L’on sait que cette question est largement débattue, essentiellement à cause de la polémique sans fin autour de Trump, de son élection, du Russiagate, de son comportement, etc. Bien évidemment, certaines de ses déclarations, comme celle qu’il a faite à l’ONU où il a menacé la Corée du Nord de destruction totale, renforcent encore plus la démarche. Nous avons déjà abordé le problème à l’une ou l’autre occasion, la dernière étant celle du 20 octobre 2017 où nous présentions et commentions un texte d’Alastair Crooke sur la “doctrine nucléaire du président Trump”. Nous mettions notamment l’accent sur un accès très irrationnel, très psychologique, de la question posée et de la polémique qui s’ensuit, avec une remarque concernant le caractère du président US...
“Trump-Strangelove, est-ce possible ?” (titre de notre article), – « ...Drôle de question à laquelle, malheureusement, il sera nécessaire de répondre : “Dans l’étrange époque où nous vivons, tout, absolument tout est possible, y compris que ce personnage à-la-Kubrick (Strangelove/Folamour) se découvre parmi nous...” [...]
» On trouve, dans l’extrait [ci-dessous] le début de l’analyse, indirectement, des réponses étranges à cette sorte de question extraites dans diverses interviews données par Trump bien avant qu’il ne devienne président. Il s’en dégage comme une sorte de fatalisme, éventuellement fasciné, qu’on pourrait d’ailleurs mettre en corrélation avec sa carrière de milliardaire hanté par la construction des tours toujours plus hautes, toujours plus richement et vulgairement décorées, toujours plus puissantes en un sens. Dans tous ces cas, oui, il y a la fascination de la puissance (l’“idéal de puissance”) selon l’idée qu’autant de puissance (celle contenue dans le nucléaire) ne peut rester inutilisée... D’où cette réponse à la question “où seront vos tours dans une centaine d’années ?” : “Je ne pense pas qu’aucun bâtiment puisse encore subsister, – et à moins d’avoir des gens très intelligents à sa tête, le monde ne sera plus du tout la même chose dans une centaine d’années. Ces armes sont trop puissantes, trop fortes...” (pour compléter : “pour que quelqu’un ne s’en serve pas un jour”). »
Voilà un aspect du problème. Un autre est apparu lors de l’audition du 14 novembre, qui s’est terminée dans l’indécision malgré une poussée importante de quelques sénateurs qui voudraient faire passer un texte privant Trump de son “pouvoir nucléaire”, question pour l'instant laissée en suspens. Les sénateurs ont entendu un ancien général de l’USAF, qui fut de 2011 à 2013 le commandant du Strategic Command (StratCom) dont dépendent toutes les forces nucléaires stratégiques US. Son témoignage n’a pas été l’objet d’une grande publicité car dans le cas de déclarations ou de révélations embarrassantes pour le Système, la presseSystème préfère en général le silence ; ce témoignage est pourtant extraordinaire et stupéfiant, compte tenu du moment, des circonstances solennelles où il se fait, de l’auditoire auquel il s’adresse, de la personnalité et des fonctions qu’a exercées celui qui parle...
Le Général Kehler a déclaré qu’en tant qu’officier général commandant SratCom, il aurait été prêt à refuser un ordre d’activer des missions stratégiques nucléaires s’il avait considéré cet ordre comme “illégal”. Il précise qu’il avait d’ailleurs, littéralement “sous la main”, des experts juridiques qui l’eussent aidé à déterminer l’illégalité de la chose ; là-dessus, il reconnaît l’extraordinaire difficulté de cette tâche de reconnaissance de l’“l’illégalité de l’ordre” puisque cet ordre viendrait par définition du seul homme qui dispose de la légitimité de donner un tel ordre (le président).
Le Guardian du 15 novembre 2017 a rapporté la partie la plus importante de cette déposition. « Retired Gen Robert Kehler, commander of US Strategic Command (StratCom) from 2011 to 2013, told the Senate committee that he would have refused to carry out a nuclear first strike on presidential orders if he believed it did not meet the requirements of proportionality and necessity under the law of armed conflict.
» “I would have said: I’m not ready to proceed,” Kehler said.
» “Then what happens?” he was asked.
» “I don’t know,” he replied. “Fortunately, these are all hypothetical scenarios. There is the human factor in our system. There is a human element to this.
» “It would be a very interesting constitutional situation, I believe. The military is obligated to follow legal orders but is not obligated to follow illegal orders,” Kehler said, adding that he always made sure he had legal advisers at handwhen he was at Strategic Command.
