02 juillet 2011

Galère grecque


Qui eût pu penser qu’une des principales causes de l’endettement de la Grèce soit directement liée aux achats d’armes en provenance des industries militaires Étasuniennes, Allemandes et Françaises ?
Dans un article, traduit de l’anglais à l’espagnol, l’auteur pose la question suivante : « quel est le pays de la Communauté européenne, actuellement en faillite, qui est le 4ième importateur d’armes au monde ? ».
Il y a dans cette affirmation de quoi surprendre bien du monde, d’autant plus que la Grèce n’est pas particulièrement impliquée dans les guerres qui sévissent dans le monde et sa sécurité n’est pas davantage menacée par ses voisins. Alors pourquoi ces achats d’armes à un moment où la crise économique menace ses politiques sociales en santé et en éducation et que l’emploi est en crise ? Déjà, nous savons que les budgets consentis à ces secteurs sont loin de ceux consentis par l’ensemble des pays de l’Union Européenne. La Grèce, avec un PIB per capitica, semblable à celui de l’Espagne, n’est pas un pays pauvre, mais sa richesse est distribuée inégalement, ne consacrant que 4% de son budget annuel à l’éducation.
De 2005 à 2008, la Grèce a doublé la valeur de ses emprunts pour payer des armes dont elle n’avait pas besoin. Selon une recherche conjointe de juges grecs et allemands, les vendeurs d’armes ont utilisés la corruption pour s’assurer la collaboration d’importants hommes politiques, de fonctionnaires et de chefs militaires. L’argent emprunté pour acheter ces armes vient des mêmes pays d’où proviennent les armes, soit les États-Unis, la France et l’Allemagne. De 2005 à 2008, les prêts consentis à la Grèce pour l’ensemble de ses obligations ont atteints la somme astronomique de 160 000 millions de dollars. Pour un pays de 11 millions d’habitants c’est peu dire.
Avec cet argent la Grèce a amplement de quoi payer la facture de 3000 millions de dollars en hélicoptères de combat français, 2000 millions de dollars en avions de combat étasuniens, plus ou moins le même montant pour les avions Mirage français et presque le triple en sous-marins allemands.
Ce ne sera qu’à partir de 2009 que la Grèce commencera à avoir des difficultés de paiement pour couvrir ses achats d’armes et ce sera à ce moment que l’Union Européenne se montrera préoccupée. D’ailleurs, c’est dans ce contexte qu’il faut comprendre le débat récent entre l’Allemagne et la Banque Centrale Européenne portant sur la meilleure manière d’aider la Grèce à honorer ses paiements sur la dette qui l’accable. Dans ces discussions on parle beaucoup plus de coupures dans les programmes sociaux que de ceux sur les armements. Pour 2011, le débat se poursuit et tout semble indiquer qu’une coupure de 6 500 millions euros sera votée dans le budget de crise, amputant d’autant le budget des divers programmes sociaux. La question des dépenses militaires ne semble pas faire partie du débat si ce n’est l’obligation de la Grèce d’honorer le paiement de sa dette en armement.
Comment, dans pareil contexte, ne pas voir un parallèle avec ce qui s’était passé en Argentine à la fin des années 1990 et 2000 ! Y a-t-il derrière un tel procédé une stratégie de l’endettement visant à prendre le contrôle de pays et même de peuples entiers ? Cette stratégie, bien assaisonnée par la corruption des principales têtes dirigeantes, ne permet-elle pas, tout à la fois, la prise de contrôle d’un État et les ressources nécessaires destinées à leurs propres industries ?
De quoi nous faire réfléchir et faire réfléchir le peuple canadien dont le gouvernement ne cesse d’augmenter ses dépenses militaires alors qu’il n’est menacé par aucun pays. Ne doit-il pas réviser, dès maintenant, sa politique d’armements et de dépenses militaires et se concentrer sur les politiques de développement économique et social ? Il n’appartient pas aux canadiens de financer les industries militaires étasuniennes pas plus que les guerres menées dans le cadre d’intérêts qui nous sont étrangers. Le peuple canadien n’a pas d’ambition impériale et il faut souhaiter que ses dirigeants en sont conscients.

Oscar Fortin
Québec, le 28 juin 2011

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