Harley-Davidson puis Jack Daniel’s abandonnent le wokisme

Le début de la fin ?

Ces derniers jours, deux grandes marques américaines emblématiques, Harley-Davidson et Jack Daniel’s, ont annoncé l’abandon de leurs politiques dites « woke », notamment en matière de diversité, d’équité et d’inclusion (DEI). Ces décisions interviennent dans un contexte de pression croissante de la part de certains consommateurs et activistes conservateurs.

Harley-Davidson a été le premier à faire marche arrière, ce qui n’est pas toujours simple avec ce genre de gros véhicules. L’entreprise a déclaré qu’elle n’avait plus de fonction dédiée à la diversité, l’équité et l’inclusion. Elle a également annoncé une révision de tous ses contrats de sponsoring, affirmant vouloir se concentrer sur sa « communauté fidèle de motards ». La société a notamment cessé sa participation à l’indice d’égalité des entreprises de la Human Rights Campaign, qui évalue les entreprises sur leurs politiques favorables à la communauté LGBTQ+.

Peu après, Jack Daniel’s, par le biais de sa société mère Brown-Forman, a emboîté le pas. Dans un courriel adressé à ses employés, l’entreprise a annoncé plusieurs changements majeurs :

1. L’arrêt, elle aussi, de sa participation à l’indice d’égalité des entreprises de la Human Rights Campaign.
2. La suppression du lien entre les bonus des dirigeants et les objectifs DEI, pour les rattacher uniquement aux performances commerciales.
3. L’abandon des « ambitions quantitatives en matière de diversité de la main-d’œuvre et des fournisseurs ».
4. La réduction des formations axées sur les thématiques « woke ».

Pour rappel, les objectifs DEI (Diversité, Équité et Inclusion) sont des initiatives et des engagements pris par les entreprises pour créer un environnement de travail plus « inclusif et équitable » :

Diversité

 Augmenter la représentation de différents groupes (ethnies, genres, âges, orientations sexuelles, etc.) à tous les niveaux de l’entreprise.
 Créer une main-d’œuvre qui reflète la diversité de la société.

Équité

 Assurer un accès égal aux opportunités pour tous les employés.
 Éliminer les obstacles systémiques qui désavantagent certains groupes.
 Mettre en place des pratiques de rémunération et de promotion équitables.

Inclusion

 Créer une culture d’entreprise où chacun se sent valorisé et respecté.
 Encourager la participation de tous les employés dans les processus décisionnels.
 Favoriser un sentiment d’appartenance pour tous les membres de l’organisation.

Et de manière générale, les objectifs DEI visent généralement à :

 Améliorer la diversité dans le recrutement et la rétention des talents.
 Former les employés et les dirigeants sur les biais inconscients et l’inclusion.
 Mettre en place des politiques et des pratiques qui soutiennent l’équité.
 Mesurer et suivre les progrès en matière de diversité et d’inclusion.
 Créer des groupes de ressources pour les employés ou des réseaux de soutien.
 Intégrer les principes DEI dans la stratégie globale de l’entreprise.

Les décisions des entreprises Harley-Davidson et par ailleurs Jack Daniel’s semblent être motivées par plusieurs facteurs. Tout d’abord, la pression exercée par des activistes « anti-woke » comme Robby Starbuck, qui a mené des campagnes ciblées contre ces entreprises. Ensuite, la crainte de boycotts de la part de consommateurs conservateurs, qui perçoivent ces politiques comme contraires à leurs valeurs, en particulier pour ces deux marques dont l’image est plutôt masculine, voire virile.

Enfin, les entreprises évoquent un changement dans le paysage juridique et externe, particulièrement aux États-Unis, qui les oblige à s’adapter.

En effet, il y a tout d’abord une évolution juridique : certaines décisions de justice récentes, notamment de la Cour suprême, ont remis en question ou limité certaines pratiques liées à la discrimination positive dans l’éducation et l’emploi. Par exemple, la décision de la Cour suprême en 2023 interdisant la prise en compte de la race dans les admissions universitaires a eu des répercussions sur les politiques de diversité des entreprises.

Mais aussi une pression politique : dans certains États américains, des lois ont été proposées ou adoptées pour restreindre certains aspects des programmes DEI, notamment en ce qui concerne la formation à la diversité ou les quotas d’embauche basés sur la race ou le genre.

D’autre part, des poursuites judiciaires, les accusant de discrimination inverse, ont obligé certaines entreprises à remettre en question leurs politiques DEI.