» “If there is an illegal order presented to the military, the military is obligated to refuse to follow it. The question is the process leading to that determination and how you arrive at that. I would concede to you that would be a very difficult process and a very difficult conversation.” »
On doit comprendre la portée de cette déclaration, faisant l’hypothèse très probable que Kehler n’a évidemment pas dit tout cela à la légère. On peut même penser qu’il a même dû prendre la précaution de consulter certains de ses pairs, peut-être bien les “généraux de Trump” (Mattis, Kelly, McMaster), dont on attend en général qu’ils soient la force de contrôle et de maîtrise d’un Trump qui viendrait à décider de lancer une frappe nucléaire.
Comme cela a été dit ici ou là, c’est la première fois depuis 1976 (administration Ford) que le Sénat enquête, ou plutôt “s’informe” (le mot plus souvent employé), sur cette question générale de la prise de décision d’une frappe nucléaire du président des USA. Il semble que cette audition de 1976 suivait les bruits qui avaient couru après août 1974 et la démission de Nixon sur la possibilité que le président, qui se trouvait psychologiquement à bout après près de deux ans de Watergate, pourrait avoir été tenté de prendre des mesures militaires illégales (coup d’État, attaque nucléaire) ; ou bien que des adversaires aient voulu profiter de cette crise pour lancer une attaque, et alors le cas de l’état psychologique du président aurait également joué.
Il ne semble pas que cette audition de 1976 concernait le président en exercice (Ford) mais d’une façon générale le processus de décision en fonction de l’état d’équilibre mental du président. Aujourd’hui, c’est tout différent. On comprend bien que l’initiative concerne Trump lui-même, dont les démocrates et certains républicains estiment qu’il n’est pas, au niveau psychologique, apte à assurer sa fonction, et que cela joue évidemment un rôle fondamental pour ce qui concerne le nucléaire. Il y a même des sénateurs qui veulent une action du Congrès pour priver le président Trump du droit de sa décision d’utilisation du nucléaire ce qui n’était naturellement pas le cas avec Ford, à notre connaissance. (Ces considérations conduisent également un mouvement du côté démocrate demandant sa destitution selon le 25ème amendement de la Constitution.)
Un point intéressant concernant le précédent de 1976 lié au comportement de Nixon au moment de sa démission, est le fait qu’il était connecté à des informations venues du secrétaire à la défense d’alors (1974). James Schlesinger aurait donné dans les dernières semaines avant la démission de Nixon du 9 août 1974 des instructions pour que tous les ordres du président concernant des matières militaires (dont le nucléaire, certes) soient bloqués et passent par lui. Ce cas a été longuement mais discrètement débattu, et il y a eu tout un courant de réaction tendant à faire de faire de cette affaire d’abord une initiative infondée de Schlesinger, concernant des craintes elles-mêmes infondées. C’est ce que plaidait Stanley Kutler, le 1er avril 2014 dans Huffington Post, mettant plutôt la démarche de Schlesinger au débit de son désaccord constant avec Kissinger dans les rapports des USA avec l’URSS.
Quoi qu’il en soit, Schlesinger diffusa un mémo interne destiné à tous les relais, notamment militaires, de sa chaîne de commandement, rappelant que l’autorité suprême restait au président et que la continuité de la présidence était assurée par le remplacement instantanée de Nixon par Ford, au moment où Nixon signait son acte de démission. Ce qui est remarquable, c’est la différence radicale de réactions des chefs militaires en 1976, par rapport à ce qu’on en sait et devine aujourd’hui pour ce qui concerne le cas d’un président Trump ordonnant un tir nucléaire. On l’a vu, Kehler aurait consulté ses conseillers juridiques (cas déjà extraordinaire pour un chef militaire recevant un ordre du président), quasiment dans le but d’arguer de l’“illégalité” de l’ordre, – démarche juridique extraordinairement complexe, si elle est même concevable hors de moyens eux-mêmes illégaux.
Voici, selon Kutler, la réaction de chefs militaires au mémo Schlesinger de 1974, document dont la qualification la plus aimable est qu’il était “inutile” sinon “ridicule”, et la plus courante qu’il était “insultant” parce que, pour les chefs militaires à cette époque, l’obéissance au pouvoir civile est quelque chose qui ne se discutait évidemment pas et n’avait nul besoin d’être rappelé... (On note tout de même, à la fin de l’extrait, la remarque de l’un des deux chefs consultés [en 1986] qui craint une politisation des chefs militaires avec un abaissement radical des conceptions éthiques.)
