Précepteur en Russie pour quelques enfants français - qui suivent aussi un cursus scolaire russe - je dispose d'une salle de classe dans la "chkola" 67 de Togliatti : formidable observatoire.
Je vous propose une petite visite de cette "chkola", à la fois école, collège et lycée, et qui compte plus de 600 élèves âgés de 5 à 18 ans.
Je précise - pour y avoir travaillé les années précédentes - que j'ai vu à peu près la même chose dans les écoles 93 et 45. Bref, cette école 67 n'est pas exceptionnelle, c'est une école normale, une école russe comme il en existe des milliers.
La visite commence.
Tout est propre, il y a des plantes partout dans les couloirs et dans
les salles de classe.
De très nombreuses salles sont équipées de Tableaux Numériques Intégrés.
Un buste blanc de Lénine orne le mur de la bibliothèque.
Sur les murs de l’escalier principal trônent les photos des élèves méritants.
Près de l’entrée, l’hymne russe est affiché en grand.
Dehors, un monument en marbre – régulièrement fleuri par les élèves - honore les morts de la Grande guerre patriotique de 1941-1945, d’Afghanistan 1979-1989, de Tchétchénie 1994-1996, et de Tchétchénie encore.
Le directeur-adjoint est un ancien officier : on sent qu’avec lui les
choses doivent filer droit.
Le directeur est un colosse à la poigne de fer, avec des tatouages
sur les phalanges : souvenirs de l’armée.
De nouveau une sonnerie.
Ici les cours ne durent que 40 minutes puis sont suivis d’une récréation de 20 minutes : alterner des périodes brèves de forte concentration avec de bonnes plages de détente, voilà qui est très intéressant et qui conviendrait parfaitement à nos petits zappeurs français.
Pendant l’intercours, les élèves les plus âgés se postent dans les
escaliers, dans les couloirs, et s’assurent que tout se passe bien.
Il n’y a pas de « surveillants attitrés» car les élèves se surveillent eux-mêmes. Les grands veillent sur les plus jeunes.
Une idée simple pour faire l’économie de tous ces catastrophiques emplois jeunes des cités, emplois d’avenir sans futur, qui traînent dans les couloirs, et qui ne servent à rien sinon à faire tourner la machine à café.
Tout le monde porte un uniforme ; une veste, un pantalon ou une jupe, une cravate, un chemise ou un chemisier, des chaussures en cuir, les cheveux obligatoirement courts pour les garçons et attachés pour les filles.
On est bien loin du spectacle désolant des jeans tombants, des sweet-shirts criards et trop grands, des sous-vêtements qui dépassent, des survêtements douteux, et de tout cet avachissement vestimentaire qui est la norme en France et n’est le plus souvent que la manifestation extérieure d’un avachissement moral.
Ainsi vêtus, tous les enfants sont élégants. La tyrannie du cool et du fric qu’imposent les marques n’existe pas ici.
Il va de soi que la tenue des professeurs – des femmes en majorité -
est stricte, exemplaire, et qu’elles ne portent – à la différence de
nombre de leurs homologues françaises atteintes de jeunisme - ni
jeans, ni baskets, ni piercings, ni tatouages décoratifs à la cheville, à l’épaule ou au creux des reins.
Les seuls tatouages autorisés sont ceux du service militaire pour les hommes.
Je descends l’escalier qui mène à la cantine sans lever la tête, sans m’inquiéter, car je sais que je ne suis pas en France et qu’il est impossible, ici, de se faire cracher dessus : un de mes collègues de collège de Carrières-sous-Poissy avait oublié de scruter les hauteurs... un beau crachat glaireux anonyme sur sa joue avait hélas sanctionné cette distraction. Et comme la punition collective est interdite dans la République, le crachat était resté impuni. Formidable encouragement.
Je vois des élèves qui passent le balai et la serpillère dans leur classe.
A la cantine, c’est pareil : les élèves eux-mêmes assurent, par roulement, une partie du service.
Une façon efficace pour les responsabiliser.
Ici le travail d’intérêt général n’est pas une punition : il est la norme.
L’intérêt général et le travail ne sont donc pas assimilés à des
notions abstraites ou punitives mais correspondent à une pratique
bien concrète qui fait que les élèves respectent les locaux dont ils
ont, en partie, la charge.
