09 juin 2023

Immigration: ce débat sur le “Frexit” que Les Républicains ont lancé sans s’en rendre compte


Le 20 mai dernier, Les Républicains ont annoncé le dépôt de deux projets de lois sur l’immigration. L’un porte sur la qualification du séjour clandestin comme délit. C’est sur l’autre que je voudrais m’attarder. Il traite non seulement de la possibilité de pouvoir organiser un référendum sur la politique migratoire mais, surtout, envisage de renoncer à la primauté des textes européens sur le droit français. Eric Ciotti, Olivier Marleix et Bruno Retailleau auraient-ils lancé un débat sur le Frexit à leur insu?


La politique contemporaine se fourvoie régulièrement dans la communication. Les propositions de lois de LR sur les questions d’immigration ne dérogent pas à la règle! Vers le 20 mai, on a eu débauche de communication de la part d’Eric Ciotti, Bruno Retailleau et Olivier Marleix. Or le projet de loi qui veut modifier les modalités du droit d’asile, a été connu seulement le 1er juin. En revanche, on ne connaît pas le texte stabilisé de l’autre projet de loi, celui qui propose des modifications constitutionnelles. Et pour cause, comme l’explique Public Sénat:

“En ce qui concerne, la proposition de loi constitutionnelle, qui suscite des interrogations et quelques réticences au sein de la majorité sénatoriale, François-Noël Buffet précise « que si sa philosophie est très ferme, il y aura forcément des débats et des discussions au Parlement ». Le texte n’est pas encore rendu public à l’heure où nous écrivons ces lignes. Le groupe centriste du Sénat, qui a déjà annoncé le dépôt de deux textes sur l’immigration, voit d’un mauvais œil, la proposition de leurs partenaires de droite qui consiste à déroger au droit européen en matière migratoire. « L’immigration relève d’une compétence partagée entre l’Union européenne et les Etats-membres. Ce qu’on dit, c’est que les décisions des pays doivent être prises en compte », explique François-Noël Buffet. Mais comment inscrire cette idée dans la Constitution ? Elle devrait figurer à l’article 11 du texte fondamental de la Ve République en permettant de légiférer par référendum sur la politique migratoire, « quand les intérêts fondamentaux de la Nation » sont en jeu“ 

Edouard Philippe plus lucide que ses anciens camarades de parti !

Edouard Philippe a décidé d’intervenir dans le débat. Et il a mis les pieds, partageant le constat de ses anciens camarades de chez LR mais tirant le signal d’alarme sure le risque de “Frexit juridique” que comporterait l’un des deux projets de lois.

Eric Ciotti a beau se réjouir d’avoir fait rentrer Edouard Philippe dans le débat, il ne répond pas, en réalité, à l’objection de l’ancien Premier ministre d’Emmanuel Macron. Et ^pour cause/ Les Républicains ont été entraînés beaucoup plus loin qu’ils ne le souhaitaient sans doute, non pas seulement par des calculs politiciens mais aussi par la réalité des choses. 

Retour sur la campagne présidentielle

Rappelez-vous, amis lecteurs, certains d’entre vous étaient surpris, durant la campagne des primaires chez LR, en vue de l’élection présidentielle. J’avais souligné, en effet que Michel Barnier était, des candidats en lice, le plus intéressant, non seulement par son positionnement centriste, qui empiétait sur l’emplacement politique d’Emmanuel Macron mais surtout parce qu’il avait lancé le débat de la compatibilité du cadre de l’Union Européenne avec les souhaits du peuple français en matière d’immigration. Il proposait, une fois élu, de négocier avec l’Union Européenne, un moratoire: la France sortirait de la politique d’immigration de l’UE, le temps d’avoir mis en place un cadre de contrôle efficace qui apaisât le débat sur la question.

L”échec de Barnier à la primaire interrompit le débat. Et l’on remarquera que ni Eric Zemmour ni Marine Le Pen n’étaient allés aussi loin que Michel Barnier. L’un et l’autre pensaient, à tort ou à raison, qu’ils ne devaient pas évoquer la question d’un Frexit, même partiel. Et ils n’ont pas bougé depuis lors à ma connaissance. Au Rassemblement National et chez Reconquête, on met son espoir dans des changements de majorité politique au sein de l’Union, qui permettraient d’infléchir la politique d’immigration de l’UE.

Les Républicains sont, à leur insu, les plus radicaux désormais sur le sujet de l’immigration

En reprenant les positions de Michel Barnier et en allant même plus loin, Ciotti, Retailleau et Marleix se sont avancés sur un terrain paradoxal. Ils demandent plus qu’un moratoire! Ils voudraient, Edouard Philippe a raison, un Frexit partiel.

Si l’on se rappelle comme le débat sur l’immigration a été important pour faire avancer la cause du Brexit, on se dit qu’il y a dans le projet de loi LR tel qu’il a été présenté, une véritable bombe à retardement. Les Républicains tiendront-ils leur position? Feront-ils bouger le Rassemblement National et Reconquête?

Imaginons que les trois partis de droite que nous avonjs cité, finalement, reculent par peur du Frexit – ou même d’un débat sur le Frexit: un immense espace politique serait alors ouvert pour une force politique nouvelle. Le sondage que nous reproduisons en exergue à l’article montre en effet comme les Français adhèrent à la position exprimée par LR. En particulier, 62% sont d’accord pour déroger au droit européen sur les questions d’immigration! 

Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2023/06/09/ce-debat-sur-le-frexit-que-les-republicains-ont-lance-sans-sen-rendre-compte/

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