« When interviewed more than a decade later, military figures reacted sharply. Former Joint Chiefs Chairman Thomas Moorer thought that Schlesinger’s communiqué was “ridiculous,” for no military officer could take action outside “the form of command.” An adjutant at the Readiness Command in Florida thought that Ford’s message was “redundant” and “stated the obvious.” Schlesinger’s message, he believed “was of little interest,” since it stated “what the military do without prodding throughout their careers.”
» General Bruce Palmer, formerly second in command in Vietnam, and then head of the Readiness Command was outraged. He was “irritated” and “resented” the message. Palmer thought it “not only unnecessary, but insulting to our uniformed men and women,” and he blamed it on the overactive imagination of Pentagon staff assistants — carefully avoiding Schlesinger’s name. “Civilian supremacy was bred into me,” Palmer told me. At the time, 1987, Palmer ruefully worried about “a bloated civilian establishment” and a breed of younger officers with little knowledge and understanding of the American Constitution. It was the moment of Iran-contra, and Palmer’s remarks clearly pointed at the then-celebrity Colonel Oliver North and his cohorts, Admiral John Poindexter and Secretary of the Navy John Lehman. »
On mentionnera enfin un autre avis, celui de l’ancien secrétaire à la défense Perry, aujourd’hui âgé de 90 ans, qui estime pour sa part qu’il est impossible que “les généraux de Trump” soient capables de faire quoi que ce soit pour restreindre Trump et le contrôler. Comme on le voit dans l’extrait ci-dessous, Perry connaît bien Mattis et les deux ont abordé le sujet, mais Perry juge que la légalité implique évidemment que le président est placé selon une légitimité absolument incontestable pour décider et que tout doit aller tellement vite qu’il est tout à fait improbable qu’un Mattis puisse faire quelque chose.
« Perry knows Mattis well—while Perry was defense secretary in the 1990s, Mattis worked for him directly, and they both ended up at Stanford University in recent years. The two still talk, and Perry thinks Mattis understands the nuclear threat well—he just doesn’t think Mattis would necessarily be able to do anything if Trump decided to go ahead with a strike.
» Perry’s heard the story of Richard Nixon’s final days in the White House, when Defense Secretary James Schlesinger supposedly told generals that any nuclear strike order from the clearly distressed president be run by him first.
» But that’s not really the way it works, Perry said.
» “The order can go directly from the president to the Strategic Air Command. The defense secretary is not necessarily in that loop. So, in a five- or six- or seven-minute kind of decision, the secretary of defense probably never hears about it until it’s too late. If there is time, and if he does consult the secretary, it’s advisory, just that,” Perry explained. “Whether[the president] goes with it or doesn’t go with it—[the secretary] doesn’t have the authority to stop it.” »
Les derniers mots de Perry (« une sorte de décision [d’ordonner une frappe nucléaire en cas de ce qui est perçu comme une attaque contre les USA] qui doit être prise dans un laps de temps de cinq-six minutes») mentionnent un obstacle considérable et absolument décisif pour ceux des parlementaires qui voudraient transférer la décision d’emploi du nucléaire au Congrès : le temps qui serait nécessaire pour le corps législatif pour prendre cette décision. Certes, ce qui est visé dans la démarche législative la plus extrême de quelques sénateurs anti-Trump, – qui a semble-t-il peu de chances d’aboutir vue sa radicalité, – c’est seulement la décision de lancer une attaque nucléaire non provoquée, et non pas une riposte quasi-instantanée à une attaque.
On comprend pourtant fort bien l’extrême difficulté et le très grand danger qu’il y a à ”saucissonner” la décision de l’emploi, entre le président et le Congrès, selon la forme de cette décision. Il ne s’agit pas d’un sujet qu’on peut modeler selon des circonstances impossibles à déterminer, ni à l’avance ni dans l’instant. Le cas est bien : le président doit-il ou non conserver l’autorité sur l’emploi des armes nucléaires, point final ? Et, bien entendu, une telle décision n’affecterait pas le seul président Trump, mais le présidant des États-Unis quel qu’il soit, le POTUS si l’on veut.
