La définition du mot "exister", c'est : être dehors.
Si les humains ont inventé (inventer, c'est : venir à l'intérieur; donc inventer c'est découvrir en soi ce qui s'y trouve déjà) un tel mot, c'est bien pour différencier l'existence d'un autre mode de fonctionnement.
On ne peut opposer l'existence au néant. L'être au néant, oui, si on sait ce que sont l'un et l'autre, peut-être deux visages du même, mais l'existence ne s'oppose pas au néant.
L'existence s'oppose à l'inistence, qui est le fait d'être dedans.
C’est un néologisme que j’assume, trouvant curieux et même révélateur qu’il ne figure pas dans les dictionnaires.
S'il y a un dehors, il y a forcément un dedans.
Les gens qui ont peur de la mort ont oublié ce simple fait. Ce sont les mêmes qui ont peur du noir et des microbes, qui n'aiment pas dormir, et tiennent l'introspection pour une aberration mentale.
L'existence est obligatoire, puisqu'on est bipède sur une planète matérielle, et même si tout est illusion. Nous sommes condamnés à exister, qu'on le veuille ou non.
Il y a une ligne de partage qui clive à l'évidence les humains en deux camps. L'Evangile parle du bon grain et de l'ivraie, Mouravieff des deux humanités, Laura Knight-Jadzyk des portails organiques.
Ce qui les sépare, c'est peut-être tout simplement leur épaisseur. D'un côté, on a les gens plats, de l'autre les gens profonds.
Ne pas croire que les gens plats n'ont pas d'épaisseur. Bien souvent, ils sont pleins de duplicité, de couches de fourberie. Ne connaissant rien d'eux-mêmes, ils sont tournés vers l'extérieur. Ne les intéressent que le théatre du monde, et le profit qu'ils peuvent y prendre. L’ancien guru de la lutte antisecte, le dénommé fennec, est pour moi l’exemple même des hommes au visage plat. Rusé, malfaisant, privé de toute intelligence verticale, jouissant de sa malfaisance et de ce qu’il perçoit comme sa propre importance, repoussant dans sa platitude, crapaud haïssant tout ce qui vole.
Cette catégorie comprend aussi des hommes et des femmes d'action, engagés, dit-on, dans l'amélioration de ce monde. Ce sont ceux qui vous reprochent votre manque de citoyenneté, vous poussent à voter ; comme eux, bien sûr. Mais ils consentiraient encore à ce que vous votiez contre, car "l'important, c'est de participer", non ?
Comme des mouches engluées sur le tortillon létal vous inviteraient à les accompagner dans leur charnier puant.
Participe, camarade. Investis-toi dans la révolution. Dans la révolution à 20 ans, dans l'immobilier à 50. L'important étant d’investir (rentrer dans le costume, s’identifier au scaphandre).
De l'autre côté, celles et ceux qui n'ont atterri qu'avec difficulté voire répugnance, les rêveurs, les poètes, les albatros "que leurs ailes de géant empêchent de marcher".
Ceux-là se souviennent, eux, que ce monde n'est qu'une projection d'un ailleurs tellement plus vivant, qu'on en garde sans cesse une vrille de nostalgie enfoncée dans le coeur. Ceux-là voient les choses d’en haut et n’aiment pas se poser dans la trivialité.
Ce sont ceux-là que détestent et méprisent les premiers, acharnés à construire toujours de nouvelles cages, de nouveaux outils, de nouveaux moyens d'extirper le souvenir. Des règles, des clans, des guerres, des lois, des codes, des armes et des armées.
Il y a un abime entre eux (les premiers) et nous (j'ai choisi mon camp, même si j'ai appris à vivre dans les deux mondes).
Vivre dans les deux mondes, c'est "rendre à César ce qui est à César", et "à Dieu ce qui est à Dieu".
César, du latin caesare est ce qui est coupé. Coupé du réel véritable, de la source, de la profondeur. L'existence.
L'enjeu, pour ceux qui se souviennent, c'est de ne jamais perdre la mémoire. De ne pas oublier "Dieu".
Nous sommes tombés dans un monde en guerre, dont l'unique but est justement de se séparer de son origine, de la renier, de la rejeter comme monstrueuse pour s'affirmer comme seule vraie réalité, seul vrai monde.
Qu'importe que ce monde s'en aille dans son délire auto-générateur, si c'est sa volonté la plus féroce ?
