Décidément, cette affaire irrésolue qui tourne autour du sexe de la Première dame a pris une ampleur inimaginable. C’est bien simple, tout le monde en parle, et pas qu’en France. Depuis la reprise du dossier par la charmante Candace, liée à Donald Trump, l’Amérique a découvert le grand secret de la politique française.
Car au fond, personne ne le sait, même au-delà des questions sexuelles : qui est Brigitte ? Qui est vraiment Emmanuel ? On n’a jamais eu autant de secrets d’un coup à l’Élysée. Même Sarko et ses brunettes, sa masseuse et ses ministres, sa nouvelle femme et ses amants n’ont pas autant défrayé la chronique. Il est vrai que le sexe hétérosexuel ne choque pas les Français. L’homosexualité, un peu plus, mais c’est entré dans les mœurs, jusqu’à un certain point. Même Delon posait des limites, c’est dire.
Le BrigitteGate est l’affaire qui fracture l’information française entre les croyants et les incroyants, entre la réinformation et le mainstream. On continue à entendre les mots fake news dans la bouche des commentateurs officiels, mais avec de moins en moins de conviction, comme si l’expression était une étiquette obligatoire une fois qu’on abordait le sujet, une sorte de protection contre le chômage...
Pourtant, Brigitte, qui s’est fait de plus en plus discrète au fur et à mesure que l’info ou la rumeur enflait, ne se bat pas contre ces dernières, elle laisse pisser, pourrait-on dire. À peine une fois Manu est monté au créneau, mais sans conviction non plus. Il est vrai que la version officielle présente tellement de trous qu’elle est difficile à défendre. En face, on pose des questions légitimes, comme Danglehant, qui défend Natasha Rey : pourquoi le frère ne se présente-il pas pour mettre un terme à la prétendue rumeur ?
Ce qui semble évident pour le commun des mortels ne l’est visiblement pas pour les prestigieux habitants du Château. Cette faiblesse apparente donne évidemment aux jeanmichélistes un surcroît d’énergie, et ils enfoncent le clou, comme Candace, qui va très loin dans la frappe : elle, c’est simple, elle ne doute pas de la sexualité de Brigitte. Sa puissance de feu sur les réseaux sociaux et les traductions qui arrivent maintenant en français – merci l’IA – donnent un poids nouveaux aux investigations de Faits & Documents.
Face au renforcement qualitatif et quantitatif du camp jeanmichéliste, les valets du Château ont reçu l’ordre de contre-attaquer violemment, et c’est ce qu’a fait Alba Ventura pour TF1. On parle désormais de cyberharcèlement. On vous met tout le verbatim car ça pourra resservir un jour, et aussi parce que personne ne le fait, dans la presse. Au sympathique nounours Bruce d’éteindre l’incendie avec un bidon d’essence...
Bruce : On parle régulièrement de cyberharcèlement dans l’actualité et c’est le cas ce matin avec Alba en liberté. Parce que, quand on parle de cyberharcèlement, il y a une cible qui revient, malheureusement trop souvent, c’est Brigitte Macron, et les rumeurs sur Brigitte Macron. Il aura suffit d’une photo de l’épouse du chef de l’État en maillot de bain à Brégançon pour voir ressurgir des théories absolument délirantes selon lesquelles la Première dame serait un homme.
Alba : Vous savez les complotistes, les conspirationnistes, aussi, comme on les appelle, Bruce, c’est comme les cafards. Il est très difficile de s’en débarrasser, et c’est cette vermine qui s’est emparée effectivement de nouvelles photos de Brigitte Macron sur un bateau, euh, en maillot, qui s’est amusée à la montrer sous toutes les coutures, si j’ose dire, sur les réseaux sociaux, pour essayer de prouver qu’elle est un homme. Des millions de vues, 20 millions quand même, pour une image dont on ne sait d’où elle vient, hein, on ne sait pas si c’est une vraie image, ou une image fabriquée.
Alors ce genre de rumeur, ça dure depuis le printemps 2021. Régulièrement, des esprits, on va dire dérangés, ceux qui pensent que la Terre est plate, voyez-vous, se défoulent dans un délire de fake news, tout cela est alimenté par des sites d’extrême droite, mais on retrouve autant de dingos à l’extrême gauche. Et, parce que leur moteur si vous voulez, c’est le côté, euh, anti-élites. Alors, il y a d’anciens Gilets jaunes, il y a des antivax, des naturopathes, une médium, qu’on trouve dans cette sphère, qui se persuadent qu’à l’Élysée on a ourdi un complot, parce que la Première dame aurait changé d’état civil, elle ne serait pas Brigitte Macron, mais elle serait Jean-Michel Trogneux, qui est son frère.
Alors ce, ces gens sont très forts pour relayer et amplifier de fausses informations. Ils sont obsédés ces gens, hein, ils sont habités. Il faut savoir quand même qu’ils passent des heures à publier des vidéos, euh, à, à diffuser des photos, à parler d’interventions chirurgicales, à dire que Brigitte Macron n’est pas la mère de ses enfants. Ce sont des vidéos qui sont reprises, à l’étranger, évidemment exploitées par des réseaux trumpistes aux États-Unis, d’ailleurs, Michelle Obama mais aussi Kamala Harris et d’autres femmes de pouvoir ont déjà fait les frais de ce genre d’attaques, transphobes…
Alors, Brigitte Macron et son frère d’ailleurs Jean-Michel Trogneux, ont porté plainte au pénal pour diffanemation contre deux femmes. Le tribunal va rendre son jugement le 12 septembre, donc c’est très bientôt. Cette affaire, j’en parle parce que, euh, il faut pas prendre à la légère ce genre de choses, il y a une journaliste du Nouvel Obs qui en a fait un livre qui s’appelle L’Affaire Madame. C’est un livre qui explore justement les ressorts de la complosphère : c’est un fléau qu’il faut combattre parce que ça ne va pas s’arrêter dans notre société, où on observe qu’il y a de moins en moins de remparts, il y a un délitement des valeurs, des institutions qui sont fatiguées, des syndicats inopérants, des partis politiques en pleine déconfiture, et c’est là que prospèrent ces réseaux complotistes, c’est de la gangrène, Bruce, ces réseaux. Donc je le redis, ce n’est pas simple à éradiquer, mais il ne faut pas laisser passer, et c’est pour ça qu’on en parle ce matin.
