16 décembre 2015

Psychanalyse du réflexe de crédulité


L’erreur à répétition de la grande majorité grégaire des humains sensibles de cette planète est ce réflexe inconscient, pavlovien, de recours systématique aux émotions face à n’importe quel événement porté à leur connaissance.

La technique est simple et fait appel aux fondamentaux de l’ingénierie sociale et aux mécanismes de fabrication du consentement désormais célèbres grâce à Noam Chomsky et Edward Herman (La fabrication du consentement, Agone, 2008), mais aussi à Guy Debord et au mouvement situationniste avant eux. Citons les travaux de Walter Lippmann (Public opinion, 1922) et du neveu de Freud, Edward Bernays (Propaganda, 1928, traduction: Zones, 2007) dans les années 1920, sur l’ingénierie du consentement et la manipulation de l’opinion publique institutionnalisée, théories qui influenceront plus tard Joseph Goebbels et le régime nazi…

Maintenant que nous avons notre point Godwin, nous allons pouvoir entrer dans le vif du sujet.

L’ingénierie du consentement est l’essence même de la démocratie, la liberté de persuader et de suggérer.
Edward L. Bernays dans The Engineering of Consent

Les méthodes modernes d’information (ou de désinformation) nous suggèrent le seul recours systématique à notre cerveau limbique, siège de nos émotions, nos réactions grégaires et nos comportements primitifs, par l’intermédiaire de stimuli liés à la mise en situation de l’information.

 
Cela nous rappelle effectivement le mécanisme de défense théorisé par Freud appelé projection.

Ce mécanisme terriblement efficace aujourd’hui permet à l’individu « menacé » de se sortir d’une situation émotionnelle vécue comme intolérable par lui, de s’acquitter d’un traitement complexe générateur de stress, puis de passer à un autre sujet. Dans ce processus, les informations mises en scène ou en situation, de façon plus ou moins médiocres, sont perçues comme des stimuli prenant la forme de signaux de danger pour la survie de l’individu.

Pourquoi ?

L’individu en société a-t-il perdu toute capacité de raisonnement personnel ?

L’analyse comportementale d’une masse d’individus soumis à des informations imagées et sonorisées nous ramènent systématiquement aux comportements instinctifs les plus primitifs de l’homme, les moins gratifiants, avouons-le.

Les fondations de l’affect de l’individu ponctuellement désarçonné sont ébranlées par un recours quasi religieux à la croyance. En qui avoir foi ? Qui croire ? Dans les mains de qui faut-il remettre son sort ?

En bref, la porte ouverte à une crédulité potentiellement sans limite.

Les processus sont particulièrement bien rodés.


Les individus sont mis dans une situation de stress où il leur est demandé de faire un choix (totalement fabriqué, binaire et manichéen) parmi le peu qui leur sont offerts. Ce choix est même orchestré de moins en moins savamment de manière à ce qu’une seule et unique issue s’impose d’elle-même au nom de notions universelles nobles et indiscutables : sauver l’humanité d’un danger, apporter la démocratie, libérer un peuple de son tyran… Nous l’avons tous entendu ce principe de « guerre juste » ou encore de « droit d’ingérence », spécialement remis au goût du jour pour le premier et inventé pour le second afin de justifier des actions militaires particulièrement douteuses au regard du droit international.

Pas besoin de remonter bien loin : je vous renvoie aux médiocres entretiens de la télévision américaine mis en scène autour de la famille de James Foley (le journaliste « décapité »), ou encore auparavant à la mise en scène dite des «couveuses du Koweit » en 1990. 
 
Vietnam, Golfe, Irak – Des impostures états-uniennes au service de la « guerre juste ».

Quoi qu’il en soit, l’individu « déconditionné » voit ce genre de spectacle, où l’humain est rabaissé au rang de bête stupide, d’un œil perplexe.

« Non ! L’homme n’est pas si bête ? »

Évidemment, la masse portera son choix du sauveur sur le menteur le plus convaincant, qui aura apporté des informations minutieusement choisies, souvent ignorées d’elle. Celle-ci face à une situation complexe à analyser et à traiter donnera son quitus grégaire au plus éloquent des faussaires, à celui qui lui évitera d’avoir à réfléchir, dans ce qui représentera un lumineux ersatz de spectacle, avec son décorum, ses codes et ses grossières mises en situation, spectacle souvent scénarisé et sponsorisé pour des questions de rentabilité de la société du spectacle. Même la plus grande des escroqueries doit entrer dans une grille.

Cela va sans dire, mais ça sonne tout de même mieux quand c’est dit : pour prospérer, le système a besoin de faire passer des idéologies à la masse laborieuse.

Le terrorisme, internationalisé à coup de milliards et relayé en dolby surround 5.1 et 1080p par les médias dominants, est aujourd’hui l’exemple le plus parlant de fabrication du consentement.

Tous ces mécanismes n’auraient pourtant aucune emprise sur des cerveaux totalement affranchis de leur conditionnement social.

Le prolifique Jiddu Krishnamurti, à travers son incroyable catalogue d’ouvrages, conférences et causeries, reste sans nul doute un auteur de référence sur ce thème.

Citons par exemple Se libérer du connu, L’Esprit et la pensée ou encore L’éveil de l’intelligence.

Hermann Hesse, lui aussi, nous décrit les écueils du samsara dans son roman Siddhartha.

Siddharha est un Bouddha qui prendra conscience à travers son voyage initiatique que la roue du samsara représente 3 poisons majeurs de la vie : l’ignorance, la haine et l’orgueil, s’enchaînant cycliquement dans la vie, telle une expérimentation inconsciente de notre nature animale.

Ce schéma que je vous propose ne représente que les fondations élémentaires de l’ingénierie du consentement. Je ne suis ni écrivain, ni intellectuel. Il se déduit simplement de l’analyse des comportements d’individus qui nous entourent.

Ce mode de fonctionnement est tellement classique qu’il semble être devenu avec les décennies le mode de fonctionnement normal des cerveaux humains.

Là encore, pourquoi ce retour aux réflexes primitifs et archaïques de notre système cognitif ?

Le recours au réflexe de survie avant toute analyse critique.

Sommes-nous devenus des animaux « pré-historiques » ?

Par Jérôme & Galil
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