Ce qui importe, c'est de ne pas partir avec lui, mais au contraire de ranimer sans cesse le souvenir que nous ne sommes pas d'ici, afin de ne pas sombrer avec ce navire pourri.
Le corps ? Il est d'ici. C'est un véhicule magnifique et respectable qui se dénouera en poussière. Les personnages mentaux, sociaux que je donne à voir resteront là aussi.
C'est la raison pour laquelle je peux survivre déguisé au milieu des humains du premier groupe, et même parfois y prendre du plaisir.
Ce qui reste ? L'essentiel, que nul ne m’enlèvera si je le garde en moi comme dernier et premier refuge.
Vieux Jade
Si les humains ont inventé (inventer, c'est : venir à l'intérieur; donc inventer c'est découvrir en soi ce qui s'y trouve déjà) un tel mot, c'est bien pour différencier l'existence d'un autre mode de fonctionnement.
On ne peut opposer l'existence au néant. L'être au néant, oui, si on sait ce que sont l'un et l'autre, peut-être deux visages du même, mais l'existence ne s'oppose pas au néant.
L'existence s'oppose à l'inistence, qui est le fait d'être dedans.
C’est un néologisme que j’assume, trouvant curieux et même révélateur qu’il ne figure pas dans les dictionnaires.
S'il y a un dehors, il y a forcément un dedans.
Les gens qui ont peur de la mort ont oublié ce simple fait. Ce sont les mêmes qui ont peur du noir et des microbes, qui n'aiment pas dormir, et tiennent l'introspection pour une aberration mentale.
L'existence est obligatoire, puisqu'on est bipède sur une planète matérielle, et même si tout est illusion. Nous sommes condamnés à exister, qu'on le veuille ou non.
Il y a une ligne de partage qui clive à l'évidence les humains en deux camps. L'Evangile parle du bon grain et de l'ivraie, Mouravieff des deux humanités, Laura Knight-Jadzyk des portails organiques.
Ce qui les sépare, c'est peut-être tout simplement leur épaisseur. D'un côté, on a les gens plats, de l'autre les gens profonds.
Ne pas croire que les gens plats n'ont pas d'épaisseur. Bien souvent, ils sont pleins de duplicité, de couches de fourberie. Ne connaissant rien d'eux-mêmes, ils sont tournés vers l'extérieur. Ne les intéressent que le théatre du monde, et le profit qu'ils peuvent y prendre. L’ancien guru de la lutte antisecte, le dénommé fennec, est pour moi l’exemple même des hommes au visage plat. Rusé, malfaisant, privé de toute intelligence verticale, jouissant de sa malfaisance et de ce qu’il perçoit comme sa propre importance, repoussant dans sa platitude, crapaud haïssant tout ce qui vole.
Cette catégorie comprend aussi des hommes et des femmes d'action, engagés, dit-on, dans l'amélioration de ce monde. Ce sont ceux qui vous reprochent votre manque de citoyenneté, vous poussent à voter ; comme eux, bien sûr. Mais ils consentiraient encore à ce que vous votiez contre, car "l'important, c'est de participer", non ?
Comme des mouches engluées sur le tortillon létal vous inviteraient à les accompagner dans leur charnier puant.
Participe, camarade. Investis-toi dans la révolution. Dans la révolution à 20 ans, dans l'immobilier à 50. L'important étant d’investir (rentrer dans le costume, s’identifier au scaphandre).
De l'autre côté, celles et ceux qui n'ont atterri qu'avec difficulté voire répugnance, les rêveurs, les poètes, les albatros "que leurs ailes de géant empêchent de marcher".
Ceux-là se souviennent, eux, que ce monde n'est qu'une projection d'un ailleurs tellement plus vivant, qu'on en garde sans cesse une vrille de nostalgie enfoncée dans le coeur. Ceux-là voient les choses d’en haut et n’aiment pas se poser dans la trivialité.
Ce sont ceux-là que détestent et méprisent les premiers, acharnés à construire toujours de nouvelles cages, de nouveaux outils, de nouveaux moyens d'extirper le souvenir. Des règles, des clans, des guerres, des lois, des codes, des armes et des armées.
Il y a un abime entre eux (les premiers) et nous (j'ai choisi mon camp, même si j'ai appris à vivre dans les deux mondes).
Vivre dans les deux mondes, c'est "rendre à César ce qui est à César", et "à Dieu ce qui est à Dieu".
César, du latin caesare est ce qui est coupé. Coupé du réel véritable, de la source, de la profondeur. L'existence.
L'enjeu, pour ceux qui se souviennent, c'est de ne jamais perdre la mémoire. De ne pas oublier "Dieu".
Nous sommes tombés dans un monde en guerre, dont l'unique but est justement de se séparer de son origine, de la renier, de la rejeter comme monstrueuse pour s'affirmer comme seule vraie réalité, seul vrai monde.
Qu'importe que ce monde s'en aille dans son délire auto-générateur, si c'est sa volonté la plus féroce ?
Ce qui importe, c'est de ne pas partir avec lui, mais au contraire de ranimer sans cesse le souvenir que nous ne sommes pas d'ici, afin de ne pas sombrer avec ce navire pourri.
Le corps ? Il est d'ici. C'est un véhicule magnifique et respectable qui se dénouera en poussière. Les personnages mentaux, sociaux que je donne à voir resteront là aussi.
C'est la raison pour laquelle je peux survivre déguisé au milieu des humains du premier groupe, et même parfois y prendre du plaisir.
Ce qui reste ? L'essentiel, que nul ne m’enlèvera si je le garde en moi comme dernier et premier refuge.
Vieux Jade
Ca me réconforte un peu de voir que je ne suis pas la seule à être nostalgique de quelque chose que je ne situe pas dans le temps et dont je n'ai pas souvenir... enfin, pas explicitement tout du moins.
RépondreSupprimerQuant au 'survivre déguisé', j'avoue que le déguisement me va mal, c'est sans doute pour cela que j'apprécie parfois d'être seule.
(est-ce une confirmation de l'adage "mieux vaut être seul que mal accompagné" ? Je ne sais pas trop, mais peut-être bien.)
"Inistence". C'est un mot qui me plaît bien ! ^^
Se déguiser, c'est un jeu, tout petit. Pourquoi ne pas continuer, c'est le seul moyen de survis que l'on aie tous. Ce serait sûrement très difficile d'être toujours déguisé, on ne saurait plus QUI on est. PK Dick a exposé ça dans un bouquin fascinant : Substance Mort, dans lequel un flic infiltré chez les junkies ne sait plus qui il est. Il faut donc justement toujours se souvenir, ou le plus possible, qu'on n'est pas le déguisement. Ne pas s'identifier, c'est le seul moyen. L'équilibre entre les deux mondes. De toutes façons, qui n'est pas déguisé ? Masque sur masque, jusqu'au trognon.
SupprimerBonjour, Vieux Jade, et merci encore pour ce que vous écrivez.
SupprimerJ'avoue que chez moi le masque, même s'il m'arrive parfois de vouloir en mettre un, ne tient pas : peut-être que l'élastique n'est pas suffisamment serré ? ^^ (je crois que j'ai peur d'étouffer si je le serre de trop... ou encore de ne plus savoir qui je suis, comme vous le dites.)
Vraiment, je n'aime pas jouer à cache-cache. On me prend telle que je suis ou bien on me laisse. Et ça me va très bien comme ça : de la sorte, j'iniste. C'est l'essentiel.
Je ne suis jamais à l'aise lorsqu'il est question de paraître.
Bonjour,
RépondreSupprimerVieux Jade dit :
""L'enjeu, pour ceux qui se souviennent, c'est de ne jamais perdre la mémoire. De ne pas oublier "Dieu".""
Jamais. Et aussi paisible que possible.
Edouard
En fait, c'est sans doute LUI qui se souvient. Mais c'est pareil.
SupprimerAh! Merci Vieux Jade, tout est toujours "torché" parfaitement, on a l'impression de s'entendre ressentir et grâce à vous d'avoir les mots pour le voir écrit, exprimé ; je suis aussi pas mal d'accord avec Elba, mais je crois qu'aimer la solitude est le phénomène naturel de ceux qui sont dans "le travail alchimique"comme une nécessité pour inister...
RépondreSupprimerMerci. J'avais imprimé ce texte : http://echelledejacob.blogspot.fr/2013/01/du-theatre-de-la-vie-des-coulisses-la.html pour le lire, car il est long. Je ne l'ai lu que deux ou trois jours après avoir publié le mien, et, sous une forme beaucoup plus étoffée, documentée, argumentée, y ai retrouvé souvent le même fil d'Ariane.
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