Bruce : Oui, parce qu’on peut aussi s’interroger, est-ce qu’il faut en parler ?
Alba : Oui ! Il faut en parler ! Absolument !
Bruce : On se pose la question d’ailleurs, on se dit est-ce qu’il faut, en quelque sorte, donner, euh, euh voila, de la place, à cette inf… mais oui ! Parce que ça atteint, et vous l’avez parfaitement expliqué, une telle ampleur, dix, des dizaines de millions de vues.
Alba : Oui, et ne pas les laisser parler, ne pas les laisser diffuser, c’est difficile encore une fois, hein, de mener ce combat. Mais voila en face il faut qu’on réponde.
Blonde : Mais il y a une grosse responsabilité aussi des réseaux sociaux, parce que l’image dont vous parlez on l’a vue passer sur X, et moi je l’ai vue passer des dizaines de fois ces derniers jours. Il y a une responsabilité des réseaux sociaux aussi à ne pas savoir faire le ménage…
Alba : C’est ça, les hébergeurs.
Blonde : Bien sûr les hébergeurs, et il y a une vraie zone grise, et si on s’attaque pas à ce mal-là par la racine, c’est-à-dire par la modération, on n’arrivera jamais en effet à, à mettre fin à ce mouvement-là.
Bruce : Bien, merci beaucoup Alba Ventura.
« Cafards », « vermine », « éradiquer », « gangrène », « dingos », « délires », « dérangés », on se croirait en avril 1994 au Rwanda à l’écoute de Radio Mille Collines. Mais on est bien sur TF1. Alba, qui nous a habitués aux pires revues de presse imaginables sur RTL, cite Emmanuelle Anizon, qui a centré son livre sur la complosphère plutôt que sur Brigitte. C’est le moment de citer le passage qu’elle consacre à Xavier Poussard, vu comme le droit de réponse de F&D sur X :
« Dans les mois qui ont suivi la publication de l’enquête, le journaliste de Faits & Docs a continué de s’accrocher au sujet et de publier. J’échange régulièrement avec lui au téléphone, via la messagerie cryptée Signal. Son profil m’intrigue. Fils de profs “agrégés et de gauche”, il a grandi dans un appartement parisien au milieu des livres.
[...] Et voilà qu’on le retrouve, à trente-cinq ans, chasseur d’élites dans un journal confidentiel classé à l’extrême droite. Je m’étonne de cette trajectoire, il élude, retourne la question : “C’est quoi l’extrême droite aujourd’hui ?” Il est cultivé, cite un tas d’auteurs, parle avec un mélange de brutalité sarcastique et de détachement pince-sans-rire, détaille ses recherches avec cette minutie particulière de l’enquêteur obsessionnel, qui archive tout méthodiquement chaque jour, tient des fiches détaillées sur tout le monde. Il a, gravée dans sa tête, une cartographie politico-économico-sexuelle pointilleuse de tout le gotha, ramifications généalogiques, historiques comprises.
[...] Ses portraits, il les peaufine à distance, devant son écran, avec ses archives, et ses sources. D’autant plus à distance qu’il n’habite plus en France. “Trop risqué, avance-t-il. En 2020, j’ai décidé de déménager, avec ma femme enceinte et mon fils, la France devenait irrespirable pour moi. Et elle l’est devenue encore plus depuis que j’ai publié sur Brigitte Macron”.
[...] À plusieurs reprises, dans les tweets de Zoé Sagan (@99percentyouth), je vois qu’il fait référence au travail de Faits & Docs sur l’affaire Brigitte. J’appelle Xavier Poussard, qui me confirme qu’ils échangent régulièrement tous les deux au téléphone.
[...] Tout sépare les deux trentenaires. D’un côté Aurélien Poirson-Atlan, nom d’origine juive, proche de l’avocat d’extrême gauche Juan Branco (@anatolium), de l’autre Xavier Poussard, rédacteur en chef d’une revue d’extrême droite taxée d’antisémitisme. L’alliance aurait été impensable il y a vingt ans, elle leur semble évidente aujourd’hui. Ils se sont plu tout de suite, au téléphone, l’un en Italie, l’autre dans le Sud de la France. Même esprit rapide, même génération, même vie de papa qui emmène ses enfants le matin à l’école avant d’aller dézinguer l’ordre établi, seul devant son ordinateur. Même dénonciation des élites et de leurs déviances supposées ou pas, notamment sexuelles, voire pédocriminelles. Dans cette alliance, le journaliste de Faits & Docs apporte l’enquête, la mémoire, les archives, et Zoé Sagan, l’audience, la force de frappe, l’approche « pop », comme il se plaît souvent à le dire. Le premier souffle des infos confidentielles, que le second met en scène, théâtralement. Leur coopération renforce réciproquement leur pouvoir et leur visibilité. Sur l’affaire Brigitte, cette complémentarité joue à plein.
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