09 septembre 2024

Le bénéfice du doute ?

Quand j’ai appris la nouvelle de la nomination de monsieur Barnier comme Premier Ministre, j’ai eu un grand coup de mou.

Pour faire bref, je me suis dit « 30 % des français à gauche votent pour une rupture historique avec la technocratie, 40 % des français, cette fois ci à droite, en veulent une aussi, mais avec l’Europe, et je me retrouve avec un gars qui a commencé sa carrière en 1972 et se trouve être le mètre étalon du technocratisme européen.

Je sais bien que mon slogan politique est « place aux vieux », mais quand je dis ça, je pense a des vieux « nouveaux » (moi par exemple) et pas à des vieux -vieux qui ont toujours été là.

Et donc, première impression très mauvaise.

Mais comme je le fais toujours, que j’ai une bonne ou une mauvaise impression, je vais creuser un peu après, pour vérifier s’il n’y a pas lieu de changer d’avis.

Et c’est ce que j’ai fait avec monsieur Barnier, et à ma grande surprise, j’ai été déçu en bien comme disent nos amis Suisses.

Commençons par la façon dont il aurait négocié avec monsieur Macron.

D’après les bruits de couloir qui ont circulé depuis, il aurait rappelé que d’après la Constitution, le premier ministre dirige et conduit la politique   de la Nation tandis que le Président est en charge des intérêts supérieurs du pays.

Depuis Sarkozy, on en était venu à penser que le premier ministre devait suivre les ordres du Président et lui être soumis, apparemment il n’en sera pas ainsi pour monsieur Barnier.

Dans cet esprit, on aurait appris que le nouveau Premier Ministre allait choisir lui-même son chef de cabinet, libérant ainsi le Président de la tâche difficile d’avoir à le faire

Il semble que le nouvellement nommé au poste de Premier Ministre ait rappelé aussi au Président que les futurs ministres du gouvernement étaient sous son contrôle hiérarchique, à lui, et n’avaient aucune raison de passer leur temps à l’Elysée.

Apparemment, les discussions se seraient passées tellement bien que l’on attend toujours, à l’heure où j’écris ces lignes, le message de bienvenue du Président à son Premier Ministre.

Certains vont jusqu’ à dire que le Président serait en train de bouder, ce que j’ai du mal à croire d’une personne aussi mûre et réfléchie.

Je trouve donc que l’entrée en matière de monsieur Barnier a été plutôt réussie.

Venons-en à ce qu’il pense.

Jusqu’à tout récemment, je ne lui faisais pas l’honneur de penser qu’il pensait quoi que ce soit

Eh bien, j’avais tort.

J’ai pris connaissance de ce qu’il proposait quand il s’est présenté à la primaire des Républicains pour la Présidence de la République il y a quelques années et ce que j’ai découvert était très intéressant.

Commençons par le plus intéressant : cet homme a réfléchi sur les problèmes de souveraineté.

Et la première chose qu’il propose est qu’il ne puisse pas y avoir une norme juridique supérieure aux lois françaises, ce qui est absolument essentiel.

En proclamant la supériorité de la Loi française sur le territoire français sur toute autre loi, il détruit tout l’appareil juridique créé à Bruxelles depuis des décennies sans que le peuple français ne l’ait approuvé. En fait, le peuple français l’ avait refusé ce qui fait que tous les abandons de souveraineté qui ont eu lieu depuis, en commençant par l’ Euro sont nuls et non avenus.

Mais il sait tres bien que le ver est dans le fruit aussi chez nous, le Conseil d’Etat, la Cour constitutionnelle sont remplis de magistrats qui ne demandent qu’à se coucher[1] devant les diktats de Bruxelles.

Il propose donc une sorte de bouclier constitutionnel qui empêcherait les partisans forcenés de la souveraineté européenne de faire prévaloir leurs points de vue internationaliste en faisant appel à des Cours de justice nationales ou européennes, qui ne demandent qu’à s’affranchir de tout contrôle des politiques au nom de l’indépendance de la Justice.

Car les Juges pensent aujourd’hui qu’ils font la Loi alors qu’ils ne doivent que l’appliquer.

En particulier, les juges n’ont rien à dire sur les questions de Souveraineté.

Ils rendent la Justice au nom du Peuple Français, mais ne sont pas le Peuple

Certaines décisions de nature politique, touchant à la souveraineté du pays et sur lesquelles l’Assemblée Nationale se serait prononcée ne pourraient donc tout simplement pas faire l’objet d’appel, ce qui me paraît parfaitement normal, faute de quoi le gouvernement par les Juges devient inévitable.

Un premier bon point donc point donc pour monsieur Barnier.

Venons-en à l’immigration, domaine important s’il en fut

L’approche qu’il proposait était très pragmatique et comportait des mesures telles une forte réduction du regroupement familial, la fin du droit du sol pour Mayotte et la Guyane (en attendant la France ?), le rétablissement de la double peine et bien d’autres encore mais surtout, surtout, il faisait valider ce changement de politique par un RÉFÉRENDUM pendant la première année de son mandat.

Il remettait donc dans les mains du peuple la décision sur ce domaine essentiel, ce qui voulait dire que les décisions importantes allaient être prises par le peuple et non plus par quelques malades mentaux que leurs mamans n’avaient pas assez aimées.

Réintroduire le référendum est la seule façon d’amener les gens à voter à nouveau.

En ce qui concerne l’économie, en bon Savoyard il a l’air de penser que l’Etat devrait d’abord s’occuper des services publics et des domaines régaliens et laisser la création de valeur à ceux qui savent le faire.

Quant à l’approche verbale des relations humaines, il semble être attaché à connaître l’opinion des « gens du bas », ce qui fait une heureuse différence avec nos gouvernements depuis des lustres qui n’écoutent que ceux qui ont été à côté d’eux depuis toujours à condition qu’ils pensent comme eux et qu’ils offrent toujours la même solution à tous les problèmes.

Le fait que cette solution (plus d’Etat, c’est-à-dire plus de pouvoir pour eux) ne marche jamais pour les gens d’en bas, n’a bien entendu aucune importance puisqu’ils n’ont jamais entendu parler des gens d’ en bas dans leurs écoles. Ces gens-là n’ont jamais rencontré des gens du bas et ne savent même pas qu’ils existent.

Je suis content que nous ayons un premier ministre qui sache qu’il y a des gens en bas et que c’est surtout eux dont il faille s’occuper.

Je sais aussi que la tâche qui l’attend est immense et que bien des forces mauvaises vont tout faire pour qu’il échoue.

Je m’arrête là mais je veux terminer en disant à la fois ma grande surprise et mon espoir : pour la première fois depuis Pompidou un homme politique français m’inspire une certaine confiance. Bien entendu, l’hypothèse que je sois en train de devenir gâteux peut être retenue. A 81 ans, devenir gâteux est mon droit le plus strict.

En ce qui me concerne, et tout gâteux que je sois, je lui souhaite bonne chance, je suivrais ses progrès avec intérêt et je me dis qu’il a -peut-être- une petite, une toute petite chance de réussir.

[1] En France, comme chacun le sait, il y a la magistrature assise, la magistrature debout et surtout la magistrature couchée. Après tout, sous Pétain, quand il fallut prêter serment au Maréchal, il n’y eut qu’une seule démission.

Et donc, ceux qui le jugèrent quelques années après, avaient tous prêté serment de lui obéir.

Charles Gave

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