06 novembre 2017

Seigneur, que ces mortels sont fous !


L’or représente la forme de monnaie la plus pure qui soit. L’argent peut lui-aussi faire office de monnaie, bien qu’il soit moins apte que l’or à jouer ce rôle.

La monnaie est, a toujours été, et sera toujours une marchandise. Les bitcoins, ainsi que les dollars et toutes les autres devises qui existent aujourd’hui, ne sont pas et ne peuvent pas être des monnaies, parce qu’elles ne sont pas des marchandises.

En matière de commerce, toutes les marchandises ont ce que l’on appelle une « utilité marginale décroissante », à l’exception d’une seule.

Carl Menger (1840-1921, Vienne) a illustré le phénomène d’utilité marginale décroissante en prenant l’exemple d’un agriculteur propriétaire d’un champ de blé. Supposez qu’il n’obtienne qu’un sac de blé par récolte. Ce sac est pour lui le plus important. Il l’utilise pour nourrir sa famille. Chaque sac de blé additionnel a une application moins importante, le dernier de tous étant utilisé par l’agriculteur pour nourrir son canari.

Plus nous possédons d’un même produit, moins il a de valeur à nos yeux. L’utilité marginale d’un aliment diminue si nous en possédons beaucoup.

L’or est une marchandise : il peut servir à produire des bijoux et des ornements, il a des applications industrielles diverses et il est aussi une monnaie, parce que si nous le recevons comme paiement, nous n’appliquons aucune décote sur la valeur de l’or que nous recevons, peu importe la somme qu’il représente. Nous accordons autant de valeur à notre dernière pièce d’or qu’à notre toute première. En ce sens, l’or est une marchandise exceptionnelle.

L’utilité marginale décroissante de l’or est non-existante. C’est la raison pour laquelle l’or est aussi bien une monnaie qu’une marchandise.

Les bitcoins et les dollars – et toutes les autres devises – ne sont pas des marchandises. Ils ne sont que des nombres sans substance.

Depuis le 15 août 1971, quand le président Nixon a cessé de livrer de l’or aux propriétaires de dollars à qui on avait promis de l’or en échange de leur papier, le monde n’a plus utilisé de monnaie. Il a utilisé de simples nombres, et ces nombres s’élèvent désormais à des trillions et des trillions.

Ce qui s’est produit en 1971 a été une déconnexion entre la faculté rationnelle de l’humanité et la réalité du monde physique.

La fausse monnaie se tient désormais entre nous et le monde physique dans lequel nous vivons.

Les humains peuvent facilement subvenir à leurs besoins dans le monde physique grâce à la monnaie, c’est-à-dire à l’or et, dans une moindre mesure, à l’argent.

A l’heure d’aujourd’hui, l’humanité éprouve des difficultés à maintenir les activités industrielles et commerciales qui ont été établies quand l’or jouait encore le rôle de monnaie. Afin de nous rendre à l’évidence du chaos qui nous entoure, tout ce qu’il nous est nécessaire de faire est de lire les journaux. Le chaos règne aujourd’hui parce que l’humanité n’est plus en contact avec les réalités du monde physique : les activités humaines rationnelles se sont déconnectées de ces réalités par la faute de la fausse monnaie, qui nous sépare désormais du monde physique en fonction duquel nous devrions fonctionner.

Quand nous perdons contact avec la réalité, nous souffrons d’une maladie mentale, nous devenons fous. Le monde est devenu fou, parce qu’il ne peut plus agir de manière rationnelle en raison de la fausse monnaie – des nombres – qui lui donne un accès falsifié à la réalité.

L’existence d’un blocage psychologique, qui consiste en des nombres utilisés comme monnaie, entre une humanité capable de raisonnement et le monde physique, devrait être notre préoccupation première.

Le succès de bitcoin est une excellente illustration de la confusion intellectuelle des masses. Le bitcoin est un nombre digital. Sa seule caractéristique spéciale est qu’il est capable de se déplacer sur internet au sein d’un système précis qui empêche tout accès non-autorisé à des unités bitcoin. Seul le propriétaire d’unités bitcoin peut en dépenser en en envoyant à quelqu’un d’autre. Bitcoin a enregistré une hausse spectaculaire de sa valeur contre le dollar, parce que les gens ont versé des dollars pour obtenir des bitcoin, et qu’ils dépensent toujours plus de dollars pour en obtenir. Est-ce raisonnable ? Les Hommes ne sont pas en mesure de se comporter raisonnablement, parce que le système monétaire actuel, détaché de la réalité, les empêche de penser. Certains spéculateurs sur bitcoin – et j’imagine qu’ils sont nombreux – savent peut-être que ce système finira par s’effondrer, mais espèrent pouvoir en sortir avant qu’il ne le fasse.

Une autre manifestation curieuse des effets intellectuels de ce blocage psychologique est le soutien apporté par des gens dits importants à des projets lunatiques telles que l’établissement d’une colonie humaine sur Mars. Un autre projet lunatique est le contrôle du climat. L’humanité a perdu tout contact avec la réalité à cause de la fausse monnaie. Peut-être les gens les plus sains d’esprit sont-ils ceux qui peuplent les jungles de Nouvelle-Guinée et d’Amazonie – ceux qui n’utilisent pas de monnaie du tout.

La dernière manifestation de la conséquence de la présence d’un blocage psychologique entre l’action humaine et la réalité du monde physique sera inévitablement un effondrement total des conditions de notre monde, qui a de grandes difficultés à préserver les activités industrielles et commerciales qui existaient déjà avant la fin de l’utilisation de l’or comme monnaie en 1971.

Et si par miracle, l’or était de nouveau utilisé comme monnaie à l’échelle du globe, il nous faudrait réfléchir à la manière dont le monde réagirait à ce changement : en viendrait-il à une destruction suicidaire de la race humaine plutôt qu’à une adoption de nouvelles habitudes et une réorganisation de ses priorités ?

Dans son Songe d’une nuit d’été, Shakespeare nous raconte l’histoire d’un groupe d’amants sous le charme d’une fée, qui en vient à s’écrier : « Seigneur, que ces mortels sont fous ! » L’humanité est aujourd’hui victime d’un sort jeté par la fausse monnaie. Espérons que nous finissions par nous réveiller, et que nous en venions un jour à une fin heureuse, comme les amants dans Songe d’une nuit d’été.

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