21 juin 2017

Un gisement de pétrole géant découvert dans l’Arctique russe


Rosneft a annoncé la découverte du premier gisement dans l’Arctique oriental, gisement qui pourrait bien être le plus grand du plateau. Les espoirs que suscite le puits sont immenses – il devrait être exploité à l’échelle industrielle d’ici quatre ans. Cette découverte peut-elle changer la donne ?

Le premier gisement découvert par Rosneft sur le plateau de l’Arctique oriental pourrait être le plus grand de la région. Selon les estimations des analystes, d’ici 2050, le plateau fournira entre 20% et 30% de tout le pétrole russe.

Le groupe place de grands espoirs dans son exploitation. « Il est évident que c’est une chance, mais une chance rendue possible par le travail immense des géologues et des foreurs », affirme le représentant officiel de Rosneft Mikhaïl Leontiev.

Compte tenu de son rythme d’avancement, le travail accompli sur le plateau est effectivement impressionnant : le groupe a lancé le forage en avril 2017, juste après un pont télévisé avec le président russe Vladimir Poutine, qui avait alors qualifié les travaux de création « d’une véritable province pétrolière et gazière qui, selon les estimations préliminaires, recèle des millions de tonnes de carburant ».

À l’échelle industrielle, l’exploitation devrait être lancée en 2020–2021, selon des estimations approximatives, informe Kommersant FM. La question principale est, comme toujours, celle du rapport entre le coût et l’offre. Les cours du pétrole affichent une tendance baissière sur le long terme. Il est difficile de juger comment la « percée » réalisée dans l’Arctique russe s’inscrira dans ce contexte.

Pétrole onéreux

Le gisement a été découvert pendant le forage du puits le plus septentrional sur la parcelle russe du plateau arctique, Tsentralni-Olguinski-1, situé dans le golfe de Khatanga en mer de Laptev. Et ce n’est que le premier gisement de l’histoire découvert dans l’Arctique. Au total, Rosneft possède aujourd’hui 28 parcelles sous licence (la ressource totale est estimée à 34 milliards de tonnes de pétrole), soit près de 80% de toutes les parcelles possédées par les compagnies russes.
Une lutte acharnée a eu lieu pour les gisements sur cette parcelle du plateau. Et ce alors que la prospection géologique d’un seul puits était estimée à 180 millions d’euros il y a trois ans – il n’avait aucune infrastructure, et la période de navigation dans la région n’est que de deux mois par an. Pourtant, malgré les sanctions imposées par les pays occidentaux, Rosneft et ses partenaires envisagent d’investir quelque 7,5 milliards d’euros dans son exploitation dans les cinq prochaines années.

De ce fait, le pétrole devrait être assez onéreux à mettre en valeur, estime Evgueni Nadorchine, économiste en chef de la société de conseil PF Capital : « Aucun de ces projets arctiques [comme certains projets de la compagnie Sourgoutneftegaz, ndlr] ne peut actuellement être qualifié de rentable. Il y a un potentiel, c’est indubitable, mais cela ne reste qu’un potentiel, loin derrière l’horizon des prévisions ».

Scénarios peu réalistes

Aujourd’hui, les prix mondiaux du pétrole ont plongé sous l’influence de toute une série de facteurs : il s’agit tant du niveau élevé des réserves aux États-Unis que du travail intense des foreurs américains et de la hausse de la production en Lybie, non tenue par les obligations assumées dans le cadre de l’accord de l’OPEP sur la réduction de la production.

Le prix du pétrole chute pour la quatrième semaine consécutive et il sera sans doute impossible de renverser la tendance sur ce marché capricieux avec les travaux sur le plateau arctique, aussi bien maintenant qu’au moment de la mise en exploitation, confirme Vladimir Braguine, directeur d’analyse des marchés financiers et de la macroéconomie chez Alfa Capital. « Aujourd’hui, cela n’aura aucun impact significatif pour la simple et bonne raison que nous en produisons déjà ailleurs et à des coûts un peu moins élevés. La question est plutôt de savoir combien coûtera le transport, l’extraction, le stockage, etc. En gros, pour extraire ce type de pétrole, il faut que les prix de l’or noir soient plus élevés. Et pour qu’ils soient plus élevés, il faut que les gisements alternatifs ne couvrent pas la demande existante », estime l’analyste.

À l’heure actuelle, il n’y a pas de déficit. De plus, les conditions pour le financement de l’exploitation de ces gisements ne sont pas les plus avantageuses actuellement, estime l’analyste de la compagnie Open Broker Andreï Kotchetkov : compte tenu des faibles prix mondiaux, l’endettement de Rosneft est conséquent, alors que les restrictions sur le financement extérieur demeurent. « Ainsi, ce gisement sera très utile à long terme, quand le marché connaîtra un déficit », estime l’expert.

Par ailleurs, il faut garder à l’esprit la reconduction de l’accord de l’OPEP sur la réduction de la production, même si son application peut sembler peu réaliste à ce jour, indique Nadorchine. Depuis la première transaction conclue l’année dernière, les représentants du secteur soupçonnent ce que l’on appelle « une manœuvre sur les volumes » : les compagnies manipulent les indicateurs de production et d’exportation, et il est de ce fait fort probable qu’au deuxième semestre, les questions seront encore plus nombreuses qu’à l’issue de la conclusion du premier accord.

« J’ai également l’impression que la discipline concernant le respect de l’accord au deuxième trimestre retombera fortement au sein de l’OPEP. Ainsi, il se peut que le volume produit suite au non-respect de cet accord dépasse largement ce que l’on espère produire dans l’Arctique », estime-t-il.

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