Même si le temps avait passé, ses proches n'avaient pas totalement perdu espoir. « On espérait qu'il avait trouvé un moyen pour aller loin d'ici et repartir de zéro », souffle un de ses amis. Mais Laurent Pasquali, porté disparu depuis novembre 2018, a connu une fin sordide. Ce pilote de course émérite est potentiellement la première victime de l'officine de francs-maçons, démantelée la semaine dernière.
La dépouille de ce spécialiste de course GT a été retrouvée en septembre 2019, enterrée dans un bois de Haute-Loire. Les circonstances de ce crime jusqu'ici impuni sont donc en passe d'être éclaircies. « C'est épouvantable. Il ne méritait pas ça. Personne ne mérite ça », s'émeut le pilote professionnel Anthony Beltoise, qui avait partagé un volant avec lui.La résolution de cette enquête tient beaucoup au hasard. A l'automne 2018, quand Laurent Pasquali, 43 ans, disparaît subitement de son domicile de Levallois-Perret (Hauts-de-Seine), ses proches s'alarment. Le parquet de Nanterre ouvre une enquête pour disparition inquiétante. « On savait qu'il avait deux personnalités, souligne un de ses amis du monde automobile. Il était d'une incroyable générosité, il savait mettre l'ambiance comme personne sur les circuits. C'était un vrai boute-en-train. Mais on savait aussi qu'il avait de gros problèmes d'argent. Parfois il était hyperstressé. »
Dans un premier temps, l'enquête piétine. Mais va connaître un funeste développement quelques mois plus tard à plus de 500 km de là. Le 1er septembre 2019, un promeneur découvre fortuitement un crâne et des ossements dans un bois de la commune de Cistrières (Haute-Loire), au nord du Puy-en-Velay. Le parquet local ouvre une enquête pour recherche des causes de la mort. Les prélèvements ADN permettent d'identifier le défunt : il s'agit de Laurent Pasquali. En mai dernier, le parquet de Nanterre reprend l'affaire et ouvre une information judiciaire pour enlèvement et séquestration suivis de mort. La brigade criminelle de la police judiciaire parisienne est saisie.
Abattu à la sortie de son garage
Mais, là encore, l'enquête va prendre un incroyable détour. En juillet dernier, une spécialiste du coaching d'entreprise échappe à une tentative d'assassinat alors qu'elle s'apprête à quitter son domicile de Créteil (Val-de-Marne). Deux militaires en poste à la DGSE l'attendent, armés, devant chez elle. L'un d'eux reconnaît qu'il a pour mission de la tuer et affirme agir au nom de l'Etat. Plusieurs personnes suspectées d'avoir participé à ce projet sont arrêtées. Mais l'identité du commanditaire demeure inconnue.
La semaine dernière, une nouvelle vague d'interpellations intervient. Daniel B., un ancien commandant de la Direction centrale du renseignement intérieur (DCRI, l'ancêtre de la DGSI), s'épanche. Il raconte faire partie d'un groupuscule de francs-maçons reconvertis dans l'exécution de contrats et reconnaît son implication dans le projet d'assassinat de la coach. Le commanditaire présumé, arrêté dans la foulée, serait un concurrent de la quinquagénaire.
Daniel B. explique ensuite que son officine est déjà passée à l'acte une première fois en s'en prenant à un pilote de course enterré dans une forêt. En l'occurrence Laurent Pasquali. Ce dernier aurait été abattu à la sortie de son garage puis enterré. L'exécuteur présumé de cette sinistre mission est un homme de 30 ans spécialiste de la sécurité privée. Déjà mis en cause dans la tentative d'assassinat de la coach, il lui avait à l'époque envoyé une photo du corps pour prouver son geste. Il s'agissait alors de faire croire à une disparition. Le plan machiavélique avait jusqu'ici parfaitement fonctionné.
« On savait qu'il avait des relations pas très nettes »
Selon Daniel B., ce règlement de comptes serait lié à une histoire de dettes entre la victime et l'un des membres de l'officine, lui aussi arrêté ces derniers jours. « Laurent était certes toujours en quête d'argent pour financer ses courses. On savait qu'il avait des relations pas forcément très nettes mais on ne pouvait pas imaginer qu'il finirait ainsi. C'est atroce », s'indigne un de ses camarades. « C'était un homme très cultivé mais très secret, appuie Gilles Gaignault, le fondateur du site autonewsinfo.com. Il avait la réputation de fréquenter le milieu. »
Originaire de la région parisienne, Laurent Pasquali se faisait parfois passer pour un Corse en raison de son patronyme. « Cela fait partie de son personnage », s'amuse un de ses amis. Célibataire sans enfant, il avait pour unique passion la course auto. En 2008, il avait participé aux 24 heures du Mans. « Il conduisait très très bien, il faisait partie des meilleurs amateurs », salue Anthony Beltoise. En 2011, les deux hommes avaient remporté ensemble le Championnat de France GT sur une Porsche. Deux ans plus tard, ils terminaient seconds.
« C'est un choc terrible d'apprendre son décès, poursuit ce professionnel reconnu. Laurent était tout le temps de bonne humeur. N'ayant plus de nouvelles j'étais évidemment très inquiet. » Le parquet de Nanterre s'apprête à se dessaisir de l'enquête sur la mort de Laurent Pasquali pour la confier à la juge parisienne qui instruit la tentative d'assassinat de Créteil. Les deux histoires, bien que totalement distinctes, sont désormais intimement liées.
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