A quoi sert le sommet européen de Lausanne sur “la paix en Ukraine” ? Les désistements se sont abattus sur lui comme un orage de mousson. Résultat final : Zelenski se retrouvera sans doute seul avec les fidèles et finauds dirigeants des pays de l’UE (on sait que même Biden fut l’un des premiers à se défiler) ; tout le reste sera constitué de sous-fifre, à commencer par l’immensément inutile Kamala Harris... Autant dire, personne, – à part les Européens, sacrebleu !
Alors, à quoi sert ce sommet ? Le but n’était pas tant la paix que l’affirmation favorable à l’Ukraine-de-Zelenski de la plus grande partie de la “communauté internationale”. C’est chou blanc. Mais il reste pourtant une raison, sur laquelle certains insistent, et notamment l’ami Mercouris (hier, au début de son programme). La re-légitimation de Zelenski.
Zelenski a été touché par l’argument légaliste de Poutine : ce monsieur n’est plus président, selon la Constitution. Son mandait s’est terminé le 23 mai et n’a pas été renouvelé ; l’argument de l’état d’exception ne tient pas au regard de l’un des articles de la Constitution, il ne peut être avancé que sur un vote du Parlement qui n’a pas eu lieu. Légalement, Zelenski n’est plus président de l’Ukraine. Pour Mercouris, les lambeaux de la conférence de Lausanne doivent servir à une re-légitimation de facto, au moins de la part des dirigeants des pays de l’UE, qui sont ses principaux soutiens.
« Le vrai but de la conférence c’est de rallier le plus possible de pays autour du plan ukrainien, comme l’a reconnu implicitement le chancelier Scholz lui-même. Si Zelenski dépense autant de temps pour un but inatteignable de faire la paix, c’est d’abord pour rallier autant de dirigeants de pays à la conférence et, de ce fait, de faire reconnaître Zelenski comme président de l’Ukraine malgré la fin de son mandat... »`
Nous nous retrouverons donc entre Zelenski et les dirigeants européen, en “entre soi”. De ce fait l’isolement non seulement du monde américaniste-occidentaliste, mais encore plus de l’Europe de l’UE elle-même (sans les USA) apparaitra plus forte que jamais, bien plus que la re-légitimation de Zelenski. D’ailleurs, cette re-légitimation aura tout à fait l’air d’une magouille qui ne trompe ni n’intéresse personne et ainsi le jugement de Poutine sera-t-il ratifié..
Cette situation de l’isolement de l’Europe est en passe de devenir un facteur non seulement dramatique mais essentiel de la situation internationale. Pour le montrer d’une façon extrêmement réaliste et concrète, j’aimerais passer à un autre aspect, une autre zone de la vie politique internationale qui détaille et explique clairement la profondeur et surtout les causes de cet isolement. C’est le cas de l’Afrique, où l’Europe fut pendant des siècles la maîtresse absolue de l’espace, des matières et des gens., – et qui ne sera guère présente à la conférence de Lausanne.
Il s’agit d’une reprise de l’éditorial du n°174 de la publication mensuelle sur son site ‘L’Afrique réelle’, de juin 2024, de Bernard Lugan. Certainement le meilleur africaniste français, Lugan est évidemment soigneusement tenu à l’écart des institutions officielles et des échos des grandes voix et voies de la presseSystème, selon le courant de censure courant et absolument vertueux qui traverse aujourd’hui les démocraties libérales européennes.
On reste stupéfait, malgré l’expérience déjà accumulée de l’importance capitale, fondamentale, prise par les mœurs et déviances sociétales du wokenisme dans la définition de la politique étrangère et dans l’arrangement général de la géopolitique. C’est comme si l’effondrement dans la perversion et dans la dégénérescence de l’Europe était devenu le facteur essentiel, pas loin d’être exclusif, de la détermination de cette politique ; il l'est dans tous les cas pour les Africains, qui le qualifient d'“existentiel”... Le ‘Satan’ de Douguine agit aujourd’hui à visage découvert, et c’est de sa part une audace bien risquée ; pour notre compte, c’est une excellente chose puisqu’ainsi pourra-t-on se compter et réaliser en toute conscience ce que nous sommes devenus et ce qui nous attend...
PhG – Semper Phi
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Pourquoi l’Afrique a rompu avec l’“Occident”
Le 16 mai 2024, lors d'un discours consacré aux relations entre l'Afrique et l'Europe prononcé à Dakar devant les étudiants de l'université Cheikh Anta Diop en présence de Jean-Luc Mélenchon, le Premier ministre sénégalais Ousmane Sonko a déclaré que la « promotion des droits des homosexuels alimente le sentiment anti-occidental en Afrique ».
Sur un continent où les deux tiers des pays criminalisent l’homosexualité, les injonctions occidentales en la matière sont en effet ressenties comme des attaques directes à l’ordre naturel africain. Ici, les peines contre les homosexuels vont en effet de l’amende à la condamnation à mort. L’ancien président de Gambie, Yahya Jammeh affirmait pour sa part que son pays « lutterait contre ces vermines gays de la même manière qu’il combat les moustiques responsables du paludisme, sinon plus agressivement ». Quant au défunt président Mugabe du Zimbabwe, ce fut à la tribune de l’ONU qu’en 2015, il déclara que « l’Afrique ne voulait pas de gays sur son sol » car l’homme noir se devait de « perpétuer sa race avec des femmes. »
C’est dans un ferme discours au ton très mesuré qu’Ousmane Sonko a condamné les « velléités extérieures d’imposer l'importation de modes de vie et de pensée contraires à nos valeurs et qui risquent de constituer un nouveau casus belli parce que, dans des pays comme le Sénégal, cela soulève énormément de tensions et d'incompréhensions tant cela met face à face des cultures, des civilisations et des systèmes politiques à la vision diamétralement opposée ».
Refusant ce nouveau diktat qui, à la différence des précédents, n’est ni politique, ni économique, mais « existentiel », Ousmane Sonko a déploré que « la question du genre revienne régulièrement dans les programmes de la majorité des institutions internationales et dans les rapports bilatéraux, jusqu’à se poser comme une condition pour différents partenariats financiers ».
Enfermés dans leur bulle sociétale, les dirigeants occidentaux ne mesurent pas le niveau d’exaspération, voire d’indignation et d’écœurement provoqué par la guerre morale qu’ils mènent actuellement contre les piliers des cultures africaines.
Ancrés sur leur arrogance, eux qui ne trouvent d’échos que dans le cap ouest de l’Europe et en Amérique du Nord, sont partout ailleurs balayés dans ce que le reste du monde considère comme un réflexe de survie. Cependant qu’en Afrique, sur les volutes de leur prétention morale, Russes, Chinois, Indiens, Indonésiens et Turcs tirent les marrons du feu…
Le message d’Ousmane Sonko est très clair : l’Afrique qui ne cédera pas à l’oukase existentiel du Nord a donc décidé de redevenir africaine. Un écho à ceux qui, de plus en plus nombreux, demandent quant à eux que l’Europe redevienne européenne... Ici et là, référence est donc faite à l’identité, ce qui annonce le triomphe de l’ethno-différentialisme sur les nuées de l’universalisme.
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