La start-up Jimmy a annoncé le 14 février un investissement de 100 millions d’euros pour construire trois usines au Creusot (Saône-et-Loire). Elle veut y produire en série des micro-réacteurs nucléaires, ou SMR, destinés à remplacer les chaudières à gaz dans l’industrie.
On sait à quoi vont servir les 32 millions d’euros que France 2030 a alloués à la start-up Jimmy dans le cadre de l’appel à projets petits réacteurs innovants. Le 14 février, la jeune entreprise, qui développe des microréacteurs nucléaires destinés à produire de la chaleur pour l’industrie et remplacer les chaudières à gaz (par exemple dans l'agro ou la production de papier), a annoncé l’acquisition d’un terrain de 125 000 m² en face de la gare Le Creusot TGV, en Saône-et-Loire.
Elle veut y construire trois usines pour fabriquer en séries ses chaudières nucléaires de 10 MW de technologie graphite-gaz, en assurer la maintenance et produire le combustible nucléaire Triso qui les alimentera. Cela représente un investissement de 100 millions d’euros et la création, à terme, de 300 emplois directs. «Nous avons choisi ce site, car pour une start-up créée à Paris, il est rapide d’accès pour nos ingénieurs, qui ont conçu les réacteurs et vont participer à son industrialisation, explique Antoine Guyot, le PDG fondateur de Jimmy. De plus, la région présente un incroyable bassin de compétences. D’ailleurs, nous avons déjà reçu des candidatures spontanées.»
Première usine de combustible Triso en Europe
Sur ce site industriel clé en main, les travaux doivent débuter en septembre 2024 pour une mise en service en 2025 d’un atelier de stockage et d’assemblage des principaux composants du générateur (pompes, système de ventilations...) de 13 000 m² où travailleront 150 personnes à terme. La mise en service de l’usine de montage du combustible Triso dans les blocs de graphite avec une équipe de 15 personnes dans un second bâtiment de 3000 m² est, elle, prévue pour 2026. Enfin, un atelier de préparation du combustible, sous la forme de particules Triso, de 10 000 m² sera fonctionnel en 2028 et créera encore 100 emplois. Aucune énergie par fission ne sera produite sur le site. L’uranium en poudre accueilli dans l'usine pour la préparation des particules Triso sera quant à lui inerte, non activé et sans nocivité, que ce soit à l’intérieur du site industriel comme à l’extérieur, précise Jimmy.
Les particules Triso, pour "Tri-structural Isotropic" sont formées d’un noyau en oxyde d’uranium revêtu de couches qui servent de première barrière de confinement pour retenir les produits de fission. Elles ont la forme de billes d' 1 millimètre d’épaisseur environ, qui sont ensuite compactées dans une poudre de graphite, formant des "compacts" de particules de 2,5 centimètres de hauteur et 1,2 centimètre de diamètre. Ce combustible Triso a été produit pour la première fois dans les années 60. Les particules peuvent contenir plus de 99,9% des produits de fission. Le combustible nucléaire Triso est à la base de nouveaux projet de SMR américains, canadiens et britanniques. En janvier 2023, Framatome a annoncé un projet industriel aux Etats-Unis de production de combustible Triso... pour aller sur Mars.
Pas de fission sur le site
Même sans opération de fission, le site sera néanmoins soumis à une double réglementation de sûreté. Les deux bâtiments combustibles seront "installation nucléaire de base" (INB) et devront respecter les exigences de l’Autorité de sûreté nucléaire (ASN) propres aux installations accueillant de la matière fissile, et celles des directives ICPE (Installation classée protection de l’environnement) afin de prévenir et surveiller les risques industriels. La plateforme industrielle fonctionnera 24 heures sur 24, 260 jours par an. «Le directeur industriel de Jimmy, François Petetin, a prévu une stratégie industrielle qui consiste à ne pas innover sur les bâtiments mais d’avoir une approche lean où tout n’est pas défini au départ. On occupera l’espace au fur et à mesure», précise le PDG de Jimmy.
L’entreprise vise une production de 20 à 30 micro-réacteurs par an. Ils seront installés sur les sites industriels «à la manière de Lego», explique Antoine Guyot. Le design du micro-réacteur a été optimisé pour intégrer des composants standards. Pour l’instant, les composants viendront de l’étranger, au mieux d’Europe, comme pour le bloc de graphite, voire de plus loin. Le combustible Triso pourrait venir, au départ, soit d’Amérique du Nord, soit d’Asie. Jimmy attend le feu vert de l’ASN pour sa première installation à la mi-mars. Un premier client a pris une commande ferme pour un microréacteur. Son nom sera lui aussi dévoilé en mars 2024.
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