Si je devais citer les livres qui m’ont marqué à jamais, je mentionnerai les ouvrages suivants[2] :
- Le Meilleur des mondes Aldous Huxley,
- La ferme des animaux, 1984, George Orwell
- Du Pouvoir, Bertrand de Jouvenel
- La route de la servitude, Hayek
- Le chêne et le veau, Alexandre Soljenitsyne.
- J’ai vu Satan tomber comme l’éclair, René Girard
- Atlas Shrugged, Ayn Rand.
Et pourquoi ont-ils exercé cette influence gigantesque sur la façon de regarder le monde d’un jeune Français (moi) dans la deuxième moitié du XX -ème siècle ?
Parce que tous montrent la supériorité de l’individu sur le groupe, parce que tous expliquent que la possibilité de penser librement et de communiquer aux autres les résultats de cette pensée tout aussi librement est la source de tous les progrès…
Et tous ces auteurs expliquent, même s’ils ne le disent pas toujours, que Dieu ne sait compter que jusqu’à un et qu’il n’a pas de projet collectif pour l’Humanité en général mais un projet d’accomplissement personnel pour chacun d’entre nous, individuellement.
Et de tous ces livres, le plus étrange, le plus actuel est sans aucun doute celui d’Ayn Rand, Atlas Shrugged (Atlas hausse les épaules), traduit en Français cinquante ans après sa parution (!), alors même qu’il est depuis 1957, le deuxième livre le plus vendu après la Bible aux USA.
Nul ne peut comprendre le monde des Républicains conservateurs aux USA s’il n’a pas lu ce livre.
Et pourquoi est-il le plus actuel ?
Pour une raison très simple et que je vais essayer de résumer de façon schématique : la plupart des autres livres (mais pas tous) ont été écrits dans les années quarante ou cinquante à un moment ou d’abord le Nazisme et ensuite le Communisme faisaient peser sur les libertés individuelles des risques mortels. Et donc, ils montraient comment l’application d’une pensée collectiviste à la réalité, pour la transformer, amenait inéluctablement à des désastres, ou pour le dire plus simplement, toute morale collective soutenue par un Etat amène inéluctablement à Auschwitz, ce que tout le XX -ème siècle a amplement prouvé.
Ayn Rand va au-delà de qui aujourd’hui serait un truisme.
Elle explique tranquillement que l’égoïsme est une vertu.
Dans sa philosophie, qu’elle appelle l’objectivisme[3] (elle adore Aristote et hait Kant passionnément…), ainsi que dans ses œuvres romanesques elle s’attache à montrer que tous ceux qui disent qu’ils veulent le bonheur de l’ humanité (les sociaux-démocrates, les Chrétiens démocrates, le pape actuel…) en recherchant l’ égalité parfaite des résultats entre individus amènent inéluctablement à la misère générale, à l’effondrement du niveau de vie de tout un chacun (mais pas du leur), à une société où tout s’arrête et où plus rien ne marche. Une société qui favorise les passagers clandestins par rapport aux citoyens actifs sombre toujours dans l’ anarchie et le désordre.
Et sa thèse est que dans une telle société, les vrais héros, je n’ose pas dire les surhommes, les vrais révolutionnaires que sont les entrepreneurs, les grands artistes, les artisans de talent, les agriculteurs… en ont marre un jour d’être martyrisé et filent tous dans les rocheuses aux USA pour créer « Atlantis », une société idéale qui coupe tout lien avec le reste du pays.
Et dans son roman, qui se lit d’une traite bien qu’il fasse mille pages, elle décrit le déclin inexorable de toute société menée par des lâches.
- Les trains tombent en panne
- Les tunnels s’écroulent
- L’École s’effondre
- Les avions tombent
- La petite criminalité explose
- La corruption de la justice, de la police, du système politique est évidente
- Les médecins cessent de soigner
- L’immobilier se dégrade
On se croirait en France aujourd’hui.
Et du coup, pour mieux mettre en lumière sa façon de penser, je recopie une page de son livre que voici :
« Si vous voulez avoir de l’estime pour vous, commencez par traiter en prédateur tout homme qui exige que vous l’aidiez.
Cette exigence implique qu’à ses yeux votre vie lui appartient.
Mais il y a plus détestable encore : que vous y consentiez !
Faut-il toujours aider son prochain ? Non, si celui-ci le revendique comme un droit ou une obligation morale à laquelle vous seriez soumis.
Oui, si c’est votre désir, fondé sur la joie égoïste que vous procurent sa reconnaissance et ses efforts.
Souffrir en soi n’est pas une valeur ; le combat de l’homme pour ne plus souffrir en est une, en revanche. Si vous choisissez d’aider un homme qui souffre, faites-le parce qu’il le mérite, ou parce qu’il fait ce qu’il faut pour aller mieux, parce qu’il a déjà prouvé qu’il était un être raisonnable, ou bien parce qu’il souffre injustement. Votre action deviendra alors un échange puisque les vertus de cet homme lui vaudront votre aide.
Mais aider un homme qui n’a pas de vertus, l’aider uniquement parce qu’il souffre, accepter ses fautes, ses besoins comme des revendications, c’est accepter qu’un moins que rien ne détienne une hypothèque sur votre système de valeurs.
Un homme qui n’a pas de vertus est un ennemi de la vie dont les agissements sont mortifères.
L’aider, c’est cautionner ce qu’il a de plus mauvais en lui, c’est soutenir son œuvre de destruction. Que ce soit sous la forme de quelques centimes ou d’un simple sourire qu’il n’a pas mérité, tout hommage à un moins que rien est une trahison envers la vie et tous ceux qui luttent pour sa préservation.
C’est de ces centimes et de ces sourires qu’est née la décadence de notre monde. »
Le moins que l’on puisse dire est que la pensée est « robuste »
Et c’est là que les œuvres d’Ayn Rand sont très étonnantes.
Tout le monde a compris aujourd’hui que Staline, Mao, Pol Pot, Castro, Hitler, étaient faits du même bois et que quand ils arrivaient au pouvoir, les choses se détérioraient assez rapidement pour le commun des mortels.
Mais ce que montre de façon frappante Rand est que ceux qui se disent gentils, ceux qui ne veulent pas prendre de décisions difficiles, ceux que de Gaulle appelait les fromages blancs, arrivent exactement aux mêmes résultats que les bienfaiteurs de l’humanité mentionnés quelques lignes plus haut.
Ce qui est criminel, ce n’est donc pas seulement la contrainte des camps et des exécutions, c’est de vouloir que tous les hommes soient égaux à l’arrivée, c’est de refuser l’extraordinaire différence qui existe entre un homme et un autre.
Ce qui est criminel, c’est la recherche de l’Égalité à tout prix car cela amène toujours à la tyrannie sans le goulag[4].
Et le drame de la gauche aujourd’hui est que dans leur désir fou de se prendre pour Dieu, ils veulent recréer l’Homme à leur image (imaginez le désastre si tous les hommes ressemblaient à Mélenchon), puisqu’ils ne se satisfont pas qu’il ait été créé à l’image de Dieu.
Et du coup, ils effectuent le travail de Satan tout aussi bien que Hitler ou Staline, mais curieusement, il est très difficile de se révolter contre eux puisqu’ils disent être bons et faire le bien.
Ce sont les Pharisiens des Évangiles.
Et Ayn Rand les descend en flamme avec toute la jubilation d’un prophète d’Israël.
Un livre qu’il faut avoir lu.
[1] Ayn Rand La Greve Les belles Lettres
[2] Et bien sur les Evangiles. Voir mon livre « un libéral nommé Jésus », Mais les Evangiles ne sont pas un livre mais une Parole
[3] Elle a beaucoup de disciples aux USA, qui publient beaucoup.
[4] Voir le livre de Mathieu Bock Cote à ce sujet.
Aucun commentaire:
Enregistrer un commentaire
Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.