02 novembre 2022

A Rotterdam, les chômeurs doivent travailler pour la municipalité

"Tu recevras de l'aide de la société si tu en as besoin, mais la société attend en retour que tu fasses quelque chose si tu peux le faire", explique Marco Florijn, vice-maire travailliste de Rotterdam, dans l'ouest des Pays-Bas : "on ne peut pas à la fois travailler au noir et recevoir un RSA". 

Les huit heures de travail comptent dans le cadre d'un programme de vingt heures par semaine au total, incluant également une formation à la recherche d'emploi, imposé 15 semaines durant aux chômeurs en fin de droits de Rotterdam réclamant le RSA (environ 830 euros par mois pour un célibataire vivant seul). 

"Le temps que l'on demande est trop important pour les gens qui travaillent au noir, donc soit ils renoncent à leurs allocations, soit ils cherchent un vrai travail", explique M. Florijn. 

Retard ou absence injustifiés, entretien d'embauche où l'on fait tout pour échouer, la sanction tombe : 30% du RSA sont dans un premier temps supprimés, mais il peut être également complètement retiré. 

"J'ai le sentiment de faire quelque chose pour l'argent que je reçois et je garde ainsi un certain rythme de travail", assure José da Cruz à l'AFP, ramassant nonchalamment quelques déchets jonchant une rue de la ville : "je n'ai pas honte de ce travail". 

Ce Néerlandais de 30 ans a récemment perdu son emploi dans le secteur de la construction et est arrivé au terme de la période pendant laquelle il a droit à des allocations de chômage. 

"Au début, j'était réticent bien sûr", raconte de son côté Maurice Hannart, 43 ans, ancien conducteur de tram, dans une classe où il reçoit une formation à la recherche d'emploi (comment écrire une lettre de motivation ou préparer un entretien d'embauche) : "mais bon, c'est mieux que de rester chez soi dans son lit. Ici on est actif dans un groupe, on continue à voir des gens". 

Un déficit réduit de plusieurs millions d'euros 

Si le but du programme "Werk Loont" (le travail rapporte) est principalement d'inciter les chômeurs à retrouver un travail au plus vite, il a également permis de réduire les dépenses de la municipalité travailliste. 

Le taux de chômage à Rotterdam, ville de plus de 600.000 habitants et premier port d'Europe, atteint environ 12%, soit près du double de la moyenne nationale. 

Confronté à un déficit croissant du budget alloué aux RSA, qui relève des municipalités aux Pays-Bas, Rotterdam prend à l'été 2011 une série de mesures. 

Parmi celles-ci, "Werk Loont", inspiré notamment de pratiques existant aux Etats-Unis, a renforcé et durci à partir de septembre 2011 une politique existant déjà depuis plusieurs années dans la ville. 

Les résultats ne se font pas attendre: le déficit du budget alloué aux RSA s'élevait à 91 millions d'euros en 2011, alors que les prévisions pour 2012 font état d'un déficit d'un peu plus de 20 millions d'euros. 

Sur les quelque 3.100 personnes passées depuis début 2012 par le programme "Werk Loont", plus de 40% ne bénéficient plus d'allocations, parce qu'ils ont trouvé un nouvel emploi (18% des 3.100), parce qu'ils ont renoncé à l'aide financière ou parce qu'on la leur a retirée. 

"Ce n'est pas la fin de l'Etat providence", assure à l'AFP Paul de Beer, professeur en sciences du travail à l'université d'Amsterdam : "disons plutôt que l'Etat-providence évolue de sa fonction originellement protectrice vers une augmentation des devoirs des citoyens". 

D'un point de vue budgétaire, "Werk Loont" pourrait par ailleurs peut-être inspirer d'autres villes ou pays européens enclins à réduire leurs dépenses en ces temps de crise et d'austérité. 

"Mais de toute façon, on peut mettre autant de pression que l'on veut sur les citoyens, il faut que cela s'accompagne de créations d'emplois, sinon cela ne sert pas à grand-chose", soutient M. de Beer. 

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