16 septembre 2024

Le mythe éternel du sacrifice : Comment on vous demande encore de tout abandonner pour rien



À l’aube d’un monde ultra-connecté, où la technologie semble tout savoir, où l’information circule à la vitesse de la lumière, une vérité ancienne perdure : nous n’avons pas vraiment évolué. Du moins, pas autant que nous le croyons. À chaque tournant de notre histoire moderne, un vieux spectre resurgit, celui du sacrifice. Et ce fantôme, aussi vieux que les premières civilisations humaines, a muté, s’est recyclé, et continue de régner sur nos vies sous des formes nouvelles, mais toujours familières.

Il y a cinq mille ans, le soleil était notre maître. Il nous donnait la vie, et en échange, il exigeait des offrandes. Des cultures entières s'organisaient autour du sacrifice à cette divinité suprême, chaque rite un hommage au cycle solaire. Puis vinrent les religions monothéistes, et le sacrifice changea de nom, mais pas de nature : le salut se gagnait toujours par la douleur, la soumission et le renoncement à soi.


 
Aujourd’hui, nous ne parlons plus des dieux avec autant d’éloquence. Non, maintenant, le dieu a été remplacé par un concept tout aussi impérieux : la « Planète », les « Générations futures », ou encore « la Justice sociale ». Mais l’exigence est la même : se sacrifier pour un avenir collectif abstrait.

Et qui sont ces nouveaux prêtres, vous demandez-vous ? Ce sont les leaders politiques, les grands de ce monde qui, du haut de leurs trônes dorés, exigent que nous, simples mortels, renoncions à notre confort, notre bien-être et notre liberté individuelle, au nom d’une cause supérieure. Ils nous disent que nous devons faire des sacrifices pour sauver la planète, tout en accumulant eux-mêmes des privilèges insensés.

On nous raconte que nous devons payer plus cher pour manger moins, vivre plus simplement, polluer moins. On nous dit que c’est pour le bien de tous. Mais ce que l’on nous demande, c’est de renoncer à ce que nous avons durement acquis. D’accepter moins en croyant que nous sauverons plus. De faire taire notre individualisme, de plonger dans une solidarité forcée, tout en regardant les puissants jouir de leur position en toute impunité.

Le sacrifice est devenu un outil de manipulation moderne. On nous vend la décroissance, la frugalité comme vertueuses, tandis que les grands pontes de la politique, de l’industrie et du showbiz brûlent joyeusement des tonnes de carburant fossile dans leurs jets privés. Leurs exemptions sont divines, bien sûr, car eux seuls comprennent les « grandes causes ».



Cette idéologie du renoncement, bien qu’habillée de mots nouveaux comme « écoresponsabilité » ou « justice climatique », n’est rien de plus qu’un vieux mythe recyclé. Depuis des millénaires, on nous dit que l’homme est corrompu, que sa quête du bonheur matériel le conduira à sa perte. Et que la seule issue est la pénitence, le retour à la simplicité, la soumission à des lois immuables, dictées par des forces supérieures.

La vérité est que ce discours sert avant tout le pouvoir. Il maintient les masses dans l’illusion qu’en se sacrifiant, elles accomplissent quelque chose de noble. Mais en réalité, ce sacrifice ne profite qu’à ceux qui contrôlent les leviers du pouvoir. Ceux qui, comme toujours, exploitent ces mythes pour asseoir leur domination et renforcer leurs privilèges.

Alors, que nous reste-t-il ? La lucidité. La prise de conscience que ce n’est pas en se pliant à l’ordre établi, en suivant aveuglément des dogmes recyclés, que l’humanité trouvera son salut. Le véritable progrès ne vient pas du sacrifice de soi, mais de la célébration de l’individu, de la créativité et de la liberté personnelle. Le Soleil n’a jamais demandé qu’on se brûle pour lui. Et aujourd’hui, nous devons refuser de nous brûler pour des idées tout aussi intangibles.

Car il n’y a rien de nouveau sous le soleil, comme on dit depuis cinq mille ans.

Korab Rashiti


Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire

Remarque : Seul un membre de ce blog est autorisé à enregistrer un commentaire.