C’est un article de Médiapart, publié ce 21 janvier, qui révèle le pot aux roses. Sous couvert d’une transposition au droit français d’une directive européenne en date du 26 juin 2019 et portant sur la question de « la restructuration et de l’insolvabilité », le gouvernement français entend détricoter le régime de garantie des salaires, et attaquer l’institution sociale qu’est l’AGS (Association de gestion du régime de garantie de salaire), financée par les cotisations patronales, qui garantit un certains nombres de droits aux salariés dont l’entreprise est placée en liquidation judiciaire, notamment le droit au maintien de salaire. Et Médiapart de préciser que 100.000 personnes voient actuellement leurs salaires versés par l’AGS.
En soi, la fameuse loi PACTE, permettant au gouvernement de légiférer par ordonnance, concerne précisément la transposition dans le droit français de cette directive européenne. Sauf que le contenu même des premiers documents disponibles vont bien au-delà des prérogatives.
Ainsi, comme l’explique Médiapart, « le gouvernement souhaiterait en effet réécrire totalement l’article L.643.8 du Code du commerce et modifier en profondeur les articles L 622.17et L 641.13, qui sont précisément les dispositions légales qui fixent l’ordre des créances et des privilèges ». Ainsi, alors que la mouture actuelle est protectrice envers les salariés, les modifications prévues entendent faire la part belle aux « créances garanties par le privilège de sauvegarde » ou bien encore au « privilège de redressement judiciaire », qui, selon Médiapart, « seraient attribués aux banques ou à tout établissement intervenant pendant la période d’observation » lors de liquidations judiciaires. Ainsi, comme l’explique l’expert social mandaté par Médiapart, « sous prétexte d’une transposition d’une directive européenne des sécurités et en plein désastre économique, le gouvernement prépare deux ordonnances au détriment des salariés pour le bénéfice des administrateurs et mandataires judiciaires ainsi que des banquiers ». Autre changement qui pourrait intervenir, les actifs immobiliers des sommes récupérés par l’AGS, essentiel pour son financement, pourrait être retiré à l’institution au profit des banques.
Autre éléments scandaleux, « si le gouvernement veut dégrader les avantages de l’AGS, qui protègent les salariés, en revanche, il consolide ceux des mandataires et administrateurs judiciaires » explique Médiapart. De quoi augmenter encore un peu plus honoraires de ces derniers, déjà très élevés et fixés en toute opacité.
En ce sens, et toujours selon Médiapart, « la conséquence de tout cela, c’est que l’AGS risque d’être prise dans un étau. Car la rétrogradation du superprivilège pourrait entraîner, selon les experts consultés par Mediapart, une baisse des recettes de l’ordre de 320 millions d’euros en 2021. Or, quand l’État interrompra les mesures exceptionnelles de soutien à l’économie prises pour faire face à la crise sanitaire, les faillites d’entreprises risquent d’augmenter spectaculairement, ce qui sollicitera encore plus la trésorerie de l’AGS ».
Dès lors, c’est une mesure ultra-libérale qui est envisagée par le gouvernement, qui porte son lot de précarisation extrême concernant pour l’heure 100 000 salariés, mais très certainement beaucoup plus alors que 2021 devrait voir se multiplier les faillites et les mises en liquidation judiciaire d’entreprises. Ainsi, la réforme du gouvernement serait prévue pour mai 2021.
C’est ici que l’on voit tout le cynisme de ces ordonnances. L’objectif est avant tout de préserver ceux qui possèdent la dette, les banques, les mandataires et administrateurs financiers alors que l’AGS devrait voir ses finances mises à rudes épreuves dans les prochains mois. Ainsi, c’est par l’amputation ou l’arrêt du versement des salaires des travailleurs victimes de ces liquidations judiciaires que les pots cassés seront payés.
Cette réforme s’inscrit dans la droite ligne de la politique sanitaire et économique du gouvernement depuis le début de la pandémie. Une politique qui a son corollaire avec les plans de licenciements en pagaille qui se succèdent sans discontinuer depuis mars dernier, et qui devrait s’accélérer dans la période qui s’ouvre. C’est pourquoi la bataille pour 0 licenciement, 0 baisse de salaires, de vastes plans d’embauches par la baisse du temps de travail pour lutter efficacement contre le chômage et des moyens humains et matériel pour le service public est absolument centrale.
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