Aussi, un changement de climat social contre certaines initiatives DEI perçues comme trop agressives ou injustes par certains groupes.

Enfin, une évolution des attentes des consommateurs et des investisseurs fait que les entreprises doivent naviguer entre les demandes de plus grande diversité et inclusion et les critiques de certains groupes contre ces mêmes politiques.

Ces changements créent un environnement complexe et parfois contradictoire pour les entreprises, les obligeant à réévaluer et potentiellement à ajuster leurs approches en matière de DEI pour rester en conformité avec la loi tout en répondant aux attentes diverses de leurs parties prenantes.

Dès lors, ces revirements marquent un tournant significatif dans l’approche des grandes entreprises américaines vis-à-vis des politiques progressistes, reflétant une polarisation croissante de la société américaine sur ces questions. Les élections américaines qui s’en viennent promettent d’ailleurs d’en être un bon reflet.

Le communiqué officiel (traduction E&R)

Depuis plus de 120 ans, Harley-Davidson apporte le plaisir de la moto aux motards du monde entier, quels qu’ils soient, d’où qu’ils viennent et quelles que soient leurs convictions. Nous avons un principe directeur : United We Ride. Il définit la manière dont nous gérons notre entreprise, dont nous traitons notre personnel et souligne notre engagement à accueillir tout le monde.

Nous sommes attristés par la négativité qui règne sur les médias sociaux depuis quelques semaines et qui vise à diviser la communauté Harley-Davidson. En tant qu’entreprise, nous prenons ce problème très au sérieux et il est de notre responsabilité de réagir avec clarté, action et faits.

Au début de l’année, nous avons lancé un examen interne des parties prenantes afin de mieux aligner les activités de la société sur les besoins de l’entreprise et de la communauté.

Sur la base de cet examen, nous nous sommes engagés sur les points suivants :

- Diversité, équité et inclusion (DEI) : nous considérons qu’il incombe à chaque dirigeant de veiller à ce que notre personnel soit le reflet de nos clients et des zones géographiques dans lesquelles nous opérons. Il est essentiel pour notre activité que nous recrutions et conservions les meilleurs talents et que tous les employés se sentent les bienvenus.

Cela dit, nous n’avons pas exercé de fonction d’IED depuis avril 2024, et nous n’avons pas de fonction d’IED aujourd’hui. Nous n’avons pas de quotas d’embauche et nous n’avons plus d’objectifs de dépenses en matière de diversité des fournisseurs.

- Groupes de ressources pour les employés des entreprises (BERGS) : afin de garantir l’alignement de nos BERGS sur les activités de l’entreprise, nous fournirons à l’avenir des cadres supérieurs à chaque groupe afin qu’ils se concentrent exclusivement sur le développement professionnel, la mise en réseau et le mentorat.

- Sponsoring et affiliations : nous passons en revue tous les parrainages et organisations auxquels nous sommes affiliés. Les actions découlant de cet examen en cours sont les suivantes :

• Toutes les activités de parrainage seront désormais approuvées et gérées de manière centralisée par la société ou la Fondation Harley-Davidson.

> En tant que marque grand public, nous nous concentrerons exclusivement sur le développement du sport motocycliste et sur la fidélisation de notre communauté de conducteurs, en plus du soutien que nous apportons déjà aux premiers intervenants, aux militaires actifs et aux anciens combattants.

> La Fondation Harley-Davison s’est engagée à susciter des changements positifs à Milwaukee, notamment par le biais du Davidson Park récemment inauguré à notre siège social de Juneau Avenue.

• Harley-Davidson ne participera pas à l’avenir à la notation HRC.

- Formation des employés : L’entreprise évalue en permanence ses possibilités de formation pour s’assurer qu’elles sont adaptées à son personnel. La formation dispensée sera liée aux besoins de l’entreprise et ne comportera aucun contenu à caractère social - seule la formation légalement requise a toujours été obligatoire chez Harley-Davidson.

Nous pensons qu’il est bon pour les affaires d’avoir une large base d’employés et de clients et qu’en fin de compte, tout le monde devrait connaître la joie de conduire une Harley-Davidson. Nous restons à l’écoute de tous les membres de notre communauté alors que nous poursuivons notre voyage ensemble en tant que marque de moto la plus appréciée au monde.

UNITED WE RIDE

Vers la fin du wokisme ?

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