défiance et de livraisons
Le vaccin AstraZeneca, massivement utilisé au Royaume-Uni est au centre
de plusieurs polémiques depuis son autorisation par l’EMA fin janvier.
Outre ces effets secondaires qui vont donc faire l’objet d’une analyse
approfondie, son efficacité moindre que celle des autres vaccins
Pfizer-BioNTech et Moderna et ses problèmes de livraisons ont émaillé sa
« carrière ». Samedi encore, le groupe pharmaceutique a annoncé une
baisse des livraisons de doses à l’Union européenne.
Le groupe voit sa responsabilité « engagée », avec « seulement 25 % des
doses livrées » à la fin du premier trimestre, a estimé dimanche la
ministre française déléguée chargée de l’Industrie, Agnès
Pannier-Runacher. La Commission européenne a indiqué poursuivre avec les
États membres les discussions avec AstraZeneca, et insisté pour que
l’entreprise « fasse tout son possible pour honorer ses engagements ».
Le changement de pied de l'exécutif
Le professeur Fischer, le Monsieur Vaccin du gouvernement, Olivier Véran, le ministre de la Santé et le Premier ministre Jean Castex n’ont cessé ces derniers jours d’assurer que le vaccin AstraZeneca – élément clé de la montée en puissance de la campagne vaccinale française – était un vaccin sûr et efficace.Une communication martelée notamment pour convaincre les personnels soignants de se faire vacciner avec.
Dimanche soir encore sur Twitch, Jean Castex assurait qu’il fallait avoir « confiance » dans le vaccin AstraZeneca « sinon on aura des retards dans la vaccination, les Françaises et Français seront moins protégés et la crise sanitaire durera longtemps ».
Suspendues la semaine dernière en raison du nombre limité de lots disponibles, les commandes de vaccins AstraZeneca avaient été rouvertes lundi pour les médecins libéraux français.
Mais face aux décisions de suspension prise ces dernières heures par une série de pays européens à la suite d’effet secondaires, l’exécutif n’a pas eu d’autres choix que de suspendre ce vaccin en France. Le maintenir aurait ajouté à une défiance en voie de devenir insurmontable pour ce vaccin alors même que 50 % des Français sont prêts à se faire vacciner mais jugent.
Hier soir, l’Elysée se voulait rassurante et faisait savoir d’une part que la suspension était une décision concertée, qu’il n’y avait eu aucun cas grave ou décès en France et qu’il fallait maintenant attendre l’avis de l’Agence européenne des médicaments ; et d’autre part que le calendrier de la campagne vaccinale était maintenu.
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