13 février 2024

Une "Europe de la défense" ... financée par la spoliation des actifs russes gelés ?



Le Conseil européen ouvre la voie à l'utilisation des bénéfices des actifs russes gelés, autrement dit à leur spoliation. Il est vrai que la guerre atlantiste en Ukraine coûte cher, de plus en plus, et qu'elle ne va pas se terminer demain. Il faut donc financer l'alignement atlantiste de l'UE, pompeusement appelé "Europe de la Défense" ou service extérieur de l'OTAN. C'est un moyen immoral et illégitime, mais l'UE est en guerre, puisque le monde global en a besoin.
Deux informations intéressantes, et liées, viennent de tomber de l'Olympe européen. L'une concerne le montant de l'investissement des pays européens dans le conflit en Ukraine - impressionnant. L'autre, la possible utilisation des bénéfices des actifs russes gelés - il faut bien compenser.

Ainsi, dans son discours lors du Forum 2024 du groupe Banque Européenne d'Investissement, Charles Michel a officialisé des chiffres intéressants, tout en reconnaissant le changement radical de cap de l'UE - sa militarisation.

"Depuis le début de la guerre menée par la Russie contre l'Ukraine, nous avons brisé d'innombrables tabous. Nous faisons ce qui aurait été impensable même quelques jours avant le début de la guerre, en livrant des armes à l'Ukraine par l'intermédiaire de la facilité européenne pour la paix, pour un montant de plus de 5 milliards d'euros. Le soutien militaire apporté à l'Ukraine par l'UE et ses États membres depuis le début de la guerre s'élève à environ 28 milliards d'euros."

28 milliards d'euros ... L'on comprend, qu'il ne reste plus d'argent pour les autres secteurs, pour les agriculteurs, pour l'hôpital, etc. Et pour cause, depuis des années, la priorité politique a été donnée à la défense, c'est-à-dire à la guerre.

"Les dépenses de défense des alliés européens ont augmenté en moyenne de plus de 8 % l'année dernière"

Et cela ne date pas de l'année dernière. Ainsi, cette Europe soi-disant créée pour éviter la guerre, a mis en place les structures l'entretenant.

"il s'agit de la neuvième année consécutive d'augmentation des dépenses de défense. En 2022, un quart des dépenses totales en matière de défense, soit près de 60 milliards d'euros, a été consacré à l'investissement dans ce domaine. En d'autres termes, nous pourrions investir au moins 600 milliards d'euros dans la défense au cours des dix prochaines années."

Vous aviez des doutes sur l'orientation de ce monde global : la globalisation, c'est la guerre. Elle ne peut exister autrement, que dans le conflit. Tout d'abord, parce que théoriquement elle ne peut laisser de place à la différence, sinon elle ne serait plus globale. Ensuite, parce que ce fanatisme totalitaire la conduit à détruire tout ce qui ne s'aligne pas, poussant la logique jusqu'à l'auto-destruction. Ce que nous voyons avec la deuxième information du jour.

Le Conseil européen a donné son accord pour l'utilisation des bénéfices des avoirs russes gelés.

"Les Vingt-Sept ont adopté lundi une décision et un règlement qui clarifient les obligations des dépositaires centraux de titres (CSD) qui détiennent les actifs et réserves de la Banque centrale de Russie (BCR) immobilisés en raison des mesures restrictives de l’UE, ouvrant la voie à l’éventuelle mise en place d’une contribution financière au budget de l’UE provenant de ces bénéfices nets pour financer la reconstruction de l’Ukraine.

Le Conseil souligne que cette contribution financière peut être acheminée via le budget d’aide à l’Ukraine, qui fait partie du budget de l’UE pour les quatre prochaines années et sur lequel le Conseil et le Parlement européen sont parvenus à un accord provisoire le 6 février."

Plus concrètement :

"Selon le document, les dépositaires centraux détenant des actifs de la Banque centrale de Russie d'une valeur supérieure à 1 million d'euros doivent comptabiliser et conserver séparément les intérêts courus en raison des sanctions de l'UE."

Mais a priori les 4,4 milliards de bénéfice pour 2023 ne pourront pas être transférés, ce mécanisme devrait concerner l'année 2024.

Si cette décision est mise en oeuvre, il ne restera plus rien de la confiance dans le système financier occidental : tout pays, qui n'est pas aligné, risque alors de se retrouver dans la même situation que la Russie. Ce n'est qu'une question de temps. Quand ils auront goûté à "l'argent facile", il ne sera plus possible de les arrêter. Et la globalisation aura détruit le socle libéral, sur lequel les pays occidentaux se sont construits. Ce libéralisme, mort, qui a accouché de ce monstre.

Karine Bechet-Golovko

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