Par nature discret, Alexis Kohler, le secrétaire général de l'Elysée, est au centre de toutes les attentions déployées par les journalistes qui suivent les affaires élyséennes. Cet ancien élève de l'ESSEC et de l'ENA, très lié au groupe italien MSC, travaille de conserve avec Emmanuel Macron depuis 8 ans. Mais le rôle exact joué par Kohler semble excédé celui du simple secrétaire général, au point qu'il constitue aujourd'hui le seul véritable contre-pouvoir à Emmanuel Macron. Mais quels intérêts réels représente-t-il ?
Le grand public ne connaît pas Alexis Kohler, et c’est assez normal, tant les fonctions du personnage sont obscures et ingrates : d’abord directeur de cabinet du ministre de l’économie Emmanuel Macron, puis secrétaire général de l’Elysée, une fonction méconnue mais extrêmement sensible.
Les Français ont une raison supplémentaire de mal connaître le personnage : chargé, en principe, de proclamer la liste des membres du gouvernement sur le perron de l’Elysée, il est cette fois passé inaperçu. Emmanuel Macron a en effet communiqué la liste du “remaniement” sans faire appel à ses services.
Il n’en fallait pas plus pour alimenter la rumeur d’une disgrâce imminente.
Macron est-il empêché de “virer” Kohler depuis plusieurs mois ?
De fait, Emmanuel Macron n’a pas hésité à organiser une noria d’élus ou de ministres, témoignant de son faible affect pour eux, mais il semble tétanisé face à son secrétaire général, qu’il ne domine visiblement pas, et dont on peut se demander s’il n’est pas dominé par lui.
Selon Marc Endeweld, dans la Tribune, c’est notamment Alexis Kohler qui aurait fait obstacle au choix de Catherine Vautrin, présidente de la communauté d’agglomération de Reims, comme Premier Ministre au lendemain de la présidentielle, et qui aurait imposé Elisabeth Borne.
Il faut dire que Kohler est un rocardien historique, et qu’Elisabeth Borne est elle-même issue des cabinets socialistes. Kohler veille donc au grain en irriguant l’appareil d’Etat avec les réserves de la deuxième gauche. Et ils sont nombreux, notamment en pensant par l’équipe “Delanoë” à laquelle appartiennent Nicolas Revel, ancien directeur de cabinet du maire de Paris, devenu directeur de cabinet de Jean Castex et maintenant directeur général de l’AP-HP, ou Aurélien Rousseau, directeur de cabinet d’Elisabeth Borne.
Tout ce petit monde a tissé une proximité idéologique qui constitue le noyau actif du gouvernement profond en France.
Kohler, un Mazarin moderne
Si l’on en croit les récits journalistiques, Kohler s’occupe des affaires intérieures pendant qu’Emmanuel Macron gère la planète et ses problèmes. En soi, cette répartition est plausible, et somme toute assez classique.
Il est effectivement probable que le secrétaire général de l’Elysée soit d’abord et avant tout dévolu à la conduite des dossiers “techniques” épineux, et qu’il soit le garant d’une vision politique dans leur résolution. On dit notamment qu’il est l’homme de la retraite à 65 ans.
Nous y reviendrons.
En attendant, tout montre que Kohler est devenu un Mazarin moderne, qui fait écran, pour ne pas dire barrage, entre le Roi et les affaires du royaume. Ce qui interroge sur sa “survie politique” : Macron ne manque pas de conseillers discrets, à commencer par Nicolas Sarkozy lui-même semble-t-il, pour lui souffler l’idée de se séparer de Kohler. Et pourtant, Kohler est toujours présent et entame son deuxième mandat à l’Elysée, ce qui approche des records de légende.
Tout la question est de savoir par quel lien étrange il tient le Président.
L’homme de la caste mondialisée
Revenons sur la question de la retraite à 65 ans. D’aucuns soutiendraient que Kohler est l’homme des réformes libérales, qu’il est le Jiminy Cricket monétariste d’Emmanuel Macron. Si l’on en juge par les importantes dépenses publiques nouvelles que Kohler a cautionnées, on peut avoir un vrai doute sur le sujet.
En revanche, que Kohler soit l’homme de la Commission européenne, du Great Reset et de la caste mondialisée, le portrait nous semble beaucoup plus plausible. Nous avons déjà souligné combien la retraite à 65 ans est importante pour la caste et ses organes multilatéraux. L’Histoire précisera un jour jusqu’à quel point Kohler se fait le porte-parole de toutes les doctrines européistes et mondialistes, mais nous avons déjà de bons indices sur le portail par lequel s’engouffrent les idées venues d’ailleurs pour conquérir des places fortes en France.
Et s’il allait au-delà ?
Dans cette adhésion de Kohler à la mondialisation, des questions s’ouvrent que l’histoire règlera un jour. L’implication de Kohler dans des dossiers de désindustrialisation, comme la vente d’Alstom à General Electric, interroge. L’intéressé a beaucoup joué avec le feu, au point que le Parquet National Financier a ouvert des enquêtes sur ses conflits d’intérêt.
Dans la pratique, Alexis Kohler est lié familialement à la famille fondatrice du groupe MSC. Voici la généalogie tracée par Blast :
Né en 1972 à Strasbourg, Alexis Kohler est le fils de Charles Kohler et de Sola Hakim.
Les racines d’Alexis Kohler, c’est l’Alsace mais aussi Israël. Sa mère, Sola Hakim, est née en 1932 à Haïfa, dans une famille juive de Palestine. C’est par elle que le secrétaire général de l’Elysée est lié à la famille Aponte. Sola Hakim est en effet la cousine germaine de Raffeala Diamant.
Cette dernière est la fille de Régine Hakim et de Pinhas Diamant, un banquier Suisse ayant poussé à l’émigration des juifs d’Europe vers Israel après la guerre. Rafaella rencontre Gianluigi Aponte à Naples dans les années 1960. Ensemble, ils fonderont MSC.
Nous ne reviendrons pas ici sur l’implication de Kohler dans le dossier STX, qui concernait un concurrent de MSC. Mais on pourrait signaler plus récemment cette étrange vente signée par le groupe Bolloré au groupe MSC. C’est MSC qui a officiellement racheté, fin mars 2022, les activités africaines de Bolloré. Les deux groupes étaient entrés en négociation exclusive fin décembre 2021.
On peut tout de même s’étonner que la famille du secrétaire général de l’Elysée ait mené une telle négociation avec l’employeur de l’un des rivaux du Président aux élections présidentielles au beau milieu du processus électoral. L’affaire s’est tout de même soldée par un chèque de 5,7 milliards € au profit de Bolloré.
On notera tout de même ces phrases de Ouest-France pleines de relief :
Vincent Bolloré est un habitué des déplacements à Genève, le fief de Gianluigi Aponte, le fondateur de MSC, et de son fils Diego, à qui il a confié les rênes de son groupe en 2014. Les familles Bolloré et Aponte se connaissent bien et s’apprécient.
Donc, la famille Bolloré, employeuse de Zemmour (et financeuse de sa campagne présidentielle) s’entend bien avec la famille du secrétaire général de l’Elysée… et depuis longtemps !
Un si petit monde, au fond…
Il reste donc à écrire la part exacte et réelle que Kohler joue dans la comédie politique française contemporaine.
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