L’approche systémique de Palo Alto fait référence à un courant de pensée apparu dans les années 1950 lorsque plusieurs thérapeutes se réunissent autour de Grégory Bateson. Cette équipe a choisi la ville californienne de Palo Alto pour réunir les compétences diversifiées de chacun et proposer des pistes de recherche novatrices.
C’est de cette collaboration qu’est née l’École de Palo Alto, qui représente ce mouvement de pensée bouleversant de nombreux modèles de thérapie classique. La démarche systémique de Palo Alto apparaît comme innovante, car elle considère que les difficultés d’une personne doivent être reliées à l’environnement dans lequel elle évolue. Cet outil est particulièrement utile dans le secteur social et médico-social, c’est pourquoi la formation reste indispensable pour le maîtriser. Voyons en détail en quoi la thérapie systémique de Palo Alto diffère des approches traditionnelles.Les origines de l’École de Palo Alto
Grégory Bateson (1904-1980) est considéré comme étant à l’origine de l’École de Palo Alto. À la fois psychologue, anthropologue, épistémologue américain, il bénéficie de compétences pluridisciplinaires. Dans les années 1950, il s’entoure d’une équipe de chercheurs aux parcours éclectiques. Sont notamment présents Milton Erickson (qui a donné naissance à l’hypnose ericksonienne), John Weakland (thérapeute et anthropologue), Jay Haley (psychothérapeute), Paul Watzlawick (psychologue, psychothérapeute et sociologue), ainsi que les psychiatres Donald deAvila Jackson, Richard Fisch, et William Fry.
Ensemble, ils créent ainsi ce nouveau courant de pensée qu’est l’approche systémique.
Des thérapeutes commencent alors à s’inspirer de cette approche en considérant la famille comme étant un système ouvert, c’est-à-dire que chacun des membres interagit avec l’environnement dans lequel il évolue.
L’approche systémique de Palo Alto se différencie des approches thérapeutiques classiques
Chaque individu doit faire face à une série de difficultés tout au long de sa vie. Cela est considéré comme normal. Mais quand ces difficultés sont récurrentes, que l’on en vient pas à bout, qu’elles se transforment en problème, jusqu’à dans certain cas être considéré comme pathologique. L’approche systémique de Palo Alto apporte plusieurs atouts :
Elle prend en compte les interactions de l’individu avec son environnement
Dans les thérapies traditionnelles, nous considérons que les soucis psychologiques d’une personne sont dans sa tête, dans la psyché. Les problèmes lui sont propres. Selon l’approche systémique, les problèmes du patient sont en lien avec son environnement. L’individu baigne dans un système d’interactions. La difficulté émerge de sa relation de soi à soi, de soi à l’autre ou aux autres, de soi au monde.
Il existe plusieurs principes systémiques :
- le principe d’homéostasie : Chaque système tente d’éviter toute modification de façon à rester intact, à toujours fonctionner de la même façon. Le système met donc en place des processus de régulation pour conserver un équilibre ;
- le principe de totalité : pour appréhender comment s’organise le système, il faut l’étudier dans sa globalité, car c’est lui qui permet de comprendre les actions des individus qui le composent ;
- le principe d’équifinalité : la façon dont les interactions s’organisent dans un système à l’instant présent est plus importante que d’étudier son histoire ;
- le principe de feed-back ou de rétroaction : cela signifie que si 2 personnes sont en interaction (Jean et Michel, par exemple), si Jean transmet un message à Michel, cela a un impact sur ce dernier. Mais le message que transmet à son tour Michel à Jean modifie également l’attitude de Jean. Cela signifie que les évènements évoluent de façon circulaire.
L’École de Palo Alto met donc en avant l’approche interactionnelle. Le symptôme éprouvé par un patient n’est plus interprété comme étant simplement un problème interne. Les troubles de la personne (anxiété, phobies, troubles du comportement, anorexie, problèmes familiaux, etc.) peuvent résulter de difficultés de communication avec son environnement (famille, collègues, etc.), c’est pourquoi le professionnel prend en compte tous les systèmes auxquels elle appartient (système familial, professionnel, etc.). Il n’agit pas simplement sur le patient.
L’approche systémique se focalise sur le présent
Les thérapies classiques se canalisent sur les origines de la souffrance que peut éprouver un individu. Dans les thérapies systémiques, le professionnel n’occulte pas l’histoire de la personne, car il est évident qu’elle s’est construite à partir d’événements qu’elle a vécus dans le passé. Mais ce qui compte, c’est l’ici et maintenant. Dans l’approche systémique de Palo Alto, le patient a surtout du mal à supporter de ne pas pouvoir résoudre son problème à l’instant présent. Ce n’est donc pas son passé qui le fait le plus souffrir.
C’est pourquoi le thérapeute analyse les interactions au moment présent. Par exemple, dans le cas où un parent voit son adolescent consommer de la drogue : le professionnel demande aux parents comment cela se passe quand ils voient leur jeune mal en point, quelles émotions cela suscite chez eux, quelles sont les interactions entre le parent et l’ado.
Le principe de l’analyse systémique de Palo Alto est de considérer que si la difficulté de la personne perdure encore à l’instant présent, cela signifie que les tentatives de solutions qu’elle met en place ne fonctionnent pas. Les difficultés se reproduisent au fil du temps et peuvent même se renforcer.