(Même au cas où l’on voudrait tout de même réaliser ce “saucissonnage” improbable, on en reviendrait à la nécessité d’une décision suprême, pour décider, en général en un laps de temps extrêmement court et dans une tension extrême, ce qui est une attaque délibérée par les USA, ou ce qui est une riposte à ce qui est perçu comme une attaque contre les USA ; et qui, finalement, détiendrait ce jugement suprême ? Le président, le Congrès, ou bien encore les conseillers juridiques du chef de StratCom ? Ou bien réunirait-on une conférence des trois ?...)
Dans tous les cas, on comprend combien ce débat en cours désormais au plus haut niveau du pouvoir est une formidable attaque déstructurante contre les principes et les processus de la dissuasion nucléaire. Il est en train d’introduire un facteur de confusion sans précédent sur la mécanique du pouvoir à “D.C.-la-folle” déjà dévastée, concernant la décision la plus importante, la plus extrême, la plus dévastatrice dont soit investi le pouvoir américaniste. C’est dire si, en théorie, un adversaire potentiel des USA peut se trouver encouragé dans un projet de lancer une attaque contre les USA, ou de créer des conditions de tension où l’on pourrait profiter de cette confusion ainsi exacerbée … C'est dire si, à “D.C.-la-folle” surtout, on ne se privera pas d'évoquer cette hypothèse, toute improbable qu'elle soit..
“Conversation” avec le pouvoir en cours d’effondrement
Il ne fait aucun doute qu’une chose énorme est en train de sortir de la boîte de Pandore des conventions non-dites du pouvoir et des rapports du pouvoir à l’ère des hautes technologies et de la puissance nucléaire ; et cette sortie de la boîte de Pandore est la conséquence directe et catastrophique de l’époque de la postmodernité et de la modernité-tardive, ou de la postmodernité-tardive, dans cette époque où règnent le système de la communication, la narrative et l’éternel présent où chaque acte posé et chaque parole dite le sont sans soucis des effets et conséquences... Il s’agit de la mise en question du fonctionnement du pouvoir suprême pour l’ultime décision suprême que puisse prendre le pouvoir d’une puissance nucléaire aujourd’hui.
On comprend qu’il n’existe aucune solution ni réponse idéales dans un tel contexte. Toutes les voies explorées concerneront nécessairement un équilibre précaire où règne l’incertitude alors que la décision à prendre recèle éventuellement des effets catastrophiques, et souvent à prendre dans un temps réduit et sous la pression d’événements à potentialité catastrophique sinon déjà catastrophiques.
Pour autant, on doit avoir à l’esprit que cette situation a existé de tous temps, c’est-à-dire de tout le temps depuis qu’existent la Bombe (atomique puis à hydrogène), particulièrement aux USA. Les avatars que connurent secrètement ou pas, au moins deux présidents des USA (Eisenhower et Kennedy) avec l’un des généraux les plus impudents et les plus puissants de la force nucléaire stratégique, Curtis LeMay, sont un exemple édifiant de l’extrême fragilité et de la confusion potentielle de la décision d’employer cette arme. Simplement, les circonstances d’alors, les personnalités des présidents, la stabilité du pouvoir à Washington D.C. firent que rien n’exposa au grand jour l’existence de ces problèmes et l'“esprit de la dissuasion” continua à perdurer, et l'“équilibre de la Terreur” à rester bien en place.
L’incursion de Trump et la crise ouverte et catastrophique du pouvoir à Washington D.C. devenue “D.C.-la-folle” dramatisent tout comme dans une mise en scène et font sortir l’insoluble débat de la boîte de Pandore. L’extraordinaire déclaration du Général Kehler en est une marque symbolique d’une rare puissance, – avec un général d’un tel rang exposant calmement la possibilité juridique “légale” dans son chef, de poser un acte d’insubordination au plus haut degré concevable. Cet ensemble de circonstance conduit, à l’instar de la situation générale du pouvoir de l’américanisme, à la possibilité de situations à la fois confuses et extrêmement dangereuses ; et dangereuses, nous insistons là-dessus, autant pour le risque d’emploi du nucléaire que pour le risque d’insubordination majeure au plus niveau de l’État. C’est-à-dire qu’à côté du risque du nucléaire, existe, bien aussi puissamment sinon plus, un risque majeur pour la stabilité, la durabilité sinon pour l’existence même du pouvoir de l’américanisme. C’est-à-dire enfin que le risque d’emploi ou non du nucléaire, qui est une crise en soi, concerne aussi bien la possibilité de déclencher une crise paroxystique et quasiment de rupture du pouvoir suprême de l’américanisme.
Qui est à mettre en cause pour cette situation ? La culpabilité centrale de cette situation réside dans l’évolution même de la puissance des États-Unis, dans la politique poursuivie depuis des décennies et accélérée depuis le début du siècle, dans la décadence du système de l’américanisme comme tendance générale influant sur tous les comportements en faisant perdre le sens des responsabilités et la conscience autant que la protection des principes sur lesquels prétend être installé ce pouvoir. Cela fait qu’à peu près tous les acteurs-sapiens actuels de cette dynamique sont effectivement “responsables” de l’évolution de la situation sans qu’on puisse désigner l’un ou l’autre comme “coupable” puisque cette position est déjà identifiée.
• Trump lui-même, bien sûr, à cause de son caractère et de son comportement, à cause de sa tendance à réagir souvent sans mesurer les conséquences de ses actes. Le cas est aujourd’hui bien documenté et on connaît la musique...
• Ceux qui ont voulu bloquer Trump dans ses volontés supposées d’arrangement avec l’extérieur, de sa politique dite d’America First, de sa tendance exposée pendant la campagne à réduire les engagements “impériaux”. Pour faire bref, on désignera dans ce cas l’acteur comme le fameux Deep State qui, en agissant de cette façon, a suscité une réaction de Trump inverse de celle qu’il prônait, suscitant des options inverses, bellicistes, menaçantes. (C’est ce qu’on a désigné comme “Trump 2.0”.)
• Ceux qui n’ont cessé de démoniser Trump, exacerbant de leur côté ses faiblesses ou ses extravagances de comportement, mais surtout mettant en cause sa légitimité et son autorité de toutes les façons possibles. On notera que le comportement de ce “parti” n’est pas plus rassurant que celui de Trump, et qu’il l’est même moins par divers aspects, – et certains seraient tentés et justifiés de dire qu’une décision d’emploi du nucléaire dans les mains des sénateurs n’est pas pour rassurer plus que lorsqu’elle est dans les mains de Trump.
• Ceux qui déjà déclarent, contre tout l’esprit de la loi fondamentale de la légitimité du pouvoir, qu’ils s’arrogent le droit de juger s’il le faut qu’un ordre présidentiel est légal ou illégal. C’est une dégradation extraordinaire de l’éthique politique, et militaire dans ce cas.
On voit donc, répétons-le, qu’il n’y a pas dans ces divers cas, de “culpabilité”, mais que les uns et les autres s’alignent selon leurs conceptions, leurs intérêts et leur perception, par rapport à un système en voie de désintégration accélérée. Cette désintégration accélérée reste évidemment le sujet central, à la fois cause et conséquence de la dynamique en cours, et chacun tente d’ajuster sa position selon sa perception et son point de vue, au mieux de ses intérêts. Il n’existe plus aucun sentiment de responsabilité collective, ni aucune perception commune de la nécessité d’un rassemblement autour du pouvoir, pour tenter de le sauver.
Bien entendu, le sujet de cette mise en évidence, une fois de plus, de la crise du pouvoir de l’américanisme se fait à l’occasion et au détriment du pilier fondamental de la puissance des USA. Au-delà des USA eux-mêmes, c’est toute la question du fait nucléaire et de tout ce qui le caractérise, – autonomie de la décision, rationalisation de la décision, perception extérieure des capacités de décision du pouvoir en crise, etc., – qui est mise à nu pour s’affirmer comme étant en crise aigüe. Cela représente d’une part un danger objectif, fondamental pour l’équilibre du monde puisqu’il s’agit de l’arme nucléaire ; cela représente d’autre part le paroxysme désormais possible de la crise du pouvoir de l’américanisme, son possible point de fusion et son possible point de rupture.
Tout est dans la réponse du Général Kehler à la question “Et alors, que se passerait-il?” [une fois que vous auriez refusé l’ordre présidentiel comme “illégal”] : « Je ne sais pas... Cela serait une situation constitutionnelle très intéressante... La question est le processus menant à l’identification [de l’ordre comme “illégal”] ... Je vous concéderais que cela serait un processus très difficile et une “conversation” [avec l’autorité politique] extrêmement difficile... »
Ainsi en arrive-t-on à orienter la “conversation” sur la fin du pouvoir de l’américanisme... On comprend que certains en viendront à plaider que la mise en accusation et la destitution du président Trump grâce au 25ème amendement seraient la moindre des pires crises possibles pour tenter d'éviter la pire des pires crises possibles.
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