Nos dirigeants savent faire de grands discours, surtout à l’approche des élections. En matière d’économie, les grandes paroles sont nombreuses, mais elles ne sont pas suivies des actes nécessaires. Pourquoi invoque-t-on la bureaucratie au niveau national alors qu’à Bruxelles, on crée des monstres réglementaires les uns après les autres ? Pourquoi copie-t-on des concepts protectionnistes ? Pourquoi tente-t-on de reformer l’industrie par la contrainte ? Pourquoi impose-t-on des coûts toujours plus élevés aux entrepreneurs ? On ne comprend qu’une chose: pour les entrepreneurs en Europe, la vie devient très difficile.
La réaction d’Olaf Scholz au discours d’Emmanuel Macron a été comme d’habitude, modérée et indifférente : « Ensemble, nous faisons avancer l’UE : politiquement et économiquement », a-t-il laissé entendre. Bon, cela n’est pas de surprise. Macron n’a pas de recette pour faire avancer l’industrie européenne, et Olaf Scholz cherche également le bon momentum pour relancer l’économie chancelante.
Monstres réglementaires
A Berlin, on se contente désormais déjà d’un dixième de pour cent. Le ministre de l’Economie Robert Habeck est fier d’annoncer que l’économie allemande pourrait même croître de 0,3 pour cent cette année, et non de 0,2 pour cent comme on le craignait. Mais le théâtre politique ne change rien au fait que les signes avant-coureurs sont sombres. Les idées manquent chez ceux qui sont assis aux leviers politiques. Restent les grandes paroles. Le ministre des Finances Christian Lindner évoque un tournant économique parce que l’on veut être pris au sérieux sur le plan géopolitique et ne pas mettre en danger la cohésion démocratique. Si l’on demande des mesures concrètes, on parle seulement de réduire la bureaucratie. Depuis de nombreuses années cette promesse n’est pas tenue.
Mais il est également ridicule de vouloir réduire la bureaucratie au niveau national alors que, parallèlement, à Bruxelles des monstres réglementaires sont créés les uns après les autres. Rappelons que rien que lors de la session plénière actuelle de cette semaine, le Parlement européen a lancé la loi sur la chaîne d’approvisionnement, de nouvelles règles pour lutter contre le blanchiment d’argent et le financement du terrorisme, de nouvelles règles sur le devoir de diligence des entreprises (défense contre les conséquences négatives de leurs activités sur les droits de l’homme et l’environnement), la nouvelle directive sur les emballages, la directive sur le travail en plateforme… la liste est longue.
Parallèlement, le Parlement a adopté – à une écrasante majorité – le retrait de l’UE de la Charte de l’énergie , qui, selon la Commission, n’est plus compatible avec le Green Deal et les objectifs climatiques de Paris. Concrètement, cela signifie entre autres la fin des investissements dans les sources d’énergie à base de carbone. Certains États membres s’en sortiront, d’autres verront leur approvisionnement en énergie augmenter.
La Commission vient également d’ouvrir une enquête sur une éventuelle distorsion de la concurrence due aux subventions publiques chinoises dans le domaine des voitures électriques. Comme nous l’avons déjà signalé, des droits de douane punitifs sont envisagés – Bruxelles semble vouloir copier les tendances protectionnistes de son allié transatlantique. Le problème, c’est que dans ce cas, les constructeurs automobiles allemands qui ont délocalisé leur production en Chine pour des raisons de coûts sont également touchés.
Centralisation planifiée
On ne comprend pas : d’un côté, on déplore le manque de volonté d’investir, de l’autre, on renforce les directives d’octroi de crédit pour les banques européennes. La semaine dernière, Enrico Letta a recommandé la mise en place d’une bourse européenne destinée à stimuler les investissements à haut risque – surtout en ce qui concerne les technologies de pointe. Dans ce domaine, les élites bureaucratiques bruxelloises ont en tête une centralisation planifiée, tout comme dans le domaine de l’endettement commun ou de la création de nouvelles sources de revenus communes supplémentaires.
On a généralement l’impression qu’à Bruxelles, on veut encore poser rapidement toutes sortes de jalons avant que le peuple ne se rende aux urnes. Une fois les leviers mis en place, les moulins bureaucratiques se mettent à tourner lentement mais inexorablement – l’essentiel étant que la direction soit la bonne.
Tout cela s’ajoute à l’introduction de l’euro numérique, qui offre les conditions techniques permettant de mettre en œuvre et de surveiller toutes ces réglementations de manière encore plus efficace.
À un rythme hebdomadaire, différents directeurs de banques centrales, le dernier en date étant le danois Klaas Knot, soulignent que la monnaie numérique de banque centrale préservera la discrétion et la protection des données. Messieurs, c’est tout à fait ridicule.
Qui, si ce n’est Bruxelles, a limité les paiements en espèces ?
Qui, si ce n’est Bruxelles, a donné aux banques le droit de demander toutes les données dans le cadre de la prévention du blanchiment d’argent et du financement du terrorisme ?
Qui, si ce n’est Bruxelles, exige la divulgation de toutes les données des entreprises – au titre de la protection du climat, des prétendus droits de l’homme ou des sanctions contre la Russie ?
Les entrepreneurs européens n’ont pas besoin d’être mis sous tutelle, ils ont besoin d’air pour respirer. Celui qui crée une monstruosité bureaucratique sera écrasé par celle-ci. Il y a de nombreux exemples dans l’histoire qui le prouvent.
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2024/04/30/protectionniste-et-centralisateur-bruxelles-ruine-les-entrepreneurs-europeens-par-ulrike-reisner/
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