Rousseau nous l'a appris, mais la France l'a oublié...
La liberté la plus grande est le fruit de la rigueur la plus stricte.
Source
Je vous propose une petite visite de cette "chkola", à la fois école, collège et lycée, et qui compte plus de 600 élèves âgés de 5 à 18 ans.
Je précise - pour y avoir travaillé les années précédentes - que j'ai vu à peu près la même chose dans les écoles 93 et 45. Bref, cette école 67 n'est pas exceptionnelle, c'est une école normale, une école russe comme il en existe des milliers.
Tout est propre, il y a des plantes partout dans les couloirs et dans
les salles de classe.
Un buste blanc de Lénine orne le mur de la bibliothèque.
Près de l’entrée, l’hymne russe est affiché en grand.
Dehors, un monument en marbre – régulièrement fleuri par les élèves - honore les morts de la Grande guerre patriotique de 1941-1945, d’Afghanistan 1979-1989, de Tchétchénie 1994-1996, et de Tchétchénie encore.
Le directeur-adjoint est un ancien officier : on sent qu’avec lui les
choses doivent filer droit.
Le directeur est un colosse à la poigne de fer, avec des tatouages
sur les phalanges : souvenirs de l’armée.
De nouveau une sonnerie.
Ici les cours ne durent que 40 minutes puis sont suivis d’une récréation de 20 minutes : alterner des périodes brèves de forte concentration avec de bonnes plages de détente, voilà qui est très intéressant et qui conviendrait parfaitement à nos petits zappeurs français.
escaliers, dans les couloirs, et s’assurent que tout se passe bien.
Il n’y a pas de « surveillants attitrés» car les élèves se surveillent eux-mêmes. Les grands veillent sur les plus jeunes.
Une idée simple pour faire l’économie de tous ces catastrophiques emplois jeunes des cités, emplois d’avenir sans futur, qui traînent dans les couloirs, et qui ne servent à rien sinon à faire tourner la machine à café.
Tout le monde porte un uniforme ; une veste, un pantalon ou une jupe, une cravate, un chemise ou un chemisier, des chaussures en cuir, les cheveux obligatoirement courts pour les garçons et attachés pour les filles.
On est bien loin du spectacle désolant des jeans tombants, des sweet-shirts criards et trop grands, des sous-vêtements qui dépassent, des survêtements douteux, et de tout cet avachissement vestimentaire qui est la norme en France et n’est le plus souvent que la manifestation extérieure d’un avachissement moral.
Ainsi vêtus, tous les enfants sont élégants. La tyrannie du cool et du fric qu’imposent les marques n’existe pas ici.
Il va de soi que la tenue des professeurs – des femmes en majorité -
est stricte, exemplaire, et qu’elles ne portent – à la différence de
nombre de leurs homologues françaises atteintes de jeunisme - ni
jeans, ni baskets, ni piercings, ni tatouages décoratifs à la cheville, à l’épaule ou au creux des reins.
Les seuls tatouages autorisés sont ceux du service militaire pour les hommes.
Je descends l’escalier qui mène à la cantine sans lever la tête, sans m’inquiéter, car je sais que je ne suis pas en France et qu’il est impossible, ici, de se faire cracher dessus : un de mes collègues de collège de Carrières-sous-Poissy avait oublié de scruter les hauteurs... un beau crachat glaireux anonyme sur sa joue avait hélas sanctionné cette distraction. Et comme la punition collective est interdite dans la République, le crachat était resté impuni. Formidable encouragement.
Je vois des élèves qui passent le balai et la serpillère dans leur classe.
A la cantine, c’est pareil : les élèves eux-mêmes assurent, par roulement, une partie du service.
Une façon efficace pour les responsabiliser.
Ici le travail d’intérêt général n’est pas une punition : il est la norme.
L’intérêt général et le travail ne sont donc pas assimilés à des
notions abstraites ou punitives mais correspondent à une pratique
bien concrète qui fait que les élèves respectent les locaux dont ils
ont, en partie, la charge.
Rousseau nous l'a appris, mais la France l'a oublié...
La liberté la plus grande est le fruit de la rigueur la plus stricte.
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