Depuis la rencontre de Saint-Denis, les compliments pleuvent sur le député européen. Ce n’est pas un hasard.
Il est jeune, il porte beau, il s’exprime avec aisance : les macronistes ont trouvé leur nouvelle idole. Le petit hic, c’est qu’elle s’appelle Jordan Bardella, préside le RN et sera tête de liste aux élections européennes de juin 2024, ainsi qu’il le confirme ce lundi au Figaro : "Il n’y aura pas d’autre élection nationale d’ici à 2027. Donc, comme député européen sortant et chef de parti, je conduirai naturellement la liste du Rassemblement national."
Emmanuel Macron lui-même l’a rencontré pour la première fois mercredi à Saint-Denis, à l’occasion de sa discussion avec les chefs de parti. Il avait lu avec intérêt la lettre publique que lui avait envoyée le numéro 1 du RN. "Le président a constaté que les partis de gouvernement ont moins bossé que Bardella", racontait alors un proche du chef de l’Etat.
Pendant les douze heures de discussion, le député européen ne s’est pas caché derrière son petit doigt. Très vite, pendant le long échange consacré à la situation internationale, et plus particulièrement au conflit déclenché par la Russie, il intervient pour s’étonner des différences entre les positions exprimées par Emmanuel Macron sur l’Ukraine et celles du président de Renew Europe, Stéphane Séjourné. Le président ne prend pas à la légère son interpellation et lui explique qu’il existe entre son ancien conseiller à l’Elysée et lui une sorte de partage des rôles, la France, par la voix de son chef, devant mettre des éléments dans la corbeille qui permettent de discuter avec toutes les parties, le parti Renaissance étant plus libre de s’exprimer avec toute la fermeté requise. "Bardella est convaincant, vraiment. On pouvait penser qu’il allait se comporter ce jour-là comme lorsqu’il est sur un plateau télé, en fait pas du tout", constate, presque ébahi, un macroniste du premier cercle.
Les arrière-pensées des macronistes
Cette unanimité dans le compliment intrigue. Mais comme il arrive, en politique, que quelques arrière-pensées se glissent dans les propos, on voit bien l’intérêt de la manœuvre. C’est Jordan Bardella lui-même qui l’a confié en aparté à Stéphane Séjourné : "Vous voulez diviser mon parti, je vois votre stratégie !" Dire du bien de lui, c’est, sinon dire du mal en creux de Marine Le Pen, en tout cas essayer d’exacerber les tensions entre les deux figures du Rassemblement national.
La ficelle ne date pas vraiment du nouveau monde, elle est vieille comme la politique. Il n’empêche, le RN aussi y trouve son compte, dès lors que son principal objectif pour ce quinquennat est de gagner en crédibilité et d’être perçu comme capable de gouverner. "Notre seul ennemi désormais, c’est nous-mêmes, expliquait il y a peu Jordan Bardella. Si nous sommes bons, nous gagnerons la prochaine présidentielle." On ne va donc pas empêcher les autres de souligner nos qualités…
Pendant la campagne présidentielle de 2022, Gabriel Attal avait eu l’occasion de débattre à plusieurs reprises avec Bardella et considérait déjà qu’il était le plus "efficace" de tous. Au cours du premier quinquennat Macron, les deux hommes s’étaient un jour retrouvés par hasard dans un avion reliant Paris et Marseille : pendant une heure trente, ils avaient discuté, deux jeunes dont l’ambition souffre de peu de limites, deux jeunes qui ont tout sacrifié ou presque pour la politique. Le désormais ministre de l’Éducation nationale a 34 ans, le président du RN fêtera ses 28 ans la semaine prochaine. Ces deux-là n’ont pas fini de se rencontrer…
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