Le patient détient la solution à son problème
Le professionnel implique beaucoup la personne dans l’analyse, la rend actrice, car il sait que c’est elle qui finit par trouver la réponse à ses difficultés. C’est elle qui va aider le thérapeute à cerner les outils de changement adéquats dont elle a besoin.
L’intervenant va donc initier le changement pour la personne. Cette dernière appartient à un système au sein duquel le problème se met en place. Les modes interactionnels qui se sont installés au sein de ce système nuisent à sa guérison. C’est elle qui peut aider le professionnel à lui proposer une façon de faire différente qui l’amènera à supprimer ses difficultés. Le thérapeute essaie simplement de modifier les perceptions de l’individu par rapport à la situation qu’il vit. Cela s’appelle le recadrage. Le patient est donc considéré comme quelqu’un de responsable, de capable.
Le concept de compétence des familles a ici toute sa place, ce qui signifie que chaque famille a des ressources pour trouver les solutions à ses difficultés. Comme elle ne s’en rend pas toujours compte, le professionnel les aide à en prendre conscience et à les utiliser.
Les émotions prennent une place importante dans l’approche systémique
Ce sont les émotions qui guident nos actions. C’est pourquoi le professionnel ne peut les ignorer sinon il se prive de tout ce qui peut faire partie du problème.
Par exemple, quand une personne tente d’aider un membre de sa famille qui est victime d’une addiction, de nombreuses émotions entrent en jeu, et peuvent empêcher la mise en place d’une solution efficace. La personne qui prend en charge la détresse d’autrui peut être poussée à trop l’entourer, parce qu’elle même souffre de voir l’autre dans cet état. Mais, paradoxalement, ce type de modalité interactionnelle peut nuire au rétablissement de la personne. Donc, certaines émotions nous empêchent de mettre en place une solution adaptée et participent au dysfonctionnement familial.
Le professionnel travaille sur une problématique concrète
Grâce à un dialogue stratégique, le professionnel va comprendre à quel moment la personne ressent le symptôme, la manière dont cela se manifeste, les émotions qu’elle ressent. Il s’agit de questions très pratiques qui permettent de mieux définir le dysfonctionnement chez la personne. Cet outil facilite cette compréhension puisqu’il permet de travailler sur du concret.
Le thérapeute cherche ainsi à amorcer les changements, par de petites prescriptions de tâches pour amener progressivement le patient à modifier sa réflexion et son comportement, et à se retrouver dans une situation de mieux-être.
Il s’agit d’une approche systémique paradoxale
Nous avons tous notre propre vision du monde, à savoir des croyances, des valeurs. Nous ne nous en apercevons pas toujours, mais nous la considérons parfois comme une réalité alors que ce n’est pas le cas. Et nous avons aussi bien souvent du mal à nous en défaire. C’est elle qui nous pousse à agir, nous fait prendre des décisions qui nous semblent être les bonnes alors qu’elles peuvent faire de nombreux dégâts.
Par exemple, un parent peut frapper son enfant parce qu’il pense que c’est la seule solution pour l’empêcher de faire des bêtises. Et même si l’enfant continue dans cette voie, le parent persiste à lui porter des coups parce qu’il ne connaît pas d’autre manière de fonctionner.
Les professionnels du secteur social et médico-social qui accompagnent des personnes vulnérables doivent donc prendre de la distance par rapport à leurs propres perceptions et accepter de rejoindre la vision du monde de leurs patients. Même s’ils ne comprennent pas la violence du parent, ils doivent se mettre à son niveau, comprendre comment celui-ci voit les choses.
L’approche systémique de Palo Alto est donc une stratégie paradoxale, car il faut rejoindre la vision du monde de l’autre pour modifier ses croyances, qui peuvent le conduire à des actes dévastateurs. L’objectif n’est pas de remettre en question la vision du monde du patient, mais simplement la manière dont il s’y prend. Il faut lui montrer qu’il y a des façons de faire plus adaptées.
Les thérapies systémiques sont de courte durée
L’objectif du modèle systémique est d’agir rapidement contrairement à l’approche plus classique où le patient peut consulter pendant de nombreuses années, notamment parce que les références au passé sont multiples. Ici, le thérapeute a pour objectif de résoudre le problème, il s’intéresse donc au comment plutôt qu’au pourquoi. Le patient peut alors devenir rapidement autonome. C’est pourquoi l’on parle de thérapie brève avec l’approche de Palo Alto.
La particularité de la stratégie thérapeutique de l’École de Palo Alto est ainsi de se structurer autour d’une thérapie familiale (s’adresse à toute la famille), d’une thérapie brève, et d’une thérapie stratégique qui vise la mise en place d’actions concrètes.
La maîtrise de l’approche systémique et stratégique de Palo Alto passe par une formation fiable
Il est important pour les professionnels du secteur social et médico-social d’analyser les fondements de l’approche systémique afin qu’ils proposent un accompagnement pertinent. C’est pourquoi Epsilon Melia leur propose des formations à l’approche systémique adaptées à leurs besoins :
- se former à l’approche systémique et stratégique : l’objectif de cette formation est d’apporter les bases de la systémie en fournissant des définitions pouvant être mises en pratique immédiatement ; d’induire le changement chez les patients grâce aux méthodes d’entretien, du recadrage, des prescriptions stratégiques ; et d’apprendre à aider les personnes qui ne souhaitent pas être prises en charge (aide sous contrainte) ;
- Pour renouveler notre regard sur les personnes qu’on accompagne.
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