19 avril 2015

Le recul des libertés d'aujourd'hui préfigure les heures sombres de demain...


Notre collègue Jacques Portes, président honoraire de l’APHG, professeur émérite d’histoire nord-américaine à l’Université de Paris 8 Saint-Denis, fait part d’une affaire très inquiétante pour la liberté de recherche et d’expression dans l’Université française.

Un de ses doctorants, parvenu à la fin d’un travail de thèse déclaré digne d’être soutenu - ce qui ne veut pas dire sans défauts - par les deux pré-rapporteurs de son jury, s’est vu refuser brutalement la soutenance de son mémoire quelques jours seulement avant la date prévue, par la direction de l’Ecole doctorale 31 de l’Université de Paris 8. Les motifs de ce refus tiennent essentiellement à l’emploi d’expressions jugées inappropriées, comprendre susceptibles de jeter l’émoi dans certains cercles. La présidence de Paris 8 a soutenu cette décision pour le moins peu courante et, à ce jour, aucune nouvelle date de soutenance n’est fixée.

Plus que la personne de l’auteur, étudiant atypique, c’est le sujet de la thèse, intitulé « Hollywood : le prêtre et le nabab. Les relations de la religion avec le cinéma américain de 1934 aux années 2000 » qui est à l’évidence la principale raison de cet ajournement, décidé afin d’éviter des incidents sur un campus sous haute tension. Le doctorant abordait entre autres la question des Juifs et des Arabes au regard du cinéma américain. Qu’il l’ait fait de manière plus ou moins satisfaisante, c’est au jury qu’il revenait d’en juger, pas à l’administration qui a, faisant jouer sans doute le principe de précaution, interdit en toute bonne conscience le débat intellectuel.

Après les terribles événements de janvier 2015, l’APHG a rappelé vigoureusement son attachement viscéral à la liberté d’expression dans le cadre des lois de la République et à la liberté de recherche sur tous les sujets historiques et géographiques. Elle s’inquiète d’autant plus vivement de l’exercice, au sein de l’Université, d’une sorte de police de la pensée qui censure et désavoue l’expertise d’universitaires seuls qualifiés pour juger de la soutenabilité d’une thèse. La plus grande vigilance est nécessaire quand la bien-pensance irénique veut se substituer au débat scientifique.

Le Bureau national de l’APHG - Paris, le 13/04/2015.

Pour le Bureau national et la Commission universitaire de l’APHG,
Franck Collard, Vice-président national de l’APHG et Professeur des universités (Université de Paris Ouest Nanterre-La Défense).


Source : http://www.aphg.fr/Une-these-insoutenable-a-l


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