La crise du monde agricole, qui à vrai dire ne date pas d’hier, est la résultante de deux facteurs. D’un côté, on trouve la domination de la production par la grande distribution, de sorte que les entreprises agricoles doivent atteindre un seuil de rentabilité élevé pour résister à la pression. De l’autre, la concurrence étrangère, aggravée par le fait que nos importations ne sont pas soumises aux contraintes règlementaires, forcément coûteuses, des producteurs européens. En France, la situation est encore pire, parce que la République ajoute encore des contraintes supplémentaires à ses agriculteurs, de sorte que, même à la seule échelle communautaire, ils sont pénalisés. Mais il y a aussi des motifs d’espoir. Yves-Marie Adeline nous montre, en prenant l’exemple du Jura, comme l’agriculture française sait aussi mettre en valeur des atouts locaux.
A banner reading “Let’s save agriculture” is attached to a farming vehicle, during a blockade by farmers on the A4 highway to protest over price pressures, taxes and green regulation, grievances that are shared by farmers across Europe, in Jossigny, near Paris, France, January 30, 2024. REUTERS/Yves Herman
Dès les années 50, le modèle agricole français s’est recomposé selon des schémas mondialistes : il fallait se servir de son légendaire potentiel agricole pour asseoir la puissance française dans le monde. Pour cela, sans nul doute, la France était forte de ses atouts : souvenons-nous du mot de Sully, le ministre d’Henri IV : « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France », à une époque où l’industrie n’existait pas encore. Mais cela signifiait surtout que la France ne comptait pas sur son commerce pour prospérer, au contraire de l’Angleterre ou de la Hollande. Après 1945, le business model s’est inversé : il fallait que la production française s’impose dans le monde, et de fait, elle s’est hissée au deuxième rang derrière les États-Unis, ce qui était une performance honorable quand on connaît l’immensité géographique de son rival.
Dès les années 50, le modèle agricole français s’est recomposé selon des schémas mondialistes : il fallait se servir de son légendaire potentiel agricole pour asseoir la puissance française dans le monde. Pour cela, sans nul doute, la France était forte de ses atouts : souvenons-nous du mot de Sully, le ministre d’Henri IV : « Labourage et pâturage sont les deux mamelles de la France », à une époque où l’industrie n’existait pas encore. Mais cela signifiait surtout que la France ne comptait pas sur son commerce pour prospérer, au contraire de l’Angleterre ou de la Hollande. Après 1945, le business model s’est inversé : il fallait que la production française s’impose dans le monde, et de fait, elle s’est hissée au deuxième rang derrière les États-Unis, ce qui était une performance honorable quand on connaît l’immensité géographique de son rival.
L’exception jurassienne : le succès des circuits courts
Mais pendant ce temps, à l’intérieur du pays, que s’est-il passé ? L’exportation exigeant de recourir à la quantité pour être rentable, ce sont les exploitations les plus intensives qui ont tiré leur épingle du jeu. De surcroît, en construisant la Communauté économique européenne, l’enrichissement mutuel des pays membres, sensible au début du processus, a coûté la vie aux plus petits paysans, suivant une logique capitaliste reproduite dans le fameux jeu du Monopoly.
Comme contre-exemple de cette politique économique, nous pouvons observer une sorte d’exception française, l’agriculture jurassienne, où l’on pratique le circuit court, peut-être à cause de la configuration géographique qui l’y prédispose ; mais rien n’interdit de s’en inspirer.
61% de la production y sont commercialisés dans le cadre de circuits courts de proximité. 173 entreprises viticoles pratiquent la vente en caveau. La viande bénéficie d’abattoirs de proximité à Lons-le-Saunier et Champagnole, ce qui permet de maîtrise tout le processus aboutissant à la vente, depuis l’élevage jusqu’à la livraison en passant par la découpe et le conditionnement. 76 exploitations commercialisent elles-mêmes la viande ou la charcuterie ; 10% du tonnage du célèbre Comté, ce fromage dont la réputation a largement dépassé les frontières régionales pour son goût délicieusement fruité, sont vendus sur place, dans des galeries aménagées et des magasins de vente, sans autre intermédiaire, ce qui assure 21% du chiffre d’affaires des fruitières.
Initiatives locales et partenariats pour un avenir durable
Ce modèle pourrait paraître obsolète, mais il ne l’est pas, il bénéficie au contraire de la révolution internet. À l’imitation des « drives » portant l’enseigne des grandes surfaces, un « drive fermier » permet au consommateur de commander ses produits sur internet puis de passer les prendre.
Toutes ces méthodes consolident l’Appellation d’Origine Protégée, même s’il y a encore des efforts à faire pour la volaille, les fameux poulets de Bresse dont un tiers seulement bénéficient de ce label.
Résultat de cette politique décidée sur place par les acteurs eux-mêmes, des Associations Pour le Maintien de l’Agriculture Paysanne se sont créées, établissant un véritable partenariat entre un groupe de consommateurs et une ferme, basés sur un système de distribution de « paniers » composés de ses produits. Un rêve, pour beaucoup de producteurs, mais on voit qu’il peut devenir réalité.
Source : https://lecourrierdesstrateges.fr/2024/02/09/contre-la-crise-agricole-les-circuits-courts-du-jura-par-yves-marie-adeline/
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