06 octobre 2022

Le français MBDA conteste sa mise à l'écart du projet européen d'intercepteur de missiles hypersoniques

Chef de file de l’ambitieux projet européen TWISTER [Timely Warning and Interception with Space-based TheatER surveillance], retenu au titre de Coopération structurée permanente [CSP ou PESCO] afin de développer une capacité de défense contre les missiles hypersoniques, MBDA était donné favori pour prendre les rênes du programme « European Hypersonic Defence Interceptor » [EU HYDEF], qui en est la suite logique.

Seulement, quand elle a dévoilé la liste des projets devant être financés par le Fonds européen de défense [FEDEF], en juillet, la Commission européenne a fait savoir que, à la suprise générale, la coordination du projet EU HYDEF serait confiée au groupe espagnol SENER Aeroespacial, dont l’expérience en matière de défense aérienne ne saute pas aux yeux, et que l’allemand Diehl Defence, qui a quelques atouts à faire valoir dans ce domaine, allait en assurer la direction technique générale.

Et, parmi les pays impliqués dans le projet EU HYDEF, doté d’une enveloppe de 110 millions d’euros, on trouve, outre l’Allemagne et l’Espagne, la Belgique [via la Sonaca], la Norvège [non membre de l’UE], la Pologne, la République tchèque et la Suède. Pourtant parties prenantes du programme TWISTER, la France et l’Italie en ont donc été écartées.

À noter que, un an plus tôt, au titre du Programme européen de développement de l’industrie de défense [PEDID ou EDIDP], la commission européenne avait confié le groupe allemand OHB pour coordonner le projet ODIN’S EYE [multinatiOnal Development INitiative for a Space-based missilE earlY-warning architecturE], visant à développer une composante spatiale d’alerte pour un système de défense contre les menaces hypersoniques…

L’EU HYDEF ayant une portée stratégique, on comprend mieux l’insistance du chancelier allemand, Olaf Scholz, sur la nécessité de développer une capacité de défense contre les « mences aériennes et spatiales ». « En Allemagne, nous allons investir de manière très significative dans notre défense aérienne au cours des prochaines années. Toutes ces capacités pourront être déployées dans le cadre de l’Otan. Dans le même temps, l’Allemagne concevra cette future défense aérienne de manière à ce que nos voisins européens puissent être impliqués si nécessaire – comme les Polonais, les Baltes, les Néerlandais, les Tchèques, les Slovaques ou nos partenaires scandinaves », avait-il affirmé lors d’un discours prononcé à Prague, fin août.

Quoi qu’il en soit, le choix de SENER Aerospacial n’a pas été jugé étonnant qu’en France… Ainsi, en Italie, la Rivista Italiana Difesa [RID] a fait part de sa « stupéfaction », déplorant que la Commission européenne ait privilégié la méthode du « manuel Cencelli » [qui consiste à répartir les charges en fonction du poids électoral de chaque courant d’un parti] aux dépens de la compétitivité et de l’expertise.

« Il est pour le moins discutable, en effet, que MBDA soit écarté du projet. C’est bien de vouloir assurer une base industrielle solide partout en Europe, avec un oeil sur les PME… Mais dans le cas d’un programme d’une telle valeur stratégique, il faut regarder les compétences industrielles, comme celles de MBDA qui, à ce jour, est la seule société en Europe pouvant se prévaloir d’une solide expérience dans la défense antimissile, grâce aux programmes [franco-italiens, ndlr] SAMP/T et SAMP/T NG », a ainsi fait valoir la Rivista Italiana Difesa.

Pour rappel, MBDA appartient à Airbus [37,5%], à BAE Systems [37,5%] et à Leonardo [25%].

La messe est-elle dite pour autant? Selon des informations de La Tribune, MBDA n’a pas l’intention de jeter l’éponge, l’industriel ayant en effet déposé un recours en annulation auprès de la Commission européenne. Et, a priori, ce serait la partie italienne du missilier qui serait à la manoeuvre.

Reste à voir quelle en sera l’issue, alors que le sujet peut être crucial, la guerre en Ukraine ayant montré que la menace hypersonique était une réalité [avec des résultats n’ayant cependant pas permis de changer le cours des opérations, ndlr]… En tout cas, l’exécutif européen soutient que les choix pour les 61 projets retenus ont été faits en respectant des principes stricts et rigoureux de gouvernance, selon des critères qui étaient connus des